- France
- Ligue 1
- Paris Saint-Germain
Carlo Ancelotti et son totem
Arrivé avec son CV de star et son aura exceptionnelle, Carlo Ancelotti voit sa belle réputation s'effriter semaine après semaine. Pour le moment, l'Italien est moins performant que son prédécesseur et, surtout, sa patte tactique n'est encore visible. Au contraire...
On a beau avoir gagné deux Ligues des Champions sur le banc, raflé des titres de champion en Italie et en Angleterre et avoir dirigé des Ballons d’Or, on peut laisser des plumes à Nancy et à Auxerre. C’est ce qui est en train d’arriver à Carlo Ancelotti, le coach du Paris-SG. Dimanche, le PSG de Don Carlo a concédé le match nul sur le terrain de la lanterne rouge, Auxerre (1-1). Un partage des points qui porte le sceau de la défaite, mine de rien. Sans parler du fait que le club de la capitale a raté l’occasion de revenir à la hauteur de Montpellier, le PSG a dégagé une impression de suffisance et, surtout, une incroyable incapacité à préserver un score. Pour une fois, la faute ne revient pas exclusivement aux joueurs. Carlo s’est raté. Tactiquement, on entend. Ses remplacements n’ont rien apporté. Pire, ils ont déstabilisé le bloc équipe. Déjà, l’entrée du fantôme de Pastore pour le remuant Gameiro était une première erreur. A la rigueur, on comprend la logique de vouloir injecter un mec capable de tenir le ballon. Soit. Mais l’injection de Lugano au profit de Bodmer, pour décaler Bisevac à droite et Jallet au milieu relève de l’étrangeté. Hasard ou coïncidence, le but icaunais est arrivé dans la foulée, et par ce côté.
Pourtant, l’ancien coach de l’AC Milan a d’abord fustigé ses joueurs en conférence de presse avant de penser à faire son auto-critique : « Je suis énervé contre les joueurs, je pense que nous devons changer d’attitude. Nous avons perdu une belle opportunité de prendre la tête du Championnat, je ne suis pas content. » On ne sait pas si le coach en veut autant à Nenê pour sa roulette russe ou à son propre coaching. Une chose est certaine, ce n’est pas la première fois que les choix de l’entraîneur font parler. A Nancy, déjà, sa volonté de se passer de Kevin Gameiro sur le synthétique de Marcel-Picot, alors que l’ancien Lorientais enfilait les caramels sur cette même surface à Lorient, avait fait jaser. On passera sur la sur-utilisation d’un Javier Pastore visiblement cramé et sur l’envie de toujours compter sur un Lugano qui a déjà la tête à Fenerbahçe, où il devrait vraisemblablement retourner en fin de saison. Le schéma en sapin de Noël que l’entraineur a voulu mettre en place ne produit pas l’effet escompté. Certes, Paris marque plus de buts. Mais sa défense est à la rue. Depuis la trêve, le PSG n’a réalisé que deux clean sheets en championnat, contre Nice et Brest. Et sur les neuf derniers matches, Sirigu a pris 15 caramels dans les ficelles. Un secteur défensif où le nouvel homme fort du PSG a pourtant été chercher Alex et Maxwell.
Une méconnaissance de la Ligue 1
Depuis trois mois et demi, Ancelotti tâtonne. Il n’a aucune certitude. Sa touche n’est pas visible. On le disait rigoureux, c’est pourtant le bordel sur le pré. L’équipe prend l’eau de partout au moindre changement de rythme. La défense centrale n’est même pas encore figée à six journées de la fin du championnat. A priori, le Transalpin espère terminer la saison avec la paire Alex-Bisevac. Sauf que celle-ci n’est pas encore rodée. Même si Sakho a été écarté, il faut persister dans ce choix. Une défense a besoin de temps. Au milieu, le dispositif en triangle avec Motta en sentinelle ne séduit pas. On dit de l’ancien de l’Inter qu’il est incontournable, expérimenté et précieux. Pour le moment, son vice et son bagout sautent plus aux yeux que tout le reste. Quant à l’attaque, les mecs jouent pour leur gueule. Dimanche, Nenê a préféré la jouer solo plutôt que de filer la galette à Gameiro. Ce n’est ni la première fois, ni la dernière fois que l’ancien Merlu est zappé par ses potes dans la surface de vérité.
On sait que le staff de l’Italien a beaucoup œuvré sur le travail en dehors des matches. Que ce soit au niveau de la discipline, de l’hygiène de vie et de la responsabilisation des joueurs. Là-dessus, le nouveau staff a changé beaucoup de choses. Or, ce n’est pas visible sur le pré. Ancelotti est-il en train de payer sa méconnaissance du championnat de France ? On pourrait le penser. Leonardo, lui, assure le contraire. Il y a peu, le Brésilien avançait dans L’Équipe que Don Carlo connaissait « toute la Ligue 1, jusqu’à la couleur de slip des adversaires » . Excusez-nous d’en douter. Arrivé en cours de route alors qu’il ne rêvait que d’Angleterre, Carlo fait tout par empirisme. Il a hérité d’un groupe qui est ce qu’il est. Il façonnera son effectif cet été, sans doute. Il lui faut du temps pour comprendre le championnat de France, sa rigueur, son physique, son homogénéité. Sauf que du temps, il n’en a pas. Les dirigeants franciliens ont fait le choix de l’Italien pour gagner des titres. A l’issue des matches aller sous la houlette d’Antoine Kombouaré, Paris comptait 40 points (2,10/match en moyenne) et trônait en tête avec trois longueurs d’avance. Mi-avril, il en dénombre 24 de plus (1,84 de moyenne). Le constat mathématique est terrible pour le nouveau coach. Et encore plus pour le board de QSI. Mais dans son malheur, Carlo peut s’appuyer sur un postulat que l’ancien locataire des lieux n’a jamais eu : la mansuétude des médias, du monde du football et des supporters à son égard. On appelle ça l’immunité. Jusqu’à quand ?
Par Mathieu Faure