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Bruno Rodriguez : « Meyrieu était un joueur exceptionnel »
Samedi soir, Bastia reçoit Metz, dans un match qui sent bon la D1 des années 90. Celle de Sollac, Nouvelles Frontières, Pierre-Yves André, Kastendeuch et... Bruno Rodriguez (quarante-quatre ans). Monaco, Strasbourg, Paris, Lens, Guingamp, Ajaccio, Clermont, mais surtout Bastia, où il est né et vit à présent, et Metz, qui aura chanté « Rodriguez chez les Bleus » pour son attaquant vice-champion de France et ses dix-huit buts. Alors Bruno, t'es plutôt Sophie Thalmann ou Laetitia Casta ?
Bruno, quiche lorraine ou figatellu ?Je vais mettre mes origines en avant, je vais dire figatellu…
Pour la bière, Pietra ou Amos ?Là aussi, je vais dire Pietra… Malgré les bonnes choses que j’ai pu manger en Lorraine, c’est difficile de rivaliser avec la Corse sur le terrain de la gastronomie.
Maure ou Graouly ? Qui c’est le plus fort, un pirate ou un dragon ?C’est pas facile, ça. Je sais pas quoi répondre, mais comme la tête de Maure est un combattant, je pense qu’il peut tuer le dragon.
On est à 3-0 pour Bastia, on va peut-être équilibrer en parlant foot. Alors, Vladan Lukić ou Anto Drobnjak ?Ah, dur. Ce sont deux joueurs yougoslaves de l’époque. Vladan était plus subtil, plus technique, alors qu’Anto était plus un finisseur. Quelque part, Lukić a un peu joué le rôle que je jouais pour Anto à Bastia. J’ai fait marquer pas mal de buts à Drobnjak, comme Vladan m’en a offert quelques-uns. Il y avait un belle complicité avec Lukić.
Derrière toi, Fred Meyrieu ou Steph Ziani ? Deux vrais numéro 10 à l’ancienne, il suffisait de faire l’appel et ils vous filaient des caviars à tire-larigot. C’est vrai que Meyrieu, c’était un joueur exceptionnel, il mettait la balle où il voulait. Et Stéphane pareil. 1-1 pour les meneurs, idem pour les attaquants.
Du coup, la question qui tranche : Cyril Rool ou Philippe Gaillot ?C’est pas du tout le même profil hein (rires). Ce sont des questions un peu particulières… Sur le côté rigoureux et technicien, plutôt Cyril. Et sur l’aspect sérieux tactique, Gaill’. Dans les deux cas, c’est quand même pas facile à passer ! Deux très très bons défenseurs. Et attention, Gaill’, sous ses airs de gentil et discret, il savait la mettre aussi.
Tu as des souvenirs précis de matchs entre Bastia et Metz ?Non, tout simplement parce que ce sont des matchs que je n’ai pas appréciés. C’est difficile de jouer contre son ancien club, quand c’est son club de cœur.
Quelle image tu as de Metz avant de débarquer ?Au moment où je pars de Bastia, après deux belles saisons, je vais à Strasbourg où ça ne se passe pas très bien avec l’entraîneur (Duguépéroux, ndlr). En janvier, je n’ai pas tant de propositions que ça, mais Metz voulait déjà me récupérer avant, et moi, j’adorais ce club, car c’est un club familial, emblématique du foot français. Je suis arrivé en hiver, blessé, Metz m’a soutenu. J’y ai retrouvé les vertus de solidarité de la Corse.
M. Carlo Molinari, c’est un ami intime du grand-père de ma femme. Il y a un lien particulier, il voulait me faire venir depuis longtemps. J’ai aussi beaucoup de respect et d’amitié pour François Nicolaï, mais la relation que j’ai eue avec Carlo, c’est différent. Plus que de l’amitié, quand ça se passait bien. Après, il y a eu des moments plus compliqués, comme dans toutes les relations, comme dans un couple. Mais j’ai toujours gardé un lien particulier.
À cette époque, il y a une colonie de « sudistes » en Lorraine : Biancarelli, corse comme toi, Letizi, Asuar, Meyrieu… Vous ne vous êtes pas dit quand il faisait -8°C en janvier que vous aviez fait une connerie ?
Metz, à l’époque, il ne faut pas oublier que c’est un club solide, qui se classe bien chaque année, qui gagne la Coupe de la Ligue, qui joue l’UEFA, avec un vrai public qui répond présent. Ça compte, ça donne envie de venir. Le stade a toujours été plein, c’est une belle destination pour un pro. Mais c’est vrai que la présence de mecs du Sud donnait aussi envie, c’était marrant de se retrouver là ensemble, de ramener nos petites habitudes. On se roulait comme des gamins dans la neige aux entraînements !
