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Bonnie & Clyne

Par Romain Duchâteau
Bonnie & Clyne

Nathaniel Clyne n'a que 24 ans, mais il est déjà considéré outre-Manche comme l'un des meilleurs latéraux droits. Le joueur de Southampton, à qui l'on prédit un avenir radieux, a pourtant connu des débuts tumultueux. Partiellement formé dans l'atypique Afewee Academy, il a été recalé par Arsenal et Tottenham, avant que Crystal Palace ne lui donne sa chance. Aujourd'hui, l'Anglais a parcouru du chemin et n'est perçu ni plus ni moins que comme la relève la plus crédible depuis la retraite internationale de Gary Neville.

Certains voient dans les tatouages le seul moyen idoine d’orner leur corps, de le considérer presque comme une œuvre d’art. D’autres, moins étouffés par la prétention, les choisissent pour leur aspect symbolique. Regarder les bras de Nathaniel Clyne revient à raconter une histoire. Parce que les dessins marqués à vie à l’encre du jeune latéral droit anglais laissent deviner, ou du moins entrevoir, ce qu’il est. Il y a d’abord cet enfant en couche-culotte, reproduction tirée d’une photo de lui-même plus jeune qui décore aujourd’hui la cheminée de sa mère, accompagnée en dessous d’une formule lapidaire : « Baller from birth » (en français, « Fonceur depuis la naissance » ). Puis il y a cet autre dessin, tout aussi personnel, représentant le logo de la célèbre station de métro Stockwell, nom de sa ville natale. « Je suis fier d’où je viens, martelait-il en novembre dernier au Guardian. Je me souviens plus jeune qu’il y avait des panneaux indiquant « pas de jeux de ballon » jusqu’à ce que nous soyons suffisamment nombreux pour qu’ils les enlèvent. Par la suite, ils ont construit un terrain urbain adapté pour le football et d’autres jeux afin que le ballon ne sorte jamais. Depuis le début, j’ai toujours voulu être joueur de football. »

« J’ai récupéré Nathaniel à Somerleyton, une cité dure où les gamins jouent du flingue »

Mais chaque objectif est soumis à l’incertitude et aux vicissitudes du destin. Chaque parcours offre sa part de singularité. Et celui de Nathaniel Clyne prend source à Somerleyton, une cité malfamée de Stockwell. Amoureux du ballon rond depuis ses premiers pas, le gamin s’accroche à sa passion pour éviter les mauvaises fréquentations. Sa mère veille également à ce que sa progéniture ne dévie pas de sa route. « Elle faisait toujours attention à ce que je reste sur la bonne voie. Si je m’écartais de cette ligne de conduite, elle me foutait des gifles jusqu’à ce que je retrouve mes esprits » , racontait-il il y a quelques semaines lors d’un entretien accordé au Telegraph. Mais celui qui va véritablement jouer un rôle majeur dans son parcours se nomme Steadman Scott. Ancien taulard et membre d’un gang, l’homme a créé il y a plus de seize ans une académie de football atypique, l’Afewee Academy, située tout près de Stockwell, à Brixton. Cette académie, où des enfants de cinq à seize ans sont formés, éduqués et instruits, présente la particularité d’être une organisation à but non lucratif.

« J’ai récupéré Nathaniel à Somerleyton, une cité dure où les gamins jouent du flingue. Un endroit infesté de gangs, se souvenait son mentor pour le Guardian, en octobre 2014. La police payait Fulham à une époque pour mettre en place un programme estival et éviter que les enfants ne traînent dans la rue. Un jour, je suis allé à la Hill Mead School pour eux, et ce gamin était là : ce petit garçon, vraiment bon avec le ballon, très calme, très performant, avec une bonne attitude. Je lui ai dit que je cherchais un groupe de jeunes pour les former à l’Academy et que si un club est à la recherche de talents, je pourrai leur montrer les meilleurs garçons que nous avons. » Séduit par la progression de son bambin, Scott l’envoie faire un essai à Arsenal. Malgré quatre buts inscrits au cours d’un match, les Gunners ne le gardent pas, le jugeant trop petit (Clyne mesure aujourd’hui 1m75, ndlr). Tottenham lui offrira également l’occasion de se mettre en évidence, mais le dénouement sera similaire.

