C.Seedorf : « L’envie de gagner et juste de gagner »

Si vous perdez le derby, Milan sera définitivement hors course pour le titre ? Perdre n’est pas une option et ne fait pas partie de nos plans. Nous irons au combat avec l’envie de gagner et juste de gagner. Il ne nous manque rien pour réussir. On est bien, malgré le dernier match nul en championnat.

Quel a été le plus beau derby ? J’aimerais bien que ce match soit un choc spectaculaire et que le résultat n’ait pas beaucoup d’importance mais c’est impossible. Je me rappelle d’un derby en demi-finale de Champion’s League en 2003, 0-0 et 1-1 (Ndr, le Milan s’était qualifié grâce au but à “l’extérieur”). Ce n’était pas un match spectaculaire mais il y avait une ambiance de fête. J’espère que ce sera à nouveau le cas cette fois.

D’autant que c’est peut-être le dernier derby de Paolo Maldini… Excuse-moi, mais es-tu vraiment sûr que ce soit le dernier ? Moi, je n’en suis pas convaincu. Je ne pense pas comme toi. De toute façon, ces matchs-là comptent vraiment pour Paolo, il faut le gagner pour lui.

Et puis c’est sans doute un de tes derniers derbys aussi. Au cours de ta belle carrière, tu as joué avec l’Ajax, le Real et le Milan, trois grandes écoles de foot. Peux-tu nous expliquer les différences ? La manière de jouer hollandaise est très particulière, très offensive. Il s’agit de défendre très haut, pour mettre la pression sur l’équipe adverse, directement. Et beaucoup de possession de balle. En Espagne, c’est plutôt une combinaison du jeu hollandais et euh, ben du jeu espagnol.

Donc le jeu espagnol serait une combinaison du jeu hollandais et du jeu espagnol ? (Rires) Oui, bon. En tout cas, je ne pense pas qu’ils aient beaucoup à voir avec le football italien. Le jeu espagnol, c’est la ‘furiore’. Non, la fufufu…

La furia ? Oui voila, c’est ça. La ‘Furia’. Enfin bref ils savent jouer au football (rires). Le style italien, lui, est basé sur la recherche du résultat. Avec du jeu dans l’axe et la recherche du chemin le plus rapide vers les buts. Le jeu est plus tactique et plus physique. C’est vraiment intéressant.

Et quelles sont les similarités entre ces trois de styles de jeu ? Maintenant je vais te parler spécifiquement de l’Italie. Milan en particulier, qui mélange les bons cotés du foot espagnol et du hollandais avec la tactique italienne.

En tout cas, pas de football anglais dans ce mélange ? Tu n’es pas allé jouer là-bas parce que ça allait trop vite pour toi ? Tu sais ma carrière n’est pas encore terminée… (Rires)

A tes débuts à l’Ajax tu avais dit : « J’aime l’Ajax mais je pense partir dans quatre ou cinq ans, en Espagne ou en Angleterre. Je finirai sûrement ma carrière en Italie, le Championnat le plus tactique. J’aime ce championnat depuis l’aventure de Gullit et Rijkaard au Milan AC » .
 Bref, tu avais déjà tout compris… Ah oui je me rappelle, j’étais vraiment jeune quand j’ai dit ça. C’était un rêve, les gens doivent avoir des rêves… Je devais avoir 16 ans, parce que Rijkaard et Van Basten jouaient encore pour le Milan. Ça me faisait rêver. J’ai aussi dit que je voulais jouer à Madrid, parce qu’il y avait Leo Beenhakker et ça aussi ça me faisait rêver. C’étaient les matchs que je voyais en Hollande, quand j’étais encore à l’Ajax.

De quoi rêves-tu encore ? En sport, tu rêves chaque année de faire de ton mieux. Donc le football te permet le luxe de rêver chaque saison.

Est-ce que tu peux encore faire mieux ? Je peux toujours améliorer mes capacités tactiques, en observant d’autres joueurs ou en regardant des matchs, mais les capacités techniques, c’est pas tout à fait pareil. Il y a des figures que toi tu peux faire mais que moi, je ne peux pas faire mais je peux toujours améliorer un peu plus mon contrôle de balle et travailler ma technique en fonction de ce que je sais faire. Il faut toujours améliorer ce qu’on sait déjà faire mais aussi travailler ses points faibles. Quel que soit son niveau ou son expérience, on peut toujours s’améliorer.

Tu dis qu’on peut toujours s’améliorer mais tu passes plutôt pour un mec bourré de confiance en lui, voire orgueilleux… Il y a des choses qu’on ne peut comprendre que si l’on est soi-même au sein d’une équipe. Les gens ne peuvent juger qu’avec ce qu’ils voient sur le terrain. Mais il y a aussi d’autres facteurs importants qui peuvent expliquer la présence de quelqu’un dans une équipe, il n’y a pas que les aspects techniques. Ronald Koeman n’était pas rapide, n’avait pas plus de capacités que cela, mais avait une mentalité à toute épreuve qu’il savait transmettre à son équipe. Et quand il n’était pas à son meilleur, le coach le mettait toujours dans l’équipe, parce qu’il savait faire cela même dans les moments les plus difficiles.

Ok, mais toi, tu passes tout de même pour un type orgueilleux. J’ai confiance en moi, en mes capacités. Et j’essaie de transmettre cette confiance à mes coéquipiers. Quand un membre de l’équipe est en difficulté, cette confiance peut l’aider à se sentir plus confortable. Parce que tout le monde peut être moins bien, mais quand tu veux être un champion, il faut aussi prendre ses responsabilités quand on n’est pas au mieux.

Propos recueillis par JPS & SCW, à Milanello