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Cardinale : « J’ai cru en Dieu au moment où mon frère a été sauvé »

Propos recueillis par Nicolas Jucha, à Nice
Cardinale : « J’ai cru en Dieu au moment où mon frère a été sauvé »

Sous ses dessous de gardien de but jovial qui a tout le temps la banane, Yoan Cardinale a eu son lot de souffrance. Notamment durant l'enfance quand, à huit ans, il a dû grandir avec un petit frère malade de l'estomac et que les médecins estimaient condamné. Plus d'une décennie après, le Niçois raconte comment le calvaire de son frère l'a rendu plus fort.

Tu es parrain d’une association qui s’appelle le Point Rose (qui accompagne les parents d’enfants malades, ndlr). Tu es d’autant plus concerné que tu as grandi avec un petit frère, Mathieu (gardien de but en DH à Aubagne aujourd’hui ndlr) qui était gravement malade… Une malformation de naissance à l’estomac, très mal soignée par les premiers médecins qui l’ont suivi. Les traitements n’ont fait qu’empirer la situation, jusqu’à ce que les médecins disent à mes parents : « Il ne reste plus longtemps à vivre à votre fils, il est condamné. » Moi j’avais entre huit et dix ans, mon frère avait quatre-cinq ans…

Et finalement, vous rencontrez un médecin qui dit : « Je peux le sauver » … L’opération était très risquée, personne ne voulait le faire. On est tombé par hasard sur ce médecin qui nous a dit : « Appelez ma secrétaire maintenant, prenez rendez-vous, je vous garantis qu’à Noël, votre fils mangera du foie gras. » Ce médecin, aujourd’hui, c’est presque un membre de la famille. À chaque fois que l’on mange du foie gras à Noël, on pense à lui.

Grandir avec un petit frère ultra médicalisé…(Il coupe) Il a raté toute la scolarité de la maternelle, le cursus d’un enfant normal c’est trois ans, lui il a manqué quasiment les trois années. Plus l’année de CP. Il était tout le temps à l’hôpital. Moi, j’ai suivi le cursus normal, mais j’allais souvent le voir à l’hôpital et je n’avais donc pas toujours la tête à l’école. Je ne souhaite à personne de vivre ça. J’ai connu des choses que je n’aurais peut être pas dû, mais Dieu merci, mon petit frère est sorti d’affaire et tout cela m’a fait progresser dans le monde du foot.

Dans quel sens ?Dans le mental. Mentalement, j’ai su passer des épreuves au centre de formation et chez les pros que je n’aurais jamais réussi à passer sans cette épreuve-là. Une défaite, c’est grave, mais on relativise. Quand on se blesse, c’est pareil, on va maronner, pleurer pendant deux jours, mais après, on se dit : « J’ai vécu plus grave, cela va se guérir, c’est le foot qui veut ça. »

Tu as choisi de parrainer le Point Rose parce qu’à l’époque où ton frère était malade, vous vous étiez sentis délaissés ? Je ne suis pas papa, donc je ne peux pas savoir ce que cela fait d’avoir un enfant malade, mais j’imagine que c’est la pire chose au monde de voir son enfant partir avant soi. J’ai vu mes parents dans des états indescriptibles, c’était vraiment horrible. À l’hôpital, personne ne se souciait vraiment d’eux. Quand on leur a dit : « Votre enfant va mourir » , c’était du genre : « Ok, lui va mourir, donc on s’occupe du suivant à côté. » Cela manquait de soutien psychologique, rien du tout. Donc cela me tient à cœur de soutenir une association qui vient en aide aux familles. Elle ne prépare pas l’après, mais elle essaie de vous suivre avant, et de vous soutenir après. C’est important.

Mais à neuf-dix ans, on n’est pas bête, on voit son frère tous les jours à l’hôpital, on voit qu’il a des tuyaux dans le nez, partout, c’est un vrai bordel. On est conscient de ce qu’il se passe.

Comment tu as été amené à connaître l’association ?C’est l’OGC Nice qui m’a mis en relation avec la présidente de l’association, Nathalie. Ils avaient connaissance de mon passé, ils ont eu raison de penser que cela pouvait m’intéresser, car quand elle m’a contacté, j’ai dit oui tout de suite. La petite fille de Nathalie, c’est une histoire très triste, car elle est décédée. C’est remarquable que ses parents aient su se relever et créer ce type d’association. Il faut des gens comme eux pour avancer dans la vie. Je pense que Nathalie fait partie des gens qui ont énormément de mérite, car elle a vu son enfant partir, et son quotidien aujourd’hui c’est de soutenir d’autres personnes qui perdent leurs enfants et leurs proches. Elle se confronte chaque jour à son pire souvenir et se bat contre lui.

