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Bourillon : « J’aime trop le foot pour rester sur un banc »
C’est donc à 33 ans que Grégory Bourillon a découvert la Ligue 2 avec Châteauroux, une des bonnes surprises de la saison. Après des passages compliqués à Reims et à Angers, le défenseur mayennais redécouvre dans le Berry un plaisir simple, celui de jouer. Discret et posé, l’ancien joueur de Rennes, du Paris-SG et de Lorient a vécu des expériences parfois contrastées, croisé des entraîneurs qui l’ont marqué. Il n’en est pas encore à parler de Ligue 1, mais...
Châteauroux le promu qui peut atteindre les barrages d’accession face à Nancy, relégué de Ligue 1 et en lutte pour ne pas descendre en National 1, c’est un peu le monde à l’envers, non ?Je ne m’attendais pas à voir Nancy aussi mal classé. C’est un club qui a des moyens importants, des joueurs de qualité. Son ambition était de retrouver la Ligue 1 assez rapidement, et c’est au contraire beaucoup plus compliqué que prévu. L’ASNL traverse une mauvaise passe, et notre plus grosse erreur serait de croire que notre mission sera facile. Oui, on vient de faire de bons résultats, mais je n’oublie pas qu’à l’aller, Nancy avait gagné 4-1. Ils ont besoin de points pour se sauver.
Et Châteauroux de points pour se rapprocher du haut du classement…L’objectif, c’était bien sûr de se maintenir. Pour un promu, cela n’a rien d’étonnant. Ce maintien est aujourd’hui acquis. Il reste onze matchs à jouer. Je peux vous assurer que dans le vestiaire, on ne parle pas de Ligue 1. Ni même des barrages. Il y a des équipes qui ont de plus gros effectifs que le nôtre qui visent l’accession. On verra à trois ou quatre journées où nous en sommes. Ce qui est très positif, c’est que nous pouvons vivre une belle fin de saison.
Quand on regarde les résultats de Châteauroux, on s’aperçoit que vous avez battu presque tous les gros…C’est vrai. Nous avons battu Brest (3-2), Sochaux (5-1), Reims (3-1), l’AC Ajaccio (2-1), Lorient (3-1), etc. Mais contre les équipes qui jouent le maintien, cela a été parfois plus compliqué. L’équipe a parfois été irrégulière, surtout pendant la phase aller. On ne défendait pas toujours tous ensemble. Mais le tir a été rectifié. Aujourd’hui, c’est plus équilibré. Comme nous possédons de bons joueurs dans toutes les lignes, cela se passe beaucoup mieux. On prend du plaisir, on marque des buts et derrière, c’est plus solide.
Vous avez découvert la Ligue 2 à 33 ans, en signant pour un promu. Vous n’avez pas eu une petite appréhension ?Absolument aucune ! Déjà, Châteauroux est un club qui a une longue expérience au niveau professionnel. C’est sérieux, sain, bien structuré. Et le fait qu’il soit promu ne m’a vraiment posé aucun problème. Pour moi, il y avait une priorité, jouer. On m’a présenté le projet, il m’a plu. On allait repartir avec des joueurs expérimentés et des jeunes, dont certains allaient découvrir la Ligue 2. C’était intéressant. De plus, l’entraîneur, Jean-Luc Vasseur, je l’avais connu à Reims, et cela s’était bien passé. Il m’a parlé de ce qu’il voulait mettre en place. Je venais de passer deux saisons en jouant très peu. Moi, j’aime trop le foot pour rester sur un banc. Je préfère donc être titulaire en Ligue 2 que compléter un effectif en Ligue 1 !
À Reims, c’est avec Olivier Guégan que votre situation a décliné. Et cela ne s’est pas vraiment arrangé à Angers avec Stéphane Moulin…Je ne suis pas là pour régler des comptes. Des choix ont été faits par certaines personnes. Bien sûr, pour moi qui aime tant jouer, c’était difficile à vivre. Être sur le banc ou dans les tribunes, ce n’est pas ce que je recherchais. Disons que j’ai fait de mauvaises rencontres…
Aller jouer en CFA 2 avec la réserve de Reims, vous farcir des heures de bus pour évoluer dans des petits stades, ce n’était pas trop frustrant ?Non ! Bien sûr, j’aurais préféré disputer des matchs en Ligue 1. Mais au moins, avec la réserve de Reims, je jouais. On a passé de bons moments avec Gaëtan Charbonnier, qui lui aussi était souvent envoyé en B, avec David Guion, le coach, et les jeunes joueurs. Pour moi, c’était beaucoup mieux d’aller jouer en CFA 2 que de rester dans les tribunes.