Formation terminée à Crystal Palace et envol à Southampton

C’est finalement Crystal Palace qui lui ouvre ses portes en 1999, à l’âge de huit ans. D’abord attaquant, Clyne recule ensuite comme ailier avant de se stabiliser définitivement au poste de latéral droit. À dix-sept piges au compteur, il commence en professionnel et fait l’apprentissage des joutes rugueuses en Championship. « Je l’ai connu lorsqu’il venait juste de débuter sa carrière professionnelle, se remémore Léandre Griffit, ex-partenaire du défenseur chez les Eagles, désormais à l’AS Aulnoye (CFA 2). Quand j’étais dans l’équipe première, il était avec les U18, les U19. Il est issu de la même génération que Victor Moses. Il a commencé à s’entraîner avec nous, puis à jouer. Mais je le trouvais vraiment très frileux au départ. Puis il y a eu un blessé de longue durée et il en a profité pour jouer. Il a pris sa chance et l’a méritée, parce que c’était un bon joueur. » Progressivement, il s’enhardit et devient un titulaire inamovible à Palace, disputant ainsi 122 rencontres en quatre saisons. « Il a des qualités très anglaises :box to box, courageux dans l’effort. Quand je jouais, j’évoluais en tant que milieu droit. Mais le coach me disait de ne jouer que dans l’axe. C’est un joueur qui prend toujours le couloir, ajoute Griffit. C’est aussi le cas aujourd’hui, on lui laisse tout le côté droit. Il joue presque latéral/ailier en quelque sorte. Ça montre qu’il a du coffre. Pendant quatre-vingt-dix minutes, il monte pour centrer, mais redescend pour venir défendre. C’est un bon défenseur, bon sur ses appuis et difficile à passer en un contre un. Un profil vraiment complet. »

Suffisamment aguerri à la seconde division anglaise, le latéral britannique décide de rejoindre libre Southampton à l’été 2012. Dès lors, Clyne va peaufiner ses qualités, apprendre l’exigence que requiert la Premier League et se révéler aux yeux du grand public grâce à des performances saisissantes. « Crystal Palace a une très bonne académie et est notamment connu pour former des joueurs assez techniques. Et Clyne a cette qualité-là par rapport à d’autres joueurs anglais, souligne Griffit. Techniquement, on voit qu’il possède un bon pied droit et qu’il est très à l’aise, au-dessus de la moyenne pour un latéral. Mon pote José Fonte, qui est capitaine à Southampton, m’a aussi récemment dit qu’il avait vraiment changé physiquement. Par rapport à ses débuts, il est devenu assez robuste, assez costaud. En trois, quatre ans, il s’est étoffé. » Latéral moderne qui comble son manque d’impact physique par sa vélocité, l’Anglais n’a vu son ascension que légèrement contrariée par les blessures et l’éclosion de Calum Chambers, désormais à Arsenal, ces deux dernières saisons. Sa progression est telle que des cadors du Royaume se seraient déjà renseignés à son sujet en vue de l’enrôler au mercato estival.

La vraie relève chez les Three Lions ?

Pour entrer dans une autre dimension, il devra sans doute répondre favorablement aux sirènes d’un club de plus haut standing. Car le bonhomme n’a nullement caché ses desseins : il entend bien s’ériger comme le futur latéral droit de la sélection anglaise. Depuis Gary Neville, les candidats se sont succédé à foison, mais aucun n’a su donner satisfaction sur le long terme (Wes Brown, Micah Richards, Glen Johnson, Kyle Walker). Avec Calum Chambers – lequel peut évoluer comme arrière central ou arrière droit –, le joueur des Saints s’impose comme le candidat le plus crédible en vue de l’Euro 2016. Alerté par ses bons matchs, Roy Hodgson l’a pour la première fois appelé chez les Three Lions en octobre dernier. Avant de lui offrir sa première sélection un peu plus d’un mois plus tard lors de la victoire face à la Slovénie (3-1), dans le cadre d’un match de phase de groupes pour le prochain Euro. « Si j’ai la chance de jouer, je vais essayer de prouver ce que je vaux. Être le premier choix à l’Euro, voilà mon objectif et je vais continuer à pousser pour, avouait-il, ambitieux, il y a quelques mois au Guardian. C’est en étant performant et en acquérant de l’expérience que je vais devenir un meilleur joueur. » À l’aube, sans doute, de connaître prochainement un tournant majeur dans sa carrière, Nathaniel Clyne ne se laisse pas griser par son ascension et n’oublie pas d’où il vient. Là où tout a débuté : « C’est là, à Brixton, que j’ai commencé à jouer au football. Ce serait donc bien que j’y retourne un jour pour discuter avec les jeunes, leur raconter mon histoire. » Celle d’un gamin qui a donné raison à la devise de l’Afewee Academy : « Making the impossible possible » .

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