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Bundesliga : 50 ans, 50 histoires (10 à 18)

Par Ali Farhat
10 minutes
Bundesliga : 50 ans, 50 histoires (10 à 18)

Le 24 août 2013, la Bundesliga a « officiellement » soufflé ses cinquante bougies. Pour l'occasion, voici cinquante histoires, petites et grandes, qui ont fait la légende de ce championnat situé outre-Rhin. À déguster avec une bonne bière bien fraîche, bien sûr.

Le Bayern, ce Rekordmeister

Avec 22 titres sur 50 dans l’actuelle formule de la Bundesliga (23 au total), le Bayern Munich est ce que l’on peut appeler un monstre. Le titre de « Rekordmeister » est ainsi justifié. Mais il y a aussi des tas d’autres catégories dans lesquelles les Bavarois se sont illustrés. Notamment l’année dernière. Au terme d’une saison 12/13 incroyable, le Bayern est devenu l’équipe qui a remporté le plus de victoires sur un exercice (29), concédé le moins de défaites (1), concédé le moins de buts (18) et affichant le plus grand nombre de points au compteur (91). De ces records en découlent d’autres, comme celui du titre le plus précoce du championnat (dès la 28e journée), de la plus grande présence en tête du championnat (de la 1re à la 34e journée), de la plus longue série de victoires de rang (14), le plus grand nombre de victoires sans prendre de buts (21) et de la plus grosse différence avec le vice-champion (25 points devant Dortmund). Des stats gargantuesques, qui feraient presque oublier qu’en dépit de tous ces records, les hommes de Jupp Heynckes n’ont pas réussi à améliorer le nombre de buts sur une saison : 101 pions lors de la saison 71/72, un record déjà détenu par… le Bayern Munich. Tout simplement dingue.

Rausch a mal, nom d’un chien

Jadis, il n’y avait aucune haine dans le derby de la Ruhr entre le FC Schalke 04 et le Borussia Dortmund. Pour preuve, lorsque Schalke a remporté son 7e titre champion à Hanovre en 1958 (le dernier en date), le train qui redescendait en direction de Gelsenkirchen a dû s’arrêter de force à Dortmund, parce que les habitants souhaitaient communier avec les Königsblauen et les féliciter d’avoir ramené un nouveau titre dans le bassin minier. Mais avec la création de la Bundesliga en 1963, la donne a petit à petit changé. Désormais, il fallait asseoir sa domination sur le « Ruhrpott » . Et les derbys se sont lentement chargés d’animosité. Friedel Rausch ne peut pas en dire autrement. Le défenseur se rappelle très bien du 6 septembre 1969. Ce jour-là, le Stadion Rote Erde de Dortmund est plein à craquer pour le match face aux Königsblauen. 39 200 spectateurs, dont certains sont quasiment sur la pelouse. Quand Hans Pirkner ouvre le score pour Schalke, c’est carrément la folie : des supporters du Null-Vier envahissent la pelouse pour aller fêter leur buteur. Débordé, le service d’ordre lâche les chiens. L’un d’entre eux, Rex, ira carrément mordre Friedel Rausch au postérieur. Ce dernier s’écroule de douleur, mais grâce à l’intervention des médecins – qui lui administrent un vaccin contre le tétanos au passage – Rausch finira la partie, qui se soldera par un match nul 1-1, et obtiendra près de 500 marks de dédommagement. Mais l’histoire ne s’arrête pas là : vexé du traitement de ses joueurs, le président de Schalke Günter Siebert ira louer quelques lionceaux apprivoisés d’un zoo à proximité juste avant le match retour. Des lionceaux en laisse qui fouleront la pelouse du Glückauf Kampfbahn avant la rencontre, juste pour intimider les joueurs du BVB. Probablement l’un des actes fondateurs de la plus grosse rivalité outre-Rhin.

Tooooooooooooooorwand

À chaque championnat son émission culte. En Allemagne, il s’agit de « Das aktuelle Sportstudio » , diffusé tous les samedis soir sur la ZDF depuis 1963. Une émission de sport, mais essentiellement de foot. Et s’il y a bien une chose qui a contribué au succès de « Das aktuelle Sportstudio » , c’est le Torwand. Inventé en 1964 par un certain Heinrich Klein, ce mur à deux trous est devenu un passage obligatoire pour les invités de l’émission, notamment les footballeurs. Les règles sont simples : trois tirs en bas à droite, trois tirs en haut à gauche. Jusqu’à présent, personne n’a réussi le parcours parfait. Si Günter Netzer fut le premier à marquer cinq pions, il détient ce record avec d’autres joueurs, Rudi Völler, Frank Pagelsdorf ou Frank Rost, entre autres. Quant à notre Franck Ribéry…

