- Ligue 1
- 9e journée
- Reims/OGC Nice
Bosetti, l’apprenti Inzaghi
Si le stade du Ray se réjouit de voir l'ancien xeneize Dario Cvitanich scorer des pions et réussir son adaptation, les puristes de la Côte d'Azur ne jurent que par un seul attaquant : Alexy Bosetti. À 19 ans, l'ancien abonné de la Brigade Sud Nice grignote du temps de jeu en L1 et séduit son monde avec son profil à la Super Pippo.
Faire le portrait d’un gamin de 19 ans qui n’a disputé que 203 minutes en L1 et une poignée d’autres dans les deux coupes nationales sans trouver le chemin des filets, en voilà une drôle d’idée. « Le meilleur moyen de le cramer, que de l’exposer si jeune » , va-t-on encore jaser ça et là. Pourtant, s’intéresser à Alexy Bosetti, c’est se pencher sur un cas d’une espèce menacée de disparition. Et ce, au moins pour deux raisons : sa chair marquée au fer rouge et noir et ce don pour être un renard des surfaces comme on n’en fait plus (voir So Foot n°90). Ah oui, il y en a aussi une troisième : les supporters du Gym ne jurent que par lui pour l’avenir du club. À décrypter sa trajectoire, on les comprend.
Car le garçon estampillé « made in Nice » est le meilleur représentant de la prometteuse génération 1993, qui est allée gagner au stade de France en mai dernier la première Gambardella de l’histoire du club, aux dépens de Saint-Étienne (2-1). Sur l’ensemble de l’épreuve, l’équipe dirigée par l’actuel adjoint de Claude Puel, Guy Mengual, se distingue par sa qualité, mais aussi ses deux fers de lance : son capitaine Dao Castellana, qui commence à faire pointer sa patte droite pas maladroite en L1, et son buteur maison, auteur de dix pions sur l’ensemble de l’épreuve et de plus de trente filoches sur la saison en U19 et en CFA2.
Né hors-jeu ?
Josselin Henriot est éducateur à Louhans-Cuiseaux et a vu son équipe ravagée par l’ouragan Alexy en seizièmes de finale. En ce dimanche du mois de février, Bozzo le clown joue un drôle de tour en se bagarrant comme un chien pour ses couleurs et en claquant l’intégralité des quatre buts de sa team : « Il est au-dessus et réalise des gestes de grande classe. Je me souviens que, sur ce match, il ne frappe pas plus de cinq fois en 90 minutes. Et sur ses quatre buts, il nous met deux lobs sur des piqués à l’entrée de la surface, qui finissent sous la barre à chaque fois. C’est quelque chose que certains pros ne font pas. » Une majorité d’attaquants de L1 plutôt, non ?
Ajoutées à ça une vista et une roublardise qui le font se faufiler à grands coups de subtils crochets entre les sangsues qui le collent ou ce sens inné pour partir sur la même ligne que le dernier défenseur, et vous obtenez un cocktail qui rappelle l’incarnation du cauchemar des charnières centrales européennes des années 1990 et 2000. « C’est fou… À chaque fois, tu as l’impression que ton dernier défenseur est au moins un mètre devant, mais il est tellement intelligent dans ses déplacements et ses appels que c’est qu’un effet d’optique. C’est vrai qu’il y a comme un air de ressemblance avec Inzaghi » , analyse Josselin Henriot. Le nom de son idole est lâché. De là à dire, comme l’avait fait Sir Alex à l’égard Super Pipo, qu’il serait né hors-jeu…
Un aiglon tatoué sur le cœur
Même gabarit, même propension à prendre les arbitres assistants et les défenseurs adverses pour des jambons, même sens de la finition, la ressemblance est troublante. À ceci près que le deuxième buteur de l’histoire des coupes d’Europe a swingué entre les clubs transalpins, quand Bosetti risque de rester encore un paquet d’années sur la baie des anges. S’il n’explose pas trop fort. Pourquoi ? Un certain attachement à sa ville de toujours. C’est au Cavigal, un club formateur du Vieux Nice réputé pour avoir révélé Robert Herbin, Dominique Baratelli, Daniel Sanchez ou Éric Roy, que le minot devient un tueur devant le but. « Je me souviens d’un jour où je le mets sur le banc à Nîmes. On était en panne offensivement depuis quelque temps. On est menés 1-0. Alexy entre à la mi-temps et égalise d’un superbe but. On gagne finalement 2-1. Il avait eu une envie énorme. À la fin du match, il vient me voir et me sort, tout fier : « Alors, il n’y a pas d’attaquant dans l’équipe, coach ? » » , se marre Roland Chircop, éducateur durant trois saisons et intime de la famille.
Mais plus que de s’aguerrir sur le pré, Bosetti enfant est aussi un amoureux de son OGC Nice, qu’il suit assidument depuis les années de D2. « Il fréquente le stade du Ray depuis ses toutes jeunes années avec son père. Je me souviens qu’à chaque fois qu’on terminait nos matchs, il se dépêchait de trouver un moyen pour aller voir le Gym » , abonde Roland Chircop. Le virus l’attrape tellement qu’il passe de la seconde basse à la populaire sud et la BSN à l’âge de 16 ans. Encarté et même supporter à vie. Peu après, Bosetti se fait tatouer un aiglon sur la poitrine. Le tout surmonté de deux mots qui le guident sur un terrain comme dans la vie : « Mentalita Nissarda » .
Par Arnaud Clement