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Bonucci, au creux du creux de la vague
Encore sacrée en Italie, mais seulement troisième meilleure défense de Serie A, la Juventus n'avait plus encaissé autant de buts en championnat depuis l'exercice 2010-2011. Une dégringolade symbolisée par les difficultés de son capitaine, Leonardo Bonucci, qui n'a jamais été aussi fébrile au sein des lignes arrière. Lyon sait où appuyer s'il veut faire mal à la Vieille Dame.
Il n’a pas encore tracé sa ligne d’arrivée. À 33 ans bien tassés, Leonardo Bonucci entrevoit désormais sans doute le bout de l’histoire, mais se projette d’abord sur le chemin qui lui reste à parcourir. Face à Lyon ce vendredi, il s’attaquera à la dernière grande obsession de sa vie de footballeur, cette Ligue des champions qui résiste à la Juventus depuis 1996. Mais pour se hisser à nouveau sur le toit de l’Europe, la Vieille Dame aura besoin que son taulier retrouve un peu de hauteur. Car pour l’instant, l’exercice en cours est pour Bonucci la saison qui vient confirmer son inévitable déclin.
Une chute et des stats
Ces derniers mois, le contenu des matchs du vétéran de la Juve a trop souvent laissé une impression d’inachevé, comme un brouillon mal griffonné ou une conclusion bâclée. Si sa qualité de relance reste globalement intacte, ses prestations défensives ont tracé les contours d’un joueur à l’équilibre instable, plombé par une lecture du jeu inégale, un placement hasardeux et une science du duel déficiente. Pour se convaincre plus concrètement des insuffisances actuelles de Bonucci, il suffit de se plonger dans la marée des statistiques compilées sur la Juve en Serie A cette saison. Avec seulement 63% de duels défensifs gagnés, Bonucci n’est que le cinquième meilleur joueur turinois dans cet exercice, parmi les Bianconeri qui ont disputé au moins 10 matchs en Serie A cette saison. À titre de comparaison, Rugani et De Ligt, les deux défenseurs centraux qui ont eu le plus de temps de jeu avec Bonucci, culminent eux à respectivement 74% et 71% de duels gagnés.
Bonucci n’est pas plus à son avantage quand il s’agit de se castagner dans les airs. Du haut de ses 64% de réussite, il fait notamment moins bien que Rugani, Sandro, De Ligt, De Sciglio et même Danilo. Les carences de Bonucci sont par ailleurs d’autant plus évidentes lorsque les performances de l’international transalpin sont évaluées à la mesure de celles de De Ligt, son nouveau partenaire privilégié dans l’axe cette saison. Après un début d’exercice 2019-2020 difficile, le Néerlandais est notoirement monté en puissance. Là encore, les chiffres ne mentent pas : en 3086 minutes de jeu disputées en championnat, Bonucci a récupéré 302 ballons. De Ligt, lui, n’en a subtilisé que 4 de moins (298), en seulement 2448 minutes jouées en Serie A.
Un Giorgio vous manque et tout est dépeuplé
Alors, Leonardo Bonucci est-il bon pour la casse ? Difficile à dire. Dans un souci d’équité, il convient aussi de souligner que le bonhomme n’est pas aidé par certains de ses partenaires au sein des lignes arrière. Juan Cuadrado a souvent été aligné par Sarri à un poste d’arrière droit qui n’est pas le sien, Danilo n’a rien montré de réellement probant, et Alex Sandro livre une saison sans relief sur son côté gauche. Difficile, aussi, de ne pas corréler les 43 buts encaissés par la Juve en Serie A (soit le pire bilan défensif du club depuis 2010-2011) au manque de complémentarité de Bonucci avec De Ligt, dont les profils techniques semblent s’annuler plus que se compléter.
Tout le contraire de l’association historique de Bonucci avec Giorgio Chiellini, avec qui il formait un couple symbiotique, le profil de libéro du premier se mariant parfaitement avec la science du duel survitaminée du second. L’indisponibilité prolongée de l’ami Giorgio semble de fait avoir achevé de fragiliser Bonucci, que certains observateurs décrivaient déjà sur la pente descendante depuis une, voire deux saisons et son passage raté à l’AC Milan. Quoi qu’il en soit, on imagine mal la Juventus passer l’obstacle Lyon et surtout continuer de rêver de Ligue des champions, si Leonardo Bonucci ne parvient pas à soudainement redevenir le fabuleux défenseur qu’il a été par le passé.
Par Adrien Candau