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Cannes I kick it ?
Yes you Cannes ! Menacée d'être reléguée administrativement dans les profondeurs des divisions amateurs, voire même de disparaître, l'AS Cannes a été autorisée in extremis par la DNCG à être maintenue en CFA la saison prochaine. Une bonne nouvelle pour tous ses supporters, à commencer par Franck Priou, son buteur lors de la dernière période faste du club azuréen.
En mai dernier, tout le monde n’était pas à la fête sur la Croisette. En marge du 66e Festival de Cannes, les fans de l’Association sportive de Cannes faisaient même grise mine. La montée en National ratée au profit de Colomiers, ils apprenaient que Saïd Fakhri, le mécène franco-sénégalo-libanais du club depuis 2009, rechignait à mettre une fois de plus la main à la poche pour combler le déficit de 1,2 million d’euros. Une réticence qui menace alors le club d’un dépôt de bilan et enverrait le club en DHR, la 7e division nationale. L’incertitude a plané jusqu’au 22 juin et la publication d’un communiqué assurant que « le propriétaire a décidé de poursuivre l’activité et d’assurer sa pérennité. » C’est ainsi que le 24 juin, Saïd Fakhri a présenté à la DNCG un budget aux comptes assainis pour la saison à venir, bien aidé en cela par une enveloppe de 800 000 euros de subvention de la municipalité. « Sous encadrement de sa masse salariale » , comme le veut la formule consacrée de la DNCG, le club survivra donc une année de plus. Mais qu’elles sont loin, les années où Madar, Durix, Vieira, Zidane, Koot ou Priou enflammaient la Bocca avec leurs maillots floqués Casino Palm Beach.
Coupe d’Europe et zozos sur la Croisette
« Ce que ce club m’a donné, aucun autre ne l’a fait. Et le voir dans cet état, cela me fait mal au cœur. » Sans club depuis un an, Franck Priou, désormais entraîneur, ne cache pas son désarroi devant la situation de son club de cœur. Une situation qui n’a rien à voir avec celle qu’il a connue lorsqu’il a débarqué sur la Croisette en provenance de Sochaux, en 1991. Fort d’une quatrième place obtenue lors de l’exercice précédent, le club entraîné par Boro Primorac découvre la Coupe d’Europe pour la première fois de son histoire. Lourdement outillé, avec dans ses rangs Bokšić, Asanović, Zo. Vujović, Omam-Biyik, Langers, Durix, Zidane, Fernandez et donc Priou, le club trouve pourtant le moyen de finir 19e en championnat, après s’être fait éliminer en 16e de finale de la C3 par le Dynamo Moscou. Un coup d’assommoir presque bénéfique, à en croire Priou : « Cela a fait comprendre aux dirigeants que ce n’est pas forcément en faisant venir des stars à des prix exorbitants qu’on construit une bonne équipe. À Cannes, il y a la mer, le soleil, la fête, donc tous les joueurs veulent venir, mais certains se trompent d’objectif en pensant plus à faire les zozos sur la Croisette qu’à jouer au foot. » De l’aventure européenne, il retient les déplacements à Porto et Moscou, « des voyages qui m’ont permis de découvrir d’autres cultures, d’autres stades, des supporters qui vivent leur passion du football différemment. » Que des bons souvenirs, en somme. Même si, à l’époque, il ne sait pas que les meilleurs sont à venir.
Hampartzoumian, coach Luis et nez cassé
En D2, le club repart sans ses stars, dont Zidane, parti à Bordeaux. « On savait qu’il deviendrait un très grand joueur, même si c’est facile à dire après coup. À l’époque, il ne lui manquait que le physique, la technique était déjà là » , assure aujourd’hui Priou. Sur la pelouse, Madar, Hampartzoumian, Sauvaget, le jeune Micoud et le vétéran Ayache ont remplacé les vedettes qui ont fait descendre le club. Après des débuts difficiles sous les ordres d’Erick Mombaerts, tout change avec l’arrivée sur le banc de Luis Fernandez. L’ancien international, dont c’est la première expérience d’entraîneur, trouve les mots pour galvaniser son équipe. « Il a instauré une ambiance incroyable, confirme Priou. C’est ce qui nous a permis de faire cette seconde partie de saison exceptionnelle et d’accrocher les barrages pour monter en D1. » Des barrages disputés face à Valenciennes, dont le match aller dans le Nord constitue le meilleur souvenir cannois de Priou. « Je me casse le nez en marquant. En gagnant 2-0 là-bas, on savait qu’on avait 90% de chances de monter en D1. Je suis allé sur la table d’opération avec bonheur » , raconte-t-il de la nostalgie plein la bouche.
« Si Luis n’était pas parti à Paris, moi et d’autres serions restés »
S’ensuivent deux belles saisons en première division, lors desquelles l’AS Cannes termine 6e en 1994 et 9e en 1995. La première sous les ordres de Luis Fernandez, la seconde sous la houlette de Safet Sušić, qui a remplacé l’artisan de la remontée, parti danser devant le banc du PSG. Le début de la fin, selon Priou. « Je suis parti à Saint-Étienne, Franck Durix est parti au Japon, Vieira au Milan AC. Si Luis n’était pas parti à Paris, moi et d’autres serions restés, regrette-t-il, amer. Mais là, le groupe a explosé. On est passé d’un entraîneur expansif à Sušić qui ne disait rien, c’était dur. » Après trois saisons à lutter pour son maintien, l’AS Cannes retrouve la Ligue 2 en 1998 et entame sa terrible chute. Rétrogradation en National en 2001, perte du statut pro en 2004, fermeture du centre de formation en 2006, rétrogradation administrative en CFA en 2011 qui la mène aux atermoiements de ces derniers jours. Malgré les difficultés, le club, qui repartira avec Jean-Marc Pilorget sur son banc, sait qu’en cas de coup dur, il pourra toujours compter sur Franck Priou. « S’ils me sollicitent, j’ai toujours dit haut et fort que je viendrais à pied pour entraîner l’AS Cannes. » Avec Mickaël Madar comme adjoint ?
Par Mathias Edwards