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Brown, Flower of Scotland
Réputé pour son gros caractère et sa grande gueule, Scott Brown est avant tout le garant de l’identité du Celtic, dont il est le capitaine depuis de nombreuses années. Entre Joey Barton, El-Hadji Diouf et un homme touché à vif par son histoire personnelle.
Scott Brown a toujours avancé à la poudre. Lui préfère raconter que « ce qu’il se passe sur le terrain reste sur le terrain » . L’histoire le raconte ainsi et il n’y a qu’à se repasser le premier Old Firm de la saison pour s’en convaincre. Un Celtic-Rangers se doit d’être différent, c’est comme ça. Pour gagner définitivement le respect, Brendan Rodgers, lui, se devait de frapper un gros coup. La Scottish Premiership attendait ça depuis le 29 avril 2012. L’Écosse depuis une demi-finale de coupe nationale remportée par les Gers en avril 2016. Le 10 septembre dernier, Celtic Park était prêt. Prêt à accueillir de nouveau les Rangers et les remettre en place. Un tel choc se prépare et s’allume. Cette fois, Joey Barton, débarqué à Glasgow en mai dernier pour rejoindre le promu historique, s’en est chargé. Sa cible ? Scott Brown, le capitaine du Celtic. Une icône. « Brown ne boxe pas dans la même catégorie que moi. Il est loin de mon niveau. » L’emblème a décidé de répondre par les faits et avance une ancienne déclaration de Barton qui expliquait alors être « fan du Celtic » . Ok, Joey balance une photo de Scott Brown, enfant, avec le maillot des Rangers sur le dos. Le reste n’est que l’histoire : le Celtic gifle avec autorité son ennemi (5-1) et, après la rencontre, Brown file vers le tunnel pour prendre la parole devant la presse. « Aujourd’hui, c’était un match d’hommes contre une équipe d’enfants. » Les faits, plutôt que les mots. Scott Brown n’a jamais rigolé avec ce que le foot peut représenter à Glasgow. Mi-octobre, le Celtic a confirmé sa suprématie en allant s’imposer en fin de match à Hampden Park en League Cup (1-0). Le prochain rendez-vous est fixé au 31 décembre prochain, à l’Ibrox. Un lieu où Scott Brown a écrit un peu plus qu’une ligne de son histoire, mais où il a surtout posé l’essence de ce qu’il est. À savoir : une grosse paire de couilles.
« Oui, je lui ai répondu, et alors ? »
La pose est aujourd’hui un tableau que chaque supporter des Hoops aime dégainer. Brown représente probablement mieux que personne ce qu’est le Old Firm. Comme ce jour de février 2011, où Ibrox avait été le théâtre d’un cinquième tour de Scottish Cup entre les Rangers et le Celtic. Un jour où le capitaine du Celtic avait été chercher un replay à trente-cinq minutes de la fin avant d’écarter ses bras devant la grande gueule d’El-Hadji Diouf. La scène est entrée dans la légende, et Brown n’est revenu qu’une fois sur cet incident : « C’était une réaction amicale. J’aime le Old Firm pour ça, et cette saison-là, il y en avait eu sept. Sur le coup, j’ai pris un carton, mais je pense que c’est le meilleur carton que j’ai eu de ma vie. Ma célébration était parfaite et je ne regrette en aucun cas ce geste. Il voulait m’emmener dans une bataille et j’étais obligé de lui répondre. Je ne veux pas aller dans le détail sur ce qu’il m’a dit à propos de ma famille. Alors, oui, je lui ai répondu, et alors ? » Scott Brown a toujours été au centre de ce duel, par un tacle appuyé sur Ian Black en février 2015 ou en se frittant avec Kyle Lafferty en février 2010. L’homme est comme ça : le sommet l’excite, et Neymar s’en souvient encore pour avoir pris quelques coups un soir d’Europe. Au point de déraper totalement ? Oui, parfois, à l’image d’un match contre Qarabağ en juillet 2015 où il avait été accusé par certains joueurs d’insultes. « Ce soir, ils ont tout fait, sauf jouer au football. Ils nous ont provoqués dans les mots, et le capitaine du Celtic a été le pire. Depuis ce jour, j’ai de la haine contre lui » , expliquera même le brassard azéri après la rencontre.
