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La RDC à tous les étages
Opposée à la Côte d'Ivoire mercredi soir (21h), la République démocratique du Congo vise une première finale continentale en 50 ans. Les Léopards sont en passe d'éclipser (temporairement) les sapeurs, et ce n'est pas une mince affaire. Allez, il est encore temps de monter dans le train.
→ Le retour en force d’un géant du continent
La République démocratique du Congo avait raté le tournoi en 2022, privée du sésame par la Gambie et le Gabon lors des éliminatoires. Elle revient par la grande porte : sortie de son groupe avec trois nuls (esprit du Portugal 2016, es-tu là ?), elle a tenu tête au Maroc (1-1), a évincé l’Egypte en huitièmes de finale (8-7 aux tirs au but) et a fait sauter la grille du dernier carré en punissant la Guinée (3-1). La performance mérite d’être soulignée : depuis le sacre de 1974, le pays qui s’appelait autrefois le Zaïre (de 1971 à 1997, NDLR) ne s’était hissé en demi-finales qu’en 1998 et 2015. Il y a neuf ans, justement, la bande de Dieumerci Mbokani s’était cassé les dents sur… la Côte d’Ivoire, futur vainqueur du tournoi. La vengeance est un plat qui se mange froid, et elle a eu assez de temps pour refroidir.
→ Sébastien Desabre, au bon souvenir des Chamois
Sébastien Desabre a choqué Niort en laissant les Chamois en plein milieu de la pente descendante, au mois d’août 2022, après deux journées de championnat. Un an et demi plus tard, son pari est déjà réussi. Fin connaisseur du foot africain pour avoir entraîné en Côte d’Ivoire, au Cameroun, en Tunisie, en Angola, en Algérie ou encore en Ouganda, il a récupéré la RDC alors qu’elle avait perdu ses deux premières rencontres dans le groupe I des éliminatoires de la CAN. « Quand j’ai signé, on était plus dans l’optique de se servir de ces matchs de qualification pour préparer la CAN 2025 », glissait-il à RMC. Mais les Léopards ont sorti les griffes et obtenu avec autorité leur ticket pour la Côte d’Ivoire. « J’étais content qu’on se qualifie, déjà parce que je savais que j’allais avoir les joueurs au moins trois ou quatre semaines, ce qui me permettait, pour mon projet de jeu et pour le futur, de pouvoir travailler. » Avec seulement quatre trentenaires dans son groupe, Desabre voit plus loin. La Coupe du monde 2026, forcément. Mais puisque les fruits mûrissent plus vite que prévu, autant passer tout de suite à table.
FIMBU NA FIMBU 🇨🇩🔥 pic.twitter.com/kClPusozg5
— Arthur Masuaku (@ArthurMasuaku) February 2, 2024
→ Lionel Mpasi, le sauveur revient de loin
Lionel Mpasi a démarré la CAN avec dix petites sélections au compteur et aucune once d’expérience d’un grand tournoi international. Et alors ? Le portier de Rodez n’a encaissé que quatre buts en cinq matchs. Il peut même se targuer d’avoir inscrit le tir au but de la victoire contre l’Égypte. Inimaginable pour celui qui, après avoir connu le centre de formation du PSG et le TFC, s’était retrouvé sans club en 2015-2016. Pistonné par Teddy Richert, il s’est maintenu en forme à Toulouse, avant de signer au RAF, loin du monde professionnel. Remplaçant en CFA, en National et en Ligue 2, il ne gagne véritablement sa place de titulaire qu’en 2021, et débarque en sélection quelques mois plus tard. « J’avais un pote, Papis Dembélé, qui connaissait bien Cédric Bakambu, raconte Mpasi à 90Football. Il me dit : “Cédric veut entrer en contact avec toi. Je peux lui passer ton numéro ?” Dès que j’ai entendu son blase, j’étais choqué ! Il m’envoie un message sur WhatsApp, m’explique le projet, me demande si j’ai envie de venir en sélection. Moi, je suis là, je fonce ! Il me dit : “Ok, on va voir pour que tu viennes faire les formalités. En septembre, tu devrais être appelé.” C’est ce qui s’est passé. » Merci pour la passe dé.
→ Une mission qui dépasse les terrains de foot
Gangrené par les violences depuis les années 1990, l’est de la RDC a replongé dans le chaos avec la résurgence du M23 il y a deux ans. Les combats continuent en ce moment entre les rebelles et l’armée dans la région de Goma. Cédric Bakambu et ses coéquipiers souhaitent se servir de la lumière de la CAN pour sensibiliser l’opinion. « Tout le monde voit les massacres à l’est du Congo. Mais tout le monde se tait. Mettez la même énergie que vous mettez pour parler de la CAN pour mettre en avant ce qu’il se passe chez nous, il n’y a pas de petits gestes », implorait l’attaquant du Betis sur ses réseaux sociaux. L’équipe nationale a apporté son soutien à la campagne « Plus jamais seuls ! » pour soutenir les victimes et les survivants des atrocités commises dans le pays. Des ONG comme Human Righs Watch ont rapporté « des exécutions illégales, des viols et d’autres crimes de guerre manifestes » en marge des affrontements. « À notre niveau, on essaye d’être le meilleur possible pour donner le maximum de joie à ces gens, les rendre fiers, […] les aider à être heureux », commentait le sélectionneur. Les Léopards porteront un brassard noir mercredi en hommage aux victimes des derniers jours.
🇨🇩 Tout le monde voit les massacres à l'Est du Congo. Mais tout le monde se tait.
Mettez la même énergie que vous mettez pour parler de la CAN pour mettre en avant ce qu'il se passe chez nous, il n'y a pas de petits gestes. pic.twitter.com/PUZCavuckC
— Cédric Bakambu (@Bakambu17) February 5, 2024
→ Le made in France à l’honneur
L’apiculteur Arnaud Montebourg n’a pas le monopole de la promotion du « fabriqué en France ». La sélection de Sébastien Desabre est à elle seule une magnifique publicité pour la Ligue des talents. Avant de devenir Léopard, Gédéon Kalulu a été biberonné par Lyon et Cédric Bakambu par les Lionceaux de Sochaux. Aujourd’hui à Saint-Étienne, Dylan Batubinsika a suivi sa formation au PSG. Simon Banza a éclos à Lens et Arthur Masuaku à Valenciennes. Yoane Wissa est sorti de Châteauroux, avant d’exploser à Lorient en 2019. Ajoutez-y le Nantais Samuel Moutoussamy, l’Amiénois Gaël Kakuta ou le Marseillais Chancel Mbemba, et vous obtiendrez une magnifique campagne pour vanter le savoir-faire français, reconnu à l’étranger. HexaGOAT !
Par Quentin Ballue