Quand on épluche votre CV, on se rend compte de deux choses : d’abord que vous n’avez pas la bougeotte, pour une carrière aussi longue. Ensuite que vous n’avez jamais joué à l’étranger, chose rare…L’étranger, j’aurais pu y aller et gagner plus d’argent. Mais, non seulement l’aspect financier n’a jamais été mon élément moteur, je voulais avant tout construire ma carrière en France. La Ligue 1 est un très bon championnat, un des meilleurs d’Europe. J’ai eu la chance de commencer ma carrière à Rennes, de la poursuivre au PSG, d’évoluer à Lorient sous les ordres de Christian Gourcuff, dont la conception du football correspond parfaitement à la mienne. J’ai connu des moments plus difficiles, c’est vrai. Mais je n’ai pas la bougeotte. Quand je suis bien quelque part, j’y reste.
Il y a un peu plus de dix ans, vous quittiez Rennes pour le Paris-SG, qui n’était pas encore ce qu’il est actuellement. Mais à l’époque, c’était quand même un club du haut du panier. Quel bilan en faites-vous ?Cela s’est plutôt bien passé la première année. J’avais la possibilité d’évoluer pour un grand club français, qui avait déjà gagné pas mal de titres. Je venais de passer plusieurs saisons à Rennes, où je jouais beaucoup. Je savais qu’aller au PSG, dans un contexte différent, avec plus de pression, plus de médiatisation, ce serait un nouveau cap, mais c’est exactement ce que je recherchais. J’étais international Espoirs. J’avais même reçu une pré-convocation pour un match de l’équipe de France, en février 2007 contre l’Argentine. Le problème, c’est que j’étais arrivé à Paris convalescent, à la suite de ma blessure aux croisés, cinq mois plus tôt. Malgré tout, la première saison, j’ai pu jouer régulièrement (30 matchs toutes compétitions confondues, ndlr). Mais ensuite, mon temps de jeu s’est réduit (7 matchs en 2009-2010), il fallait donc partir.
Quand vous signez à Lorient, les Merlus sont promus. Passer du PSG à Lorient, ce n’est pas franchement une progression…Je n’ai pas un ego surdimensionné. Je n’avais plus de temps de jeu au PSG. Que fallait-il faire ? Y rester et ne pas jouer ? Ou aller dans un club qui me voulait, avec un coach (Christian Gourcuff) dont j’aime l’idée qu’il a du football. Je n’ai pas hésité, et j’ai eu raison. J’ai passé quatre très belles saisons à Lorient. J’ai joué, j’ai pris du plaisir, autant en match qu’à l’entraînement. Gourcuff m’a beaucoup fait progresser, notamment tactiquement. C’était un vrai régal de travailler avec lui. C’est un entraîneur qui a marqué ma carrière. Il a beaucoup compté pour moi. Comme Vahid Halilhodžić, qui m’a lancé en Ligue 1. Il était autoritaire, c’est vrai, mais moi, j’étais jeune, et il me faisait confiance.
Avez-vous une idée de ce que vous ferez à la fin de votre carrière ?J’ai encore envie de jouer. Tant que la tête et les jambes suivent… J’ai signé deux ans à Châteauroux. Je ne me fixe pas de limites. Une chose est certaine : je resterai dans le foot, mais pas en tant qu’entraîneur. Il y a beaucoup trop de contraintes. Il faut souvent bouger. Et moi, je suis marié, j’ai deux enfants, je n’ai pas envie d’imposer certaines choses à ma famille.
On vous entend peu, on vous voit peu. Recherchez-vous ce relatif anonymat ?Je suis assez discret de nature. Je n’ai jamais recherché la médiatisation, même si je vous réponds avec plaisir. J’aime le football, le jeu, mais un peu moins certains de ses à-côtés.
Le Paris-SG d’aujourd’hui n’a plus grand-chose à voir avec celui que vous avez connu. Quel regard livrez-vous sur son évolution ?En tant qu’amoureux du football, je ne peux que me réjouir que des joueurs tels qu’Ibrahimović, Cavani, Thiago Silva ou Neymar évoluent en Ligue 1. Il y a quelques années en arrière, c’était inconcevable. Cela permet à notre championnat d’être plus relevé, plus médiatique. Tant mieux. J’espère que cela va continuer. Cela profite à tout le monde, au PSG, aux clubs qui le reçoivent, etc. Franchement, qui pourrait se plaindre de la présence de ces joueurs ?
Propos recueillis par Alexis Billebault