Vidéo

Sinon, « Das aktuelle Sportstudio » est aussi connu pour ça :

But de bois, but de fer

Avant, les cages étaient en bois. Mais ça, c’était avant. En Allemagne, on est passé aux cages en alu après que Herbert Laumen a prouvé qu’elles n’étaient pas assez solides pour contenir sa puissance. Ou plutôt sa maladresse. Alors que le score est de 1-1 au Bökelbergstadion entre le Borussia Mönchengladbach et le Werder Brême ce 3 avril 1971, le milieu de terrain décide à la 76e minute de s’envoyer en l’air pour reprendre un coup franc de Günter Netzer. « J’ai pris la balle des mains du gardien Günter Bernard, mais j’avais tellement d’élan que j’ai fini dans les filets. Là, j’ai remarqué qu’il se passait quelque chose. J’ai vu le but se casser, je me suis mis à l’abri et j’ai fini comme un poisson dans les filets. Il y a eu des ricanements dans le virage nord. C’était un de ces spectacles… » Le match fut définitivement interrompu à la 88e minute. Gladbach ne pouvant remplacer ses buts dans l’immédiat, le tribunal de la DFB lui collera une amende de 1500 marks et donnera match gagné à Brême 2-0. Les autres clubs s’empresseront alors très vite de changer leurs cages, histoire de ne pas avoir d’ennuis. Mais quelques années plus tard, le Borussia Dortmund sera lui aussi maudit. À Madrid.

Andreas Thom, premier joueur officiel d’est en ouest…

Le 9 novembre 1989, le Mur de Berlin s’écroule. Bientôt, la RFA et la RDA ne feront plus qu’une. Les clubs de l’Ouest vont enfin pouvoir se renforcer en faisant venir des « frères » de l’Est. Mais dans ce genre de business, il faut faire preuve de rapidité. Rainer Calmund le sait, et agit en conséquence. Le 15 novembre 1989, le boss du Bayer Leverkusen décide d’envoyer Wolfgang Karnath, entraîneur de jeunes du club, à Vienne, pour assister à la rencontre entre l’Autriche et la RDA. Pour qu’on ne le fasse pas chier, Calmund décide de l’accréditer en tant que médecin – bah oui, ça marche, vu que Karnath est employé chez Bayer également. S’ensuit alors un joli malentendu. « Quand je suis arrivé, les Autrichiens pensaient que j’étais le docteur de la RDA » , raconte Karnath. « Les officiels de la RDA ont pensé que je bossais pour les Autrichiens. Alors je me suis assis tranquillement sur le banc. » Et en profite pour prendre les adresses de joueurs comme Matthias Sammer, Ulf Kirsten et surtout Andreas Thom. L’attaquant du Dynamo Berlin signera un contrat avec le Bayer Leverkusen le 12 décembre 1989 et deviendra le 17 février 1990 le premier joueur « Ossi » à jouer légalement chez les « Wessis » . Avant lui, Falko Götz, originaire de Saxe, avait déjà joué pour le Bayer, en 1983. Mais il avait réussi à rallier l’Ouest après s’être planqué dans l’ambassade ouest-allemande à l’occasion d’un match de Coupe d’Europe entre le Dynamo Berlin et le Partizan Belgrade.

…Quand à Peter, il se paye le Lux de faire le chemin inverse

Andreas Thom, Matthias Sammer, Ulf Kirsten et Thomas Doll furent les premiers grands joueurs de l’ex-Allemagne de l’Est à rejoindre la Bundesliga. À la recherche de gloire, à la recherche d’argent. Toutefois, il existe des joueurs qui ont fait le chemin inverse. Peter Lux, par exemple. Originaire de Salzgitter, non loin de la frontière entre les deux entités, le petit milieu passé par le HSV s’était rendu à Braunschweig pour fêter avec des milliers de ses compatriotes la réunification des deux Allemagnes. Puis, à l’été 1990, il décida d’accepter l’offre du Dynamo Dresde – un gros morceau à l’époque – qui devait être intégré par la suite en Bundesliga. Mais après seulement cinq petites rencontres avec le Dynamo, il décida de faire machine arrière et de signer pour le club de ses débuts, l’Eintracht Braunschweig, pour le plus grand plaisir de sa femme Anke : « C’était bien de vivre dans le Hilton près de l’église Frauenkirche, mais faire la queue dans les supermarchés et les problèmes de téléphone nous ont épuisés. Lui était content, moi ça m’a passablement énervée. »