La sélection, Rodgers et le cancer
L’image a souvent collé aux crampons de Scott Brown. Mais avec justesse, il faut comprendre que celui qui porte le tissu du Celtic depuis 2007 est bien plus que ça. Brown est avant tout une figure nationale, le capitaine d’une sélection de laquelle il avait décidé de se retirer l’été dernier avant de revenir la semaine dernière pour aider une Écosse bousculée dans sa phase d’éliminatoires à la Coupe du monde 2018 avant un match attendu contre l’Angleterre le 11 novembre prochain. Le gamin de Hill of Beath, dans le Fife, d’où est également issue la légende des Rangers Jim Baxter, a toujours avancé à l’intuition. Gosse, il se levait le matin devant une statue de Baxter et rêvait alors de jouer pour les Gers, jusqu’au jour où les dirigeants du club l’ont refoulé à l’âge de douze ans pour sa petite taille. Scott Brown explosera finalement à Édimbourg où il est repéré un an après son échec aux Rangers par Hibernian. Il surmonte sa dyslexie, se taille en tant qu’homme et se retrouve au cœur de la Golden Generation des Hibs avec Kevin Thomson, Steven Whittaker ou encore Steven Fletcher. En janvier 2007, Thomson sera alors transféré aux Rangers et servira d’appât pour donner une seconde chance à Brown. Lui n’en a rien à faire, courtisé par tout le monde (Everton, Tottenham, Middlesbrough), et décide de filer au Celtic un peu moins de deux ans après avoir connu sa première sélection A. Il n’a alors que vingt ans et quitte Édimbourg sur un dernier but pour les Hibs face au Celtic.
C’est là que son histoire va basculer. Par le choix de filer au Celtic d’abord, où l’attend Gordon Strachan et où son ancien entraîneur à Hibernian, Tony Mowbray, viendra le rejoindre en 2009. Mais aussi dans sa vie personnelle, car en mai 2008, alors qu’il vient de remporter son premier titre de champion d’Écosse avec les Hoops, sa petite sœur décède d’un cancer. Le tout quelques jours après la mort de l’ancien entraîneur du Celtic et mentor de Brown, Tommy Burns, dans les mêmes circonstances. Un épisode sur lequel est revenu le capitaine du Celtic dans sa biographie My Celtic Story : « À cet instant, je n’avais plus grand-chose à faire de notre saison. Tout le monde nous félicitait à propos du titre, mais, dans ma tête, je ne voulais plus jouer au foot. Je voulais simplement rentrer chez moi. Gordon Strachan m’a dit de partir et de revenir au moment où je le voudrais. Il a été parfait et est toujours resté en contact avec moi. » Le tatouage incrusté sur le bras de Brown affiche la date de naissance et de mort de sa sœur Fiona. Lors de son mariage en 2009, Scott Brown demandera même à tous les invités de verser des dons à l’institut britannique de recherche contre le cancer. Depuis ce jour, l’homme n’a jamais été aussi fort et habité, d’autant plus depuis l’arrivée de Rodgers qui a travaillé avec lui sur sa nutrition. Oui, car au-delà de son histoire, Brown avoue devenir hyperactif lorsqu’il consomme trop de sucre. Le foot est donc un exutoire et il faut maintenir se dire qu’il ne partira jamais de Glasgow malgré plusieurs approches. Pourquoi ? « J’ai trente et un ans, je suis capitaine du Celtic, qu’est-ce que vous voulez de plus ? » Il n’a pas tort.
Par Maxime Brigand