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Caoimhín Kelleher, ça commence
C’est bien connu, quand le chat n'est pas là, les souris dansent. Et à ce jeu-là, c’est Caoimhín Kelleher qui fait le show à Liverpool, chaque fois qu’Alisson n’est pas de la partie. Bourreau de Leicester en quarts de finale de la Carabao Cup cette saison, récemment décisif contre Chelsea, le jeune portier irlandais surprend son monde à chaque apparition sous la tunique rouge. Et pourtant, Kelleher n’était pas destiné à camper devant sa ligne. Retour sur les débuts d’un portier très prometteur, voué à réussir en véritable numéro 9.
« Je me rappelle ce soir-là. J’étais crispé et très nerveux », se souvient Eddie Harrington, invité spécial du troisième tour de la Carabao Cup le 25 septembre 2019, alors que la petite équipe de Milton Keynes Dons reçoit l’ogre Liverpool. Si Eddie a décidé de traverser les 770 kilomètres qui séparent la ville portuaire irlandaise de Cork et la région du Buckinghamshire, c’est pour voir son petit protégé : Caoimhín Kelleher. Lors de ce fameux seizième de finale à MK Dons, les joueurs de Liverpool sont étonnamment malmenés, et les coéquipiers d’Adam Lallana vont ni plus ni moins s’en remettre à leur gardien. Titulaire pour la première fois sous les ordres de Jürgen Klopp, Kelleher va enchaîner les parades et permettre aux Reds de garder leur cage inviolée. Victoire 2-0 ponctuée donc d’un petit exploit pour un jeune portier.
Pendant que le reste du monde découvre un gardien confiant et plein d’assurance en cette douce soirée d’automne, Eddie Harrington a du mal à croire que son ancien poulain défend désormais la ligne d’une des écuries les plus prestigieuses du royaume de la reine Élisabeth II. « À Cork, il n’y a personne qui s’y habitue vraiment », lance celui qui l’a connu quand Caoimhín (prononcer Kwivine) portait encore les couleurs des Ringmahon Rangers. Et pour cause, huit ans plus tôt, sa jeune pousse avait plus l’ambition de pousser le ballon au fond des filets que de l’empêcher d’y rentrer. « Il était dans le gratin des meilleurs joueurs de la Kennedy Cup(un tournoi très réputé en Irlande où les 32 meilleurs équipes U14 des écoles s’affrontent, NDLR), mais en tant qu’attaquant. Et je peux vous dire qu’il était très bon, avait confié Harrington au quotidien sportif irlandais Pundit Arena. Si bon qu’il est même devenu l’un des meilleurs buteurs de ce tournoi. Il plantait but sur but. »
Un buteur en cage
S’il était déjà destiné à quitter l’île de la Lee qui relie le port Cork Harbour à la mer, pour rejoindre les plus grosses équipes du pays, ce n’est pourtant pas en tant que striker qu’il le fera. « L’année suivante, notre gardien nous a lâchés, à seulement quelques jours du début de la nouvelle édition de la Kennedy Cup », reprend Eddie, un chouia mauvaise langue pour le coup. Le gardien habituel était alors surclassé, et avait simplement préféré retrouver sa catégorie avant de partager le terrain avec les plus grands. « C’est alors que Ray, le père de Caoimhín Kelleher, m’a appelé un soir, et m’a dit :« Qu’en pensez-vous si on met Caoimhín dans le but ? » » Perplexe dans un premier temps, Eddie a finalement été convaincu par le paternel de Caoimhín, qui assurait que son rejeton voulait aider son équipe en enfilant les gants. « Oui, ça lui arrivait d’aller dans les buts à la fin des entraînements, mais à son visage, on pouvait voir que ce n’était jamais vraiment sérieux, témoigne Harrington. Ray a insisté et je l’ai lancé. »
Quand Caoimhín s’installe entre les perches lors de la compétition, Eddie appréhende toujours de voir son garçon jouer à ce nouveau poste : « Il faut savoir que quand vous faites partie des meilleurs joueurs de la Kennedy Cup, cela signifie que vous êtes déjà l’un des joueurs les plus prometteurs du pays. » Il ne va pas falloir beaucoup de temps à l’entraîneur irlandais pour se rendre compte qu’il fait bien de sacrifier son plus grand atout offensif. Pour son premier match, Kelleher « a été brillant », confie Eddie avant d’assurer qu’il n’a fallu que quelques mois à Caoimhín pour s’adapter à sa nouvelle position. Si bien qu’il est devenu l’un des meilleurs joueurs de la Kennedy Cup de Cork, mais cette fois-ci, avec les mains gantées. « À partir de ce jour, il a tout le temps joué dans les buts. Après ça, tout est allé si vite. On l’a envoyé à l’essai à Aston Villa, et puis Liverpool est rapidement arrivé. » Pour clore ce chapitre, pour son dernier match avec les Ringmahon Rangers, Kelleher offre le titre du championnat U17 à son équipe en marquant un but dans les dernières secondes.
Le grand huit d’Octopus
Autant dire que le coup de casque d’Alisson sur la pelouse de West Bromwich un certain mois de mai 2021 a dû lui rappeler de bons souvenirs. Doublure du Brésilien depuis deux ans, Kelleher continue d’apprendre les arcanes de son poste et progresse à vitesse grand V dans le sillage de Becker. « Ma progression est due au simple fait de travailler avec lui, de l’observer et de longuement échanger », avait affirmé le n°62 au micro du club. Après une petite saison dans le rétro de Simon Mignolet et donc contraint de performer avec les U23, puis un temps en concurrence avec l’Espagnol Adrian, Kelleher remplit désormais son contrat à chaque fois qu’il remplace Alisson dans les rangs de Jürgen Klopp. Si bien qu’il pourrait vite doubler Gavin Bazunu dans la hiérarchie en sélection irlandaise et prétendre à une place de titulaire avec les hommes en vert. Et puis, au vu du passif du garçon, le tacticien allemand sait désormais qu’ « Octopus » , le surnom de Kelleher dans les rangs de Liverpool, peut éventuellement pallier les absences de Mohamed Salah et Sadio Mané pendant la CAN.
Par Matthieu Darbas
Propos d’Eddie Harrington recueillis par Pundit Arena et Football Daily.