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ACTU MERCATO

Bouna Sarr peut-il se faire une place au Bayern Munich ?

Par Félix Barbé
7 minutes
Bouna Sarr peut-il se faire une place au Bayern Munich ?

Auteur de deux passes décisives pour sa première officielle avec le Bayern jeudi en Coupe d'Allemagne, Bouna Sarr a idéalement lancé son aventure munichoise. Si son transfert a pu surprendre et faire sourire, le latéral, qui a progressivement gravi les échelons depuis son échec au centre de formation de Lyon, n’a pourtant rien volé à personne. En Bavière, il aura à cœur de prouver que la blague à laquelle tout le monde rigole n’en est finalement pas vraiment une.

C’est une nouvelle qui a fait marrer beaucoup de gens. Il y a une grosse dizaine de jours, à quelques heures seulement de la clôture du mercato estival 2020, le Bayern Munich annonçait le recrutement surprise de Bouna Sarr. Surprise, c’est en effet le terme adéquat. Qui aurait pu croire que le latéral droit, dégagé du centre de formation de l’OL à l’adolescence, passé par la case National ensuite avec le FC Metz, et enfin moqué à ses débuts à l’Olympique de Marseille, signerait un jour chez le champion d’Europe en titre comme doublure d’un champion du monde, Benjamin Pavard ? En dehors de ses proches et de ses formateurs, certainement pas grand monde.

L’atout polyvalence

Willy Sagnol, qui connaît le club sur le bout des doigts pour y avoir joué près de 300 matchs avant d’occuper un poste d’adjoint pendant quelques mois en 2017, fait partie des premiers étonnés : « Le choix de Bouna Sarr est surprenant dans la « culture » Bayern, car c’est un joueur plus âgé que celui qui doit être titulaire. Il a déjà 28 ans et n’est pas international. » Le marché des arrières droits ne regorgeant pas d’opportunités, les dirigeants bavarois se seraient-ils alors rabattus sur le Franco-Guinéen-Sénégalais par défaut ? « Je ne sais pas, mais à la rigueur, pour le joueur, c’est tant mieux, poursuit le latéral historique du Rekordmeister. On n’est pas forcément le premier choix quand on démarre en pro ou qu’on signe dans un club. Parfois, il peut y avoir des blessures ou des circonstances qui font qu’on se retrouve là. Ça, c’est l’histoire du football ! »

Ce lundi, lors de la conférence de presse de présentation de Sarr, le directeur sportif du Bayern en a dit plus sur le choix de faire confiance à l’ex-Marseillais : « Bouna a des qualités offensives, il a un bon cardio et est très agile, a confié Hasan Salihamidžić. Nous trouvons aussi qu’il est bon dribbleur. Avec lui, le coach a une bonne alternative au poste de latéral droit. C’est un profil différent de celui de Pavard. » Un avis corroboré par Franck Passi, qui a connu le joueur à l’OM : « Si c’était pour aller prendre le même joueur, ce n’était pas la peine. C’est un profil qui leur permettra de jouer avec des latéraux plus offensifs face à des équipes regroupées. » De son côté, Sagnol promet que la polyvalence du garçon jouera en sa faveur : « Il a l’avantage de pouvoir jouer dans une défense à quatre, une défense à trois en occupant le couloir, ou au milieu sur un côté dans un 4-4-2. Il a plusieurs cordes à son arc et c’est aussi ce que recherchent certains clubs. »

Le Bayern est une équipe toujours en domination, qui part du principe que les défenseurs vont souvent se retrouver en un contre un. Ça fait appel à beaucoup de réflexion tactique, et je ne pense pas que Bouna ait eu ce genre de questions à se poser à l’OM, qui évoluait assez bas.