Quand tu as appris que ton frère allait « mourir » , ton univers a dû s’écrouler ? Mes parents ne m’ont jamais dit les choses comme ça. Mais à neuf-dix ans, on n’est pas bête, on voit son frère tous les jours à l’hôpital, on voit qu’il a des tuyaux dans le nez, partout, c’est un vrai bordel. On est conscient de ce qu’il se passe. Je ne savais pas qu’il « allait mourir » , mais je savais que sa vie était en danger. Mais pour me protéger, mes parents ne m’ont jamais dit : « Ton frère va mourir » , parce que sinon, je pense que j’aurais pu partir en cacahuète.

Comment tes parents faisaient pour maintenir un semblant de bien-être, histoire que tu grandisses plus ou moins bien ?C’était vraiment dur. Ma mère pleurait souvent, mon père se cachait beaucoup plus. On n’habitait pas dans une très grande maison – à la Ciotat – donc je l’entendais pleurer. Mais je ne l’ai jamais vu pleurer. Jamais devant moi, mais je l’entendais. Cela m’a laissé des traces. Cela m’arrive de me réveiller en pleine nuit, de faire des cauchemars. Je me réveille en transe (sic), j’y repense.

Durant cette période où ton frère était hospitalisé, ce n’est pas le seul enfant que tu as vu dans ces conditions…Il y en avait beaucoup, certains qui s’en sont sortis comme mon petit frère, et d’autres, malheureusement, qui y sont restés.

Avec tout ce que vous avez vécu, la relation avec ton frère doit être vraiment forte, vous vous engueulez quand même de temps en temps ?On s’engueule, on se bat souvent. C’est l’amour entre nous, très fusionnel. Il vient me voir à quasiment tous les matchs, dès que je peux, je vais le voir aussi à Aubagne. On s’appelle tout le temps, on est vraiment fusionnels. Il est gardien, comme moi, ça a dû le motiver de me copier.

C’est clairement au moment où mon frère a été sauvé que j’ai cru en Dieu, que je lui ai dit merci.

Toute cette expérience avec ton frère, cela a influencé le gardien de but que tu es devenu aujourd’hui ? Un joueur qui prend des risques parce que, finalement, il y a plus grave qu’une boulette ?(Pas totalement convaincu) Ouais… Il y a des choses qui ne méritent pas de se prendre la tête. Mais sur un terrain, je ne sais pas si cette expérience m’aide. Cela me rend plus fort mentalement, mais je ne crois pas que cela me pousse à prendre des risques dans le jeu. C’est plus lié à la philosophie de jeu de Nice, cela me met dans des situations où je dois prendre des risques. C’est la particularité du poste de gardien que j’aime bien. J’aime cette adrénaline quand il faut faire un crochet, que l’attaquant arrive… J’aime prendre des risques dans la vie.

Justement, que ressens-tu quand un attaquant vient au pressing et que tu dois faire un crochet ?Le cœur s’arrête de battre cinq ou six secondes, enfin c’est l’impression que cela me donne. Je ne pense à rien du tout, dès que l’attaquant est passé et que je fais la passe, hop, tout repart.

Un dernier mot sur l’histoire de ton frère qui s’est terminée en happy end. Si tu avais un conseil à donner à des familles touchées par ce type de drame ?Ne jamais lâcher. On est tombés par hasard – ou le biais de Dieu, je ne sais pas – sur le médecin qui a sauvé mon frère. L’endroit où on l’a rencontré, c’est impossible normalement. C’était un repas de fin d’année avec l’équipe de foot où je jouais, les équipes de jeunes de l’OM. D’habitude, mon père arrive toujours en retard, quinze fois sur seize. Et cette fois-là, on avait quinze minutes d’avance. On arrive à la plage, il y avait déjà un joueur avec son père. On dit bonjour, le père était accompagné par un autre homme. Et voilà, c’était le médecin qui allait sauver mon frère. Il n’était jamais à Marseille d’habitude, il travaillait dans plusieurs grandes villes, il était là car il connaissait bien le père de cet autre enfant. Si on était arrivé quatre ou cinq minutes après, cet homme serait peut-être parti. Et mon frère aussi.

C’est pour cela que vous êtes croyants dans la famille ? Ouais. J’avais huit ans à l’époque, donc difficile de dire que j’étais croyant, mais c’est clairement au moment où mon frère a été sauvé que j’ai cru en Dieu, que je lui ai dit merci.

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Propos recueillis par Nicolas Jucha, à Nice

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