C1 – Bayern, Grosse Rigolade

A peine quatre mois, et l’année 2009 nous en envoie déjà de toutes les couleurs. Sans hiérarchie : l’Argentine qui s’en prend six en Bolivie, le PSG qui ne pique pas de crise, le Genoa qui regarde enfin vers l’avenir, Manchester United qui perd des matches, l’OM en course pour gagner quelque chose, Domenech toujours sélectionneur de l’Équipe de France. Et le plus beau pour la fin : le Bayern Munich est devenu l’équipe la plus romantique d’Europe. Ça, c’est vraiment la grosse cote.

Ceux qui ont plus de dix ans le savent bien : le Bayern, en football, c’est un genre de diable réincarné. Une équipe façon Juventus en pire : jamais séduisante, jamais sympathique, jamais battue, et pour finir souvent gagnante. Des mecs en blanc et rouge qui trustent les titres domestiques immérités et les buteurs sales (Carsten Jancker quelqu’un ?) et qui se poussent de temps en temps d’une coupe d’Europe. Eh bien, tout cela est fini. Aujourd’hui, on se rue tous pour voir le Bayern. Avec, à chaque fois, ces quatre interrogations au bout des lèvres : combien ces quiches vont-ils s’en prendre ? Et combien vont-ils en marquer ? Vont-ils couler façon Titanic ? Ou bien s’en sortir par l’énergie du désespoir ? Autant de bonnes raisons de se coller au poste.

En fait, il y a quelque chose du Real Madrid période Galactiques dans cette équipe – mais sans les Galactiques. Quelques chiffres récents, pour s’en convaincre : ce week-end, les potos de Ribéry ont croqué l’Eintracht Francfort 4-0 (il y avait déjà 3-0 au bout d’une demi-heure) ; la semaine passée, ils avaient collecté un 0-4 au Barça (deux buts pris en dix minutes) et un 1-5 à Wolfsburg (quatre pions encaissés entre la 64ème et la 77ème). Avant cela, les Bavarois s’étaient amusés avec le Sporting Lisbonne en huitièmes de finale, 5-0 à l’aller et 7-1 au retour. Et passé un petit 5-1 à Hanovre, comme ça, pour s’amuser.

Pourquoi le Real galactico ? D’abord parce que derrière, le Bayern Munich est une offense au football moderne. Qu’ils s’appellent Lucio, Van Buyten, Demichelis ou Breno, les centraux sont lourds, absents, ou en méforme. Tous ont néanmoins ce point commun : en face-à-face avec les attaquants adverses, ils semblent avoir mille ans. Les latéraux, eux, passent leur temps à rater la balle puis à se retourner pour voir l’adversaire partir dans leur dos. Surtout Oddo et Lell, qui n’en finissent plus de porter leur croix. Ensuite parce que devant, tout peut se passer, à tout moment. Ribéry qui déboule de partout et tabasse tout ce qui passe, Ze Roberto qui crée des décalages quand on ne s’y attend pas, Schweinsteiger qui passe en force, Toni et Klose qui sautent et font boum de la tête.

Aussi, parce que comme toute équipe en crise, le Bayern compte dans ses rangs un gars capable de trancher la gorge du joueur adverse si les événements lui semblent contraires : il s’appelle Van Bommel, et vous le connaissez déjà. Et enfin, parce que le spectacle se passe aussi souvent sur le banc, où cool Klinsmann passe sa vie à se prendre le visage entre les mains et le gros Hoeness souffle tout ce qu’il sait.

Qu’ils laissent passer le Barça, qu’ils perdent le titre sur le fil et cette histoire finira comme elle doit finir : des départs en pagaille des éléments romantiques (Ribéry en Espagne, Toni au Milan, Van Bommel en prison, Klinsmann en Californie) et une normalisation. Alors, seulement alors, le Bayern gagnera la Ligue des Champions en 2014. Et ce sera aux tirs au but.