Jägermeister s’affiche sur le maillot de l’Eintracht Braunschweig

Saison 72/73. L’Eintracht Braunschweig n’a pas beaucoup de sous, et se demande comment il va faire pour pouvoir acheter des joueurs pour se maintenir dans l’élite. Heureusement pour les « Blau-Gelben » , il y a un homme dans le coin qui a quelques bonnes idées : Günter Mast. Et dans la vie, Günter Mast est PDG de la société Jägermeister, la fameuse boisson aux herbes. Avec le boss de l’Eintracht Balduin Fricke, il décide de monter un plan pour servir à la fois les intérêts du club tout comme ceux de sa boîte, tout en la faisant à l’envers à la DFB, qui jadis ne souhaitait pas voir apparaître des pubs sur les maillots. « L’Eintracht avait pour insigne une tête de lion » , confiera Mast plus tard. « On a appelé la DFB et on leur a dit que dorénavant, on jouerait avec une tête de cerf sur le maillot. Lion ou cerf, ça leur était égal. Ils ont dit oui. » Et c’est ainsi que le fameux cerf de Jägermeister est apparu sur le maillot de Braunschweig, contre 300 000 marks par an, une somme non négligeable à l’époque. Le premier sponsoring du genre, qui en appellera d’autres. Mais aujourd’hui encore, il est très difficile de faire plus classe que Paul Breitner dans ce maillot lors de la saison 77/78.

Le but fantôme de Thomas Helmer

Le Bayern Munich est l’équipe la plus aimée en Allemagne, c’est un fait. Il s’agit également de l’équipe la plus détestée du pays. Normal, quand on remporte le Meisterschale quasiment une année sur deux. Si en plus, les arbitres s’en mêlent, on ne s’en sort plus. C’est ce qu’ont dû se dire les joueurs du 1.FC Nuremberg, un après-midi d’avril 1994. 26e minute, corner pour le Bayern, le ballon arrive dans les pieds de Thomas Helmer qui tire à côté, non sans rentrer dans Andreas Köpke. Six mètres. Alors que le champion d’Europe 96 relève le futur gardien de l’OM, le juge de touche Jörg Jablonski signale à son arbitre central Hans-Joachim Osmers que la balle est entrée. Ce que le directeur de jeu approuve. 1-0 Bayern. Köpke et ses gars deviennent fous, les joueurs de Nuremberg protestent, sans succès. Le « Phantomtor » est validé. Le match continue, le Bayern finira par s’imposer 2-1, Manfred Schwabl ratant le pénalty égalisateur en toute fin de rencontre. Si Schwabl avait égalisé, Nuremberg n’aurait pas porté plainte. En effet, le « Club » n’avait besoin que d’un point pour se maintenir, tandis que le gros rival de son Land aurait été pénalisé et aurait cédé le titre à Kaiserslautern. Seulement voilà, Schwabl n’a pas marqué. Le but de Thomas Helmer – ainsi que la victoire du Bayern – ayant été invalidé, le match est à rejouer. Munich atomisera Nuremberg 5-0 et remportera là le 12e Meisterschale de son histoire.

Ces équipes qui ont disparu

À chaque fin de saison, les Allemands n’ont d’yeux que pour leur Ewige Tabelle, soit le classement de la Bundesliga toutes saisons confondues. Si le Bayern est solidement en tête avec 3195 points (avec plus de 600 points d’avance sur le deuxième, le Werder Brême) et semble trôner pour l’éternité, il est des équipes tout en bas du classement qui ont dû rendre l’âme. Elles sont au nombre de trois. En 50e et antépénultième position, nous retrouvons ainsi le Blau-Weiß 90 Berlin, qui a joué une saison dans l’élite, en 86-87, et qui a connu des joueurs comme Karlheinz « Air » Riedle ou encore Andreas « Zecke » Neuendorf, avant de disparaître au terme de la saison 91/92. En 51e et avant-dernière position, une minute de silence pour le VfB Leizpig, triple champion d’Allemagne (1903, 1906 et 1913), qui a notamment formé René Adler, qui a également vu passer Clemens Fritz, ainsi que les grands Didier Six et Darko Pancev. Une seule saison dans l’élite également, en 93/94, avant de disparaître dix ans plus tard. Et puis en 52e et dernière position de l’Ewige Tabelle, un tonnerre d’applaudissements pour le SC Tasmania 1900 Berlin, dont l’histoire sera contée une autre fois…

Bundesliga – 50 ans, 50 histoires (1 à 9)

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