- Italie
- Foot amateur
Brianza : quand le racisme frappe un enfant de dix ans
Samedi 2 novembre, à Brianza en Lombardie, un enfant de dix ans a été victime d’insultes racistes par une maman présente autour de la main courante. Un avant-goût de ce que s’apprêtait à vivre Mario Balotelli sur le terrain du Hellas le lendemain, et qui n’a pas manqué de faire réagir de l’autre côté des Alpes.
C’était un samedi comme les autres pour l’équipe U10 de l’Aurora Desio Calcio. Un match à 15h disputé face à une autre équipe du coin, la Sovicese. « Notre équipe menait au score, ce qui a rendu les parents adverses un peu agités. Ils se sont énervés, il y avait un peu de tension entre les parents. C’est aussi monté car il y avait une accumulation de petites fautes, de duels avec de l’engagement » , se rappelle Alessandro Crisafulli, le directeur sportif des jeunes du club. Une rencontre âpre et disputée, en somme, comme il y en a des milliers chaque week-end en Italie et ailleurs. Jusqu’à ce que l’impardonnable se produise, et fasse basculer une simple rencontre d’enfants dans une autre dimension.
« Sur le moment, je voulais juste finir le match »
« Nègre de merde » . Dans l’incrédulité la plus totale, une mère de famille balance cette ignoble insulte au seul petit garçon noir présent dans cette équipe de l’Aurora Desio Calcio. Une formule peut-être même encore plus difficile à encaisser lorsqu’on a dix ans, que l’on est insouciant, et qu’on ne pense qu’à jouer au foot avec ses amis. Et pourtant : « L’enfant a été sous le choc quelques secondes, avant de se remettre à jouer, rembobine Crisafulli. Ce n’est qu’après la rencontre qu’il est allé voir son coach, puis ses parents pour raconter les insultes qu’il avait entendues. Il leur a dit : « Sur le moment, je voulais juste finir le match. » C’est une réaction forte, à cet âge, de ne pas y accorder d’importance sur le moment pour faire ce qu’il aime le plus : jouer au football. »
La mère du garçon, choquée, n’a pas tardé à réagir, notamment auprès de l’antenne milanaise du quotidien La Repubblica : « Je suis italienne et j’ai épousé un homme d’origine congolaise qui a depuis obtenu la nationalité italienne. Il ne nous est jamais arrivé quelque chose d’aussi grave. » Preuve du caractère à la fois exceptionnel, mais tout aussi grave, de l’agression verbale dont a été victime son fils.
Même combat
Entre-temps, les actes de racisme aperçus à Vérone, qui ont visé Mario Balotelli lors de Hellas-Brescia en Serie A, sont passés par là. Un cas beaucoup plus médiatique, forcément, qui a indirectement braqué les projecteurs sur cet incident à l’échelle amateur en raison de leur nature similaire. « Si les deux clubs se sont parlé rapidement, les parents de l’équipe de la Sovicese réfutent ces accusations de racisme en disant que ça n’a jamais eu lieu, que tout était normal. Exactement comme les tifosi du Hellas lors de l’épisode de Balotelli. »
En réponse, l’Aurora Desio Calcio a d’ores et déjà publié plusieurs communiqués sur sa page Facebook pour dénoncer l’incident. Mais pas seulement : « Nous allons organiser plusieurs opérations autour de l’anti-racisme ce week-end, l’une d’elles sera notamment de voir certaines de nos équipes avec le visage partiellement recouvert de noir. C’est un geste purement fraternel, pour montrer que nous sommes tous égaux » , avance Alessandro Crisafulli. Parmi les rencontres, des retrouvailles entre les équipes U18 de l’Aurora Desio Calcio et de la Sovicese, qui ont prévu de respecter les initiatives prises par le club hôte. Des initiatives pour lutter contre un mal qui revient trop souvent en ce moment en Italie, même si le directeur des jeunes ne veut pas en faire une généralité : « Concernant notre club, c’est la première fois que ce genre d’incident arrive. Mais ça ne veut pas dire non plus qu’il n’y en avait pas avant. Un jour, au bord du terrain, j’ai quand même vu un parent hurler sur un gamin de huit ans« Prends le bateau et rentre chez toi ». » Que ce soit pour Balotelli ou l’Aurora Desio Calcio, le combat continue. Peu importe la division.
Par Andrea Chazy
Propos d'Alessandro Crisafulli recueillis par AC