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- J31
- Gérone-Real Madrid (4-2)
Castellanos : et pan, quadruplé contre le Real Madrid !
Auteur d’un quadruplé face au Real Madrid ce mardi soir (4-2), Valentín Castellanos, l'attaquant argentin de Gérone, s’est offert le match d’une vie. Le dernier quadruplé inscrit face au Real en Liga remontait à 1947.
Deux frappes sèches du droit, deux têtes bien placées. En une heure de jeu, Valentín Castellanos a sorti la panoplie de l’excellent buteur, en claquant un quadruplé dans la musette d’Andriy Lunin et de son Real Madrid, ce mardi soir en Catalogne (4-2). Lancé à toute allure dans le dos de la défense merengue, l’Argentin au mètre 80 a mis Éder Militão au supplice. Et si les jeunes joueurs se révèlent souvent sur une soirée, Castellanos a choisi la plus belle.
Lewandowski, il y a dix ans
À 24 ans, « Taty », le surnom du héros fugace, est ainsi venu marquer l’histoire d’un championnat qu’il n’a découvert que l’été dernier. En signant ce poker, comme le veut l’expression en Espagne, Castellanos est en effet devenu le premier joueur à réaliser pareille performance au XXIe siècle en Liga. Pour trouver trace du vestige, il faut remonter au 21 décembre 1947 et s’arrêter au nom d’Esteban Echevarría, pensionnaire du Real Oviedo. Plus proche de nous, le dernier homme à en avoir planté quatre aux Blancos se nomme Robert Lewandowski, le 24 avril 2013 (il y a dix ans et un jour, donc), en demi-finale de Ligue des champions avec le Borussia Dortmund. Autant de dates et de faits qui placent donc la prestation signée Castellanos à un certain niveau de sérieux.
Comme un clin d’œil d’ailleurs, la page Wikipédia de l’intéressé s’est retrouvée inondée de modifications en tout genre – dont la mention de ce fameux quadruplé à peine le coup de sifflet final donné entre Gérone et le Real Madrid – afin de gonfler une biographie jusque-là nourrie par le strict minimum. La biographie de Valentín Castellanos ressemblait jusqu’ici à celle de n’importe quel jeune talent placé sous le giron du City Football Group, trimbalé de prêt en prêt, avec l’espoir, un jour, d’avoir son patronyme hissé hors de la masse.
L’enfant de la City
Né à Mendoza, près des Andes et de la frontière chilienne, « Taty » n’était pourtant pas destiné à devenir un produit du football moderne. « J’ai fait des essais à Lanús et River Plate, mais ils n’ont pas souhaité me conserver, car ils me trouvaient trop grand et trop maigre, narrait-il dans les colonnes de Clarín. J’ai pris un sérieux coup au moral, et j’ai voulu tout plaquer. » Les géants du pays le refusent ? Il part se réfugier dans les petites équipes de sa province natale. Parmi elles, un essai à l’Independiente Rivadivia, structure reconnue localement pour sa formation, de nouveau sans grand succès. En 2016, à l’âge relativement tardif de 18 ans, Castellanos choisit alors de tout reprendre à zéro en s’engageant avec un club de village : le Leonardo Murialdo. D’abord pour fuir l’ennui, ce choix devient en réalité un point de bascule.
Mort de faim, le longiligne buteur fait plier son coach, Tony Torres, tenant coûte que coûte à lui trouver un essai. Les confrères argentins refusent de franchir le pas. Les Chiliens n’hésitent pas. Ami de Torres, Diego Rivarola, directeur sportif de l’Universidad de Chile, accepte d’offrir quelques jours de test à ce jeune inconnu, en janvier 2017. Bonne pioche, mais surtout affaire personnelle. Membre d’une fratrie de cinq (trois frères, une sœur), Castellanos va retrouver au Chili son père, qui avait quitté le foyer sept ans auparavant. « Ce départ pour le Chili a été un puzzle que le football m’a permis de reconstituer. Grâce au football, j’ai pu retrouver mon père et me réconcilier avec lui. » Une histoire qui finit bien et le début d’une autre, plus grande encore. Devenu professionnel un an à peine après son arrivée à Santiago, mais évoluant principalement avec l’équipe réserve de la U, Castellanos ne tarde pas à séduire les scouts du Club Atlético Torque, écurie de Montevideo, fraîchement devenue succursale du City Football Group.
Pour aller où ?
En deuxième division uruguayenne, le séjour dure un an et demi, le temps de disputer 30 matchs et d’inscrire ses cinq premiers buts chez les grands. Le voilà donc destiné à une honorable carrière en Amérique du Sud. C’était compter sans le tentaculaire réseau de City. Plus au nord, à New York, Domènec Torrent, entraîneur du NYFC, bouffe en effet les cassettes de tous les jeunes qu’il pourrait potentiellement signer. Bras droit de Pep Guardiola au Barça ou au Bayern, Torrent tombe alors amoureux d’un Castellanos loin de toute cette agitation, et qu’il finit par enrôler à l’été 2018. Résultat : cinq saisons au sein d’une MLS devenue un véritable terrain de jeu (59 buts en 134 apparitions) et des clubs du Vieux Continent de plus en plus sensibles au talent de l’Albiceleste.
Ultime coup de bol pour « Taty », Manchester City n’est pas le seul point de chute européen de l’immense consortium émirati : Gérone est là aussi. La Catalogne lui ouvre alors les bras au mois de juillet dernier, lui permettant d’entamer son aventure au sommet dans un rôle de titulaire indiscutable (28 matchs disputés sur 31 possibles et 11 buts marqués en Liga). Et si ce quadruplé inscrit face au Real Madrid ne devait être que le début d’une longue et belle carrière, vous ne pourrez pas dire que l’on ne vous avait pas prévenus.
Par Adel Bentaha