- Coupe de France
- 32es
- Andrézieux-Bouthéon-OM (2-0)
Bryan-Clovis Ngwabije : « On a battu la vraie équipe de l’OM »
En ouvrant le score d'une tête rageuse face à l'OM dimanche, à Geoffroy-Guichard, Bryan-Clovis Ngwabije a mis Andrézieux-Bouthénon (N2) sur la voie du plus beau succès de l'histoire du club. Une belle récompense pour ce jeune défenseur de vingt ans, arrivé cet été en provenance du centre de formation de l'OL, qui accepte depuis le fin fond du car andréziens-bouthéonnais de revenir sur son nouveau match référence.
Vous réalisez la performance que vous venez d’accomplir ? Oui, c’est sûr. Sur les réseaux sociaux, on voit déjà les messages, les commentaires des supporters marseillais, Mohamed Henni a déjà fait une vidéo… Les retours qu’on a, c’est qu’on a fait un gros match. On n’a pas seulement subi, on a aussi réussi à montrer nos qualités.
D’autant que vous n’avez pas battu un petit OM sur le papier. L’équipe marseillaise de cet après-midi comportait 9 des 11 joueurs qui ont joué l’Atlético au Parc OL il y a moins d’un an. Ça rend forcément l’exploit plus beau que d’avoir joué une équipe bis ?Exactement. On peut dire : « Ouais, on a battu la vraie équipe de l’OM. » Pas la remaniée.
Comment est-ce que tu te sens, lorsque tu es dans le tunnel et que c’est le moment de jouer le match d’une vie ?
On regarde les joueurs de l’OM juste à côté de nous, et on voit qu’ils ont beaucoup de prestance. Mais dans le même temps, on se dit que, maintenant, c’est à nous de montrer ce qu’on est capables de faire. On les connaît, mais eux, ils ne nous connaissent pas.
L’histoire retiendra donc que c’est un joueur formé à l’OL qui a crucifié l’OM dans l’antre de Saint-Étienne en 32es de finale de Coupe de France. Sacré combo quand même. C’est exactement ça, même si de toute façon, tous les Lyonnais marquent une fois à Geoffroy-Guichard. (Rires.) Que ce soit pour Lyon ou une autre équipe. Non, pour dire la vérité, c’était incroyable.
Raconte-nous un peu ton but. Tu bouffes Ćaleta-Car au duel et tu devances Mandanda d’un cheveu. Ça va trop vite. C’est dur de décrire ce qu’il se passe ! Au départ, il bloque ma course et je ne peux pas partir. Mais la balle vient tellement bien que j’ai juste cherché à faire ce jump. Moi, sur le coup, j’avais même pas vu que Mandanda était sorti. C’est en regardant les vidéos que j’ai vu qu’il était là. Sinon, si personne me le dit…
Tu te prends même un coup de poing sur la sortie, non ?Ouais, carrément même. Je tombe parce que Mandanda me met une droite en sortant. Mais je ne l’ai pas sentie, je savais juste à ce moment-là que j’avais bien tapé la balle et fait une tête piquée. Après, je ne voyais plus rien.
Qu’est-ce qui se passe dans ta tête lorsque tu réalises que le ballon est dedans ?
Je n’y crois pas, parce que je n’avais pas arrêté de parler du fait que si je marquais ou si c’était mon pote Lenny (Leonil, le buteur, N.D.L.R.), on allait faire une célébration. La danse et tout, on ne faisait que de parler de ça ! Ma cousine, je lui disais : « Oh Karine, je fais quoi ? Vas-y, je vais tout faire, si je marque, je fais tout ! Toutes les danses du moment ! » C’était un moment inimaginable, je n’y croyais pas du tout.
