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Brésil-Mexique sur la route du Nordeste

Par Pierre Boisson et William Pereira, sur la route
5 minutes
Brésil-Mexique sur la route du Nordeste

Loin du Maracanã, de São Paulo et des manifestations anti-Copa, il y a le Nordeste, où le football se vit à un autre rythme, celui des longues lignes droites, des relais routiers, et des frigos à cervejas réglés sur -6°. Peut-être parce que la région la plus pauvre du pays n’a jamais vraiment pu rêver d’éducation ou de santé, peut-être parce que le Nordeste aime la fête un peu plus que les autres, mais c’est ici que le Brésil s’était réconcilié avec sa sélection lors de la dernière Coupe des confédérations, sur fond d’hymne national.

« C’est Marcelo qui a eu l’idée de continuer à chanter a cappella, expliquait Thiago Silva (cf So Foot 117). Il se trouvait entre Júlio César et moi et quand la musique s’est arrêtée et que j’allais le lâcher pour applaudir, il m’a retenu avec l’air de dire : « Tu ne vas nulle part Thiago, continue de chanter. » Puis, on a tous chanté à l’unisson. » Un an plus tard, alors que Fortaleza faisait de nouveau la fête à sa Seleção, road-trip dans les profondeurs de cet immense bout de terre. Km 0 (11h37) – SalvadorSalvador de Bahia s’est levée comme tous les jours – embouteillée, brûlante, tous seins dehors. « C’est jour férié, je vais en profiter pour aller à la plage et boire des bières, explique Ana Paula, en tenue de saison. La Seleção ? Bof. » Les sorties de villes sont toutes les mêmes. Des magasins qui vendent en gros, des chiens qui errent. Sur l’autoroute, un camion fait marche arrière.

Km 40 (12h28)Salvador est derrière. À l’intérieur de l’église évangélique « Jésus est le seigneur » , des chaises en plastique et Carlos Alberto Sampaio Tranquili, 73 ans. Carlos Alberto est fils de Calabrais, porte un chapeau à la main et un parapluie sous le bras. Dans la poche intérieure de sa chemise, presque toute sa vie. Ses papiers, ses médicaments. « J’ai la même maladie que Ronald Reagan » , dit-il avant d’expliquer comment le Mercosur a changé l’âme du Brésil. « Nous étions un pays de café, c’est fini désormais. Ici, c’est un pays du Tiers-Monde qui se prend pour une nation développée. » Est-ce que la Coupe du monde intéresse Carlos Alberto ? « Je ne suis pas de ce monde, je le trouve ennuyeux. » Plus loin, Lucinda, la tenante des lieux, laisse apparaître son appareil dentaire en souriant. « L’argent aurait dû être investi dans la santé et l’éducation, mais maintenant que la Copa est là, qu’est-ce qu’on peut y faire ? » La jeune femme a de toute façon d’autres plans pour ce mois de juin. « On prépare l’ouverture du temple de Salomon. Pendant 40 jours, je dois méditer et rester focalisée là-dessus. » Pas de Mondial pour elle, donc.

Km 59 (13h01)Installé au bord de la route, le magasin « Foguete » est entièrement dédié à deux choses : les feux d’artifices et les pétards, spécialités de la région. Calme plat. « Pour le moment, on n’a pas vendu grand-chose depuis le début du Mondial, bafouille la vendeuse, les yeux dans le vague. Je travaille ici depuis un peu plus d’un an et je ne me souviens pas avoir vendu quoi que ce soit à des supporters de foot. Les gens en achètent plutôt pour les fêtes. »

Km 94 (13h41)Un camion Ford frappé à l’avant d’un emblème Batman dépasse à grande vitesse en bouffant la ligne continue. Il ne lui reste plus que deux heures et demie avant le début de la rencontre. Vole, chauve-souris.

Km 96 (13h44) : SauipeValdemiro tient une boutique en bord de route et n’attend qu’une chose : rentrer chez lui, « pour regarder le match du Brésil » , comme tous les habitants du coin. « Si vous sortez dans la rue à partir de 16h, ce sera désert » , prévient le commerçant en montrant ses mixtures de piments au vinaigre. Valdemiro ne sait que peu de choses du football, « je me rappelle pas des noms des autres joueurs, seulement de Neymar » , mais se lance tout de même dans un pronostic. « Je n’ai aucun argument, mais je dis 3-0 pour le Brésil. » Raté.

Km 127 (14h30) – Vila do CondeLe Brésil cliché. Des gosses de 8 à 12 ans jouent au football pieds nus sur un terrain en terre battue coincé entre l’autoroute et un village qui transpire la dengue. Parmi eux, Anderson, 9 ans, a une idole. Neymar, évidemment. « Je veux lui ressembler et devenir footballeur professionnel. Je joue au foot toute la journée avec mes potes, parfois même jusqu’au soir quand on ne voit plus le ballon. Je fais toujours partie des quatre ou cinq derniers à partir du terrain » , dit-il le torse bombé, avant de reprendre le jeu. « Aujourd’hui on s’arrêtera plus tôt, parce qu’on doit regarder le match de la Seleção. »

Km 188 (15h02)Un couple aux couleurs de la Seleção pédale tranquillement au bord de la route avec son enfant, posté dans une caisse à l’arrière du vélo de madame, maillot jaune sur le dos. Vamos Brasil ? « El mismo ! »

Km 213 (15h30)Il n’y a désormais plus rien. Sur le GPS, une ligne droite, et que des villages « Lugar sin nombre » . À gauche, la jungle. À droite, la même chose. Au bord du seul axe routier restant, une marchande de fruits aidée par sa fille vend des mangues et des jacquiers à Valério, la soixantaine, qui se fout royalement du match du Brésil. « Qu’ils gagnent ou perdent, ça ne change rien pour moi, mes poches seront toujours vides et à la fin, on mourra tous quand même. »

Km 248 (15h59) – Lugar sin nombreLes hymnes viennent de retentir, Neymar a pleuré. Au comptoir d’un relais routier, des guêpes tournent autour des trois hommes accoudés au zinc. Au coup de sifflet, il n’y a plus de mots, que du football. Et une télévision qui grésille.

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