Une assimilation tactique défensive qui pose question

Reste à savoir comment l’ancien Messin va pouvoir s’intégrer tactiquement dans la philosophie bavaroise. « Sur son apport offensif, je ne me pose pas de question. C’est un joueur qui a un gros volume de jeu et il profitera naturellement du système et de l’animation », assure Sagnol, en précisant que Bouna devra malgré tout « progresser sur la qualité de ses centres ». La plus grosse interrogation de l’ancien coach des Girondins de Bordeaux se situe surtout derrière : « Le Bayern est une équipe toujours en domination, qui part du principe que les défenseurs vont souvent se retrouver en un contre un, et qu’ils vont ainsi devoir être capables de résoudre les équations posées, parfois même par de l’infériorité numérique. Ça fait appel à beaucoup de réflexion tactique, et je ne pense pas que Bouna ait eu ce genre de questions à se poser à Marseille. Ce n’était pas la philosophie de jeu de l’OM, qui évoluait plutôt assez bas. Désormais, pour défendre, il n’aura plus la même densité. Il va souvent se retrouver seul. C’est là où ça va être le plus dur pour lui. » D’autant qu’il apparaît plutôt comme un numéro trois qu’un numéro deux si on considère que selon l’adversaire et l’enjeu, en cas d’absence de Pavard, c’est peut-être Kimmich qui pourrait reprendre le poste.

Dans tous les un-contre-un que vous jouez à l’entraînement, vous êtes opposés à des garçons qui sont champions d’Europe. Il va forcément s’améliorer individuellement avec eux.

Des étapes difficiles, le Lyonnais de naissance en a déjà surmonté un paquet dans sa carrière pour se faire un trou dans un milieu qui lui était fermé. La dernière en date ? Un gros boulot abattu à Marseille pour assimiler son nouveau poste de latéral – lui l’attaquant d’origine – et continuer à avoir du temps de jeu. Par son travail, il a réussi à évoluer positivement et va continuer à le faire, selon Passi, pour gommer les quelques failles qu’il peut encore avoir en défense : « Quand vous vous entraînez avec les joueurs du Bayern, vous progressez tous les jours, souffle-t-il. J’avais remarqué ça avec Marcelo au Real Madrid. Sur ses deux ou trois premières saisons avec le groupe pro, il a énormément progressé défensivement. Dans tous les un-contre-un que vous jouez à l’entraînement, vous êtes opposés à des garçons qui sont champions d’Europe. Il va forcément s’améliorer individuellement avec eux. » Le coach récemment passé par Niort n’hésite d’ailleurs pas à faire un parallèle avec la trajectoire d’un historique latéral marseillais : « Lorsque Jocelyn Angloma est arrivé à Marseille, il faisait des erreurs tactiques. Finalement, il s’est retrouvé en équipe de France… »

L’exemple Ocampos

Sans aller, pour le moment, jusqu’à parler des Bleus, Sarr peut-il vraiment prétendre à autre chose qu’une place de remplaçant à laquelle il semble promis en Bavière ? « C’est dur de prédire l’avenir, tempère Sagnol. Quand Miroslav Klose est arrivé au Bayern, on n’aurait jamais pensé qu’il allait être très souvent remplaçant. C’était le meilleur attaquant au monde, on croyait qu’il avait la qualité pour s’imposer, mais il ne l’a jamais fait. S’imposer dans un grand club, ce n’est pas que des questions de profil et de potentiel. C’est aussi des questions de travail au quotidien, de rigueur, et puis parfois d’un petit coup de chance s’il y a des blessés ou des méformes. S’il est au bon endroit au bon moment, pourquoi pas ? » L’avis est bien plus définitif chez Franck Passi : « C’est un joueur qui est très peu blessé, et je suis certain qu’il va jouer 25 ou 30 matchs cette saison », tranche-t-il.

Et si Bouna Sarr marchait sur les traces de son ancien partenaire Lucas Ocampos ? Pas spécialement extraordinaire à l’OM, où l’on louait plutôt son état d’esprit que son apport technique, l’Argentin est devenu l’un des piliers du Séville FC, qu’il a mené jusqu’à un titre en Ligue Europa la saison passée. Conscient des qualités du garçon, Sagnol est en tout cas persuadé que le joueur de 28 ans est en capacité de rendre de braves services au Rekordmeister. À condition de rentrer dans sa nouvelle aventure le couteau entre les dents : « Il ne faut pas qu’il regarde ce club avec des grands yeux en étant impressionné. Au contraire, il faut qu’il montre chaque jour qu’il a énormément d’ambition, conseille celui qui a porté 277 fois ce maillot. Il doit avoir cette approche très rapidement. Mais c’est un joueur qui a l’air mature dans sa façon d’appréhender son métier. Ça va être son atout numéro un, plus que ses qualités intrinsèques. » Ses qualités, l’Allemagne ne demande qu’à les découvrir. Et il n’est pas dit qu’elle ne tombe pas sous le charme.

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Par Félix Barbé

Tous propos recueillis par FB, sauf ceux d'Hasan Salihamidžić.

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