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- 10e journée
- Bastia/Bordeaux
Bordeaux bouffe le micro
Les Girondins (6e, 15 points), qui se déplacent à Bastia dimanche (17h00), préfèrent jouer sur le terrain des médias, plutôt que de se focaliser sur leur adversaire. Stratégie oblige. Forts d’un bilan de début de saison jugé « positif », ils jouent leur partition à fond. Et livrent peut-être là leur meilleur match de la saison…
Avec trois pauvres victoires au compteur, les Girondins font figure de parent pauvre en Ligue 1. Un paradoxe, pour l’un des budgets les plus conséquents du plateau. Bon, zéro défaite – à égalité avec le PSG – et six nuls – à égalité avec Nice –, c’est pas catastrophique non plus. Seconds du groupe en Europa Ligue, c’est bien aussi. Mais au Haillan, ça craint de plus en plus et ça se ressent jusque dans les discussions entre staff et journalistes, notamment. Et même si, d’une manière générale, les relations sont traditionnellement bonnes, les relents de paranoïa ambiants post Blanc et post Tigana deviennent soûlants. Le « bougonnage » chafouin exercé aussi. Et c’est dans ce climat que les Marine et Blanc se préparent pour défier Bastia dimanche, à Furiani. Tout un programme.
Le boring Bordeaux
Parce qu’à Bordeaux, le peuple attend mieux, plus et encore mieux. Voire plus. Mais mieux. Marre de voir un club 6 fois champion de France, 3 fois vainqueur des Coupes de France et de la Ligue et finaliste européen, se traîner avec nonchalance. Marre du « boring Bordeaux » , de celui qui laisse l’étrange sensation que ça aurait pu être mieux. Toujours mieux. Ou pire, d’ailleurs. Des retours au score bien trop nombreux de la part de l’adversaire, des déceptions concédées dans l’extra-time, des amorces de jeu sympa et prometteuses galvaudées par des problèmes de coordination. Et bouquet final, des buts… manqués : 11 seulement inscrits en 9 rencontres. Etc. Avec pour meilleure gâchette, Ludovic Obraniak (3), milieu de terrain parfois aligné en récupération ! Bref, Bordeaux, c’est l’élève qui a du potentiel, mais qui stagne. Quant à savoir pourquoi…
Pourtant, tout ça, c’est gentiment analysé ou sobrement dénoncé par les plumitifs du coin. Sans haine, sans fausse note. Alors, de l’autre côté du micro, on se défend comme on peut. Avec condescendance, aussi, ça arrive, ou mutisme contrôlé. Parce que le coach, assez sympa de nature, il sait jouer avec la presse. Le capitaine, lui, très bon communiquant quand il le souhaite, opte pour le forfait « quatre minutes maxi » en communications locales. Et de temps en temps, ça fuse. « Peut-être qu’on n’est pas capable de faire mieux, mais on reste sur vingt et un matchs et une défaite, et je trouve que c’est pas si mal que ça, argumente Francis Gillot. Maintenant, on peut faire vingt et une victoires, évidemment. Mais il faut quand même savoir qu’il y a un an jour pour jour, on était dernier. Aujourd’hui, on fait la Coupe d’Europe, on reste sur une belle série, et j’ai l’impression qu’on n’est jamais content. C’est le constat que je fais. »
« Il y a un décalage entre ce que vous, les journalistes, pensez, et nous, qui sommes à l’intérieur. »
On appuie sur une touche et le père Gillot, il démarre au quart de tour, donc. « Évidemment qu’on peut faire beaucoup mieux, mais contentez-vous de ce que vous avez, parce qu’aujourd’hui, on ne peut pas faire beaucoup mieux. » Bon, c’est pas très clair tout ça, mais on comprend le fond du raisonnement. « C’est notre façon de penser, celle des joueurs et du staff » , ajoute, sec, le coach. Par conséquent, Bordeaux : gagne-petit ou roublard ? Un peu des deux, probablement. Ça dépend de l’humeur. « Après un nul en Coupe d’Europe, vous êtes déçus (1-1 à Funchal, face au Maritimo, ndlr), et nous, bien sûr aussi qu’on l’est, reprend-il. Mais pourquoi ? Parce que peut-être que celui qui a posé la question ne connaissait pas la valeur de cette équipe. (…) C’était comme ça également après le nul à Valenciennes(0-0, 5e journée)… Ben non, on n’est peut-être pas déçu, parce que derrière, Marseille en a pris quatre, et Lorient, six… Voilà, c’est peut-être pas si mal que ça de faire nul ! Il y a un décalage entre ce que vous pensez, et nous, qui sommes à l’intérieur. » Dont acte.
Zone mixte = zone à risque. Et qui s’y frotte s’y pique. C’est la règle du jeu. Parce que le bon Francis, en fait, il s’amuse… Ce qui ne l’empêche pas d’être lucide. « On a de grosses difficultés à marquer, et de grosses à ne pas prendre de buts, mais malgré ça, on reste sur vingt et un matchs sans défaite (sic). Donc, vu tous les problèmes qu’on a, c’est pas si mal. » Pas faux. Mais en fait, il y a des problèmes. Donc, la presse n’a pas complètement tort… Et ce week-end, face à un adversaire coriace (12e, 11 points) chez lui, le technicien caustique s’attend à « une réception chaude » et à un « combat physique » . C’est la moindre des choses. Pas l’idéal pour se refaire une santé. Mais Bordeaux, ça reste Bordeaux. Et Bastia, c’est « une équipe à notre portée » , confie Nicolas Maurice-Belay, plus pointu quant à la situation actuelle des siens. « Si on est plus exigeant avec nous qu’ailleurs, c’est parce que c’est l’histoire du club qui veut ça, explique le milieu de terrain. Il y a un passé ici, notamment de champion, donc d’une certaine manière, il est normal que lorsque l’on fait match nul contre Brest (1-1, 8e journée), on ne soit pas contents. » Content, pas content, difficile de s’y retrouver. Gageons qu’au sortir de la rencontre, le coach et ses joueurs tiendront le même discours. Celui de la victoire retrouvée…
Par Laurent Brun, à Bordeaux