Un autre « Bastiais » qui a débarqué en 98-99, c’est Nenad Jestrović. Et comme toi, il est revenu pour une dizaine de matchs et un but quelques années après…
Oui, j’ai joué avec Nenad. Il a fait de jolies choses en Belgique ensuite, avec Anderlecht. Ce n’est pas si étonnant puisqu’à Bastia comme à Metz, on revient à la maison. Si on nous rappelle, c’est aussi qu’on a laissé une bonne impression.
Pourtant, tu as joué à Metz ET Strasbourg, à Lens avant de revenir à Metz alors que l’on connaît la rivalité de 98, Bastia ET Ajaccio… Mais ça se passe toujours bien avec les supporters et dans les clubs. Comment tu fais ?
J’ai toujours été honnête sur le terrain, je me suis toujours donné. Quand je pars de Metz, c’est tendu, mais c’est plus une incompréhenson qu’autre chose. On accepte que l’on ne puisse pas plaire à tout le monde, mais on reste droit. Et je suis a priori plutôt un type sympathique, même si au premier abord, on pourrait ne pas le croire ! Pour l’anecdote des supporters messins, à mon retour, j’avais provoqué une petite réunion avec les différents groupes. On est tombés d’accord pour qu’ils ne me sifflent pas ni ne m’applaudissent… Bon, je mets le but qu’il faut contre l’OM, et finalement tout le monde est content !
C’est quoi ce truc que tu as avec l’OM justement ? Tu mets un doublé avec Metz dans l’un des plus beaux matchs de Saint-Symphorien (3-2 en 97-98 avec un but incroyable de Rigobert Song), tu fais un passage à Paris un peu tronqué, mais tu fais gagner le PSG contre Marseille, et même à ton retour à Metz, tu arrives à leur planter ce but un peu dégueulasse, mais qui fait du bien… C’est vrai que j’ai toujours bien réussi contre l’OM. Il y a des clubs comme ça, Bordeaux aussi. Ce n’est pas une question de motivation, parce que sur un terrain, j’étais toujours motivé à 200%, c’est plutôt une question de jeu ouvert contre les grosses équipes. Et de caractère, car dans les grands rendez-vous, je réponds présent. Enfin, je répondais ! (Rires)
Tu pars quand même de Metz sur deux cartons rouges. Tu en prends un, tu purges ta suspension et tu en reprends un !Oui, bon, c’est vrai. Le premier, je l’ai cherché. Deux jaunes en une mi-temps face au Marseille de Pirès, Maurice, Ravanelli… Pour le second, je me défends, dans un match à Bordeaux où on prend six buts.
Nancy-Metz ou Ajaccio-Bastia ?Facile, des Nancy-Metz, j’en ai vécu qu’un et encore, j’étais blessé, donc je ne l’ai pas joué. Donc le derby corse, parce qu’en plus, j’ai marqué deux fois. À l’aller et au retour.
Fred Antonetti ou Joël Muller ?Moins facile là, en revanche. Ce n’est pas le même genre non plus, mais deux personnes que j’ai appréciées dans le football et en tant qu’hommes. Deux mecs qui ont été droits et honnêtes avec moi, et qui je pense le sont avec tout le monde. Égalité.
Bastia 1905 ou Génération Grenat ?Je n’ai pas envie de faire un choix, et c’est comme pour les autres clubs. Les supporters, c’est ce qui fait vivre les clubs, ils sont tous importants.
Coup de bâton sur Lucas ou pétard sur Lopes ?Égalité, il y a des cons partout.
Tu confirmes que c’est chaud, Furiani ?Non, c’est une fausse image. Il y a une ferveur, mais Bastia est plus sévèrement puni, ça je suis catégorique. Après, Metz aussi va être puni. Avec un jet de pétard, c’est normal, mais c’est simplement dommage que tout un club, des gens qui l’aiment, les supporters, les joueurs, soient pénalisés à cause d’un con ou deux… On peut pas appeler ça autrement.
Tu as quel regard sur Metz 2016 ?Ils ont bien démarré, mais je pense que ça leur a paradoxalement desservi. Il faudrait comprendre pourquoi ils ont plus de réussite à l’extérieur… Ils prennent une quinzaine de buts à domicile sur trois matchs quand même. Est-ce qu’ils ont voulu jouer de l’avant sans que ce soit leur truc ? C’est facile de voir ça en spectateur, c’est pour ça que je fais confiance à Philippe (Hinschberger, entraîneur de Metz, ndlr), qui est bien placé et très compétent, pour régler tout ça.
Et côté Bastia ?Bastia, c’est le manque de réalisme, de réussite. C’est un engrenage, on commence à douter. C’est pour cela que le match de samedi sera crucial pour les Corses.
Qui est le joueur à surveiller de chaque côté ?Pour Bastia, il faut se méfier de St Maximin et Crivelli, deux jeunes tout foufous, qui peuvent à tout moment enflammer un match si ça se passe bien. Côté Metz, attention à Erdinç, qui reste un vrai buteur expérimenté.
Propos recueillis par Julien Emel