Au-delà de ton but, tu as sorti une énorme performance sur le plan défensif. Notamment en première période, où tu t’appliquais à toujours jouer en une touche de balle. Même pour dégager loin devant.Tout au long du match, j’étais en confiance. J’avais toujours en tête l’idée de jouer vite, de prendre des initiatives, de voir avant. Si tu vas être pressé, tu dégages, si tu peux jouer en une touche, tu le fais…
On a vu que tactiquement, vous étiez à trois derrière pour mettre de la densité au milieu pour pousser les Marseillais à passer sur les côtés. C’est juste ? C’était exactement ça. On voulait mettre du monde dans l’axe, car c’est la zone la plus dangereuse, et parce qu’aussi, à tout moment, avec leurs qualités techniques, ils pouvaient nous trouer avec Thauvin, Payet, Ocampos, Germain…
Tu en as pensé quoi justement de cette équipe marseillaise ? Parce que finalement, vous ne concédez que très peu d’occasions dangereuses.Bah moi, je n’en vois même pas une…
La talonnade de Germain, non ?Ah oui, oui quand même celle-ci ! Mais après, c’est tout. On a su faire le dos rond dans les moments difficiles, mais c’est passé.
Il y a des joueurs de l’OM qui ont quand même réussi à t’impressionner ? Ou qui t’ont déçu ?
Vous savez, je sors du centre de formation de l’OL. Donc des joueurs de ce calibre, j’en ai vu, et des bien plus impressionnants même. Nabil Fekir, Memphis, Bertrand Traoré wolala, Houssem (Aouar) qui est de ma génération… Je savais ce qui nous attendait, et j’étais préparé à jouer contre ce type de joueurs.
Dans quel état étaient les Marseillais sur le terrain ? Tu ne les sentais pas dans un bon jour, résignés ? Ils se parlaient entre eux ?Ils parlaient énormément ! J’étais surpris d’ailleurs qu’ils s’entendent si bien, qu’ils communiquent autant. Je me posais justement la question sur qu’est-ce qui n’allait pas. La pression des supporters qu’ils n’assument plus ? Quelles sont les petites choses qui font qu’ils ne produisent plus du bon football… Qu’est-ce que c’est ?
En fin de match, on t’a vu gueuler un peu sur l’arbitre alors que tu étais totalement calme jusque-là. Tu avais peur que ton équipe craque ?
Je voulais que l’arbitre reste lucide. Certes, on menait 2-0 à ce moment-là du match, mais ce n’était pas une raison pour qu’il ne siffle pas certaines choses, ou qu’il soit plus gentil envers les Marseillais. Car ça aurait pu jouer en notre défaveur. Le football, ça va vite dans les deux sens, c’est fragile.
Quelle a été la réaction dans le vestiaire ?De se dire qu’on l’a fait. Que nous l’avons fait. Tout le monde. Les joueurs, les dirigeants, les supporters, les parents, les bénévoles. C’est une récompense collective.
C’est une belle victoire pour toi, qui as quitté le centre de formation de l’OL en début de saison pour venir à Andrézieux. Comment as-tu digéré cet épisode ?Je ne l’ai pas mal vécu, parce que j’arrivais au bout d’un cycle. J’arrivais à la fin de mon contrat de stagiaire et soit je devenais pro, soit pas. Ils m’ont jugé, je n’ai pas eu beaucoup de temps de jeu en CFA2 l’an passé, il y a beaucoup de concurrence… C’est compliqué. C’était à moi de faire le job pour rebondir, enchaîner les matchs et refaire de bonnes performances. Comme ce soir.
Tu as notamment joué un match de Youth League en 2016 face à la Juventus en 2016. Le match face à l’OM détrône celui-ci en tant que match le plus important de ta carrière ?Oui, car la Youth League, c’était mon dernier gros match. Au niveau de l’intensité, même de l’enjeu, car si on ne gagnait pas, c’était l’élimination. Maintenant, c’est celui-ci mon match référence et qui j’espère va lancer ma carrière.
Choper l’OL en 16es, ce serait le plan idéal ? (Rires.) Ah non, non ! Choper l’OL à Geoffroy-Guichard ? Non, pas tout de suite !
Propos recueillis par Andrea Chazy