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Bleus : milieu en jachère
Après quelques promesses en septembre, le milieu de terrain des Bleus n'a pas convaincu, ce lundi soir, face à la Turquie (1-1). Dans l'entrejeu, Corentin Tolisso et Blaise Matuidi n'ont pas retrouvé l'équilibre affiché contre l'Albanie, peut-être aussi à cause d'un système moins adapté pour le premier, souvent friand de libertés. Une nouvelle preuve que le duo Kanté-Pogba reste incontournable.
Dans le petit monde du foot, les absents n’ont pas toujours tort. Mieux, ils peuvent parfois avoir cette certitude que leur place n’est absolument pas menacée et que leur statut n’est pas près de changer. En équipe de France, N’Golo Kanté et Paul Pogba connaissent ces sensations, surtout ces derniers temps. Les deux compères n’ont pas joué une minute en sélection depuis la rentrée en septembre. Et si le premier faisait partie des vingt-trois pour ce premier rassemblement automnal, il n’a plus enfilé la tunique bleue depuis le 25 mars dernier. Ce soir-là, les Bleus donnent une leçon à l’Islande (4-0). Le duo au milieu de terrain ? Kanté-Pogba, évidemment. Deux indéboulonnables, deux hommes qui retrouveront tranquillement leur place dans le 4-2-3-1 de Deschamps dès leur retour. Car le sélectionneur n’a pas le temps de douter ou de bricoler, ni le besoin de nouveauté. La France dispose d’un réservoir conséquent dans ce secteur de jeu ? C’est vrai, mais DD a pu le constater ce lundi soir contre la Turquie : son milieu n’a pas la même gueule sans ses deux cadres, la paire Tolisso-Matuidi – parfois épaulée par Sissoko – n’ayant pas vraiment donné satisfaction. Et voilà la naissance d’une évidence : la paire Kanté-Pogba n’est pas près de disparaître.
Il y avait pourtant eu les belles promesses du mois de septembre au Stade de France. Sans les deux cadors, Deschamps a pu compter sur l’association Matuidi-Tolisso au milieu pour faire oublier les absents. Les deux joueurs avaient même été impeccables contre le bloc bas de l’Albanie (4-1), parvenant à trouver le bon équilibre entre le boulot monstrueux abattu par l’expérimenté de la Juventus et la verticalité proposée par le pensionnaire du Bayern Munich. « Coco est un milieu moderne, complet, il a une bonne densité athlétique et il est aussi intéressant dans la phase de récupération, s’était réjoui le technicien français au moment de rappeler celui qui faisait son retour après une grave blessure. À trois, il a plus de libertés, il aime bien ça, mais même dans un milieu à deux, il a cette capacité à orienter le jeu, faire des passes verticales, comme au Bayern. » Sauf que ce lundi soir, à Saint-Denis, Tolisso n’a pas fait parler ses qualités, et a surtout semblé incapable de retrouver ce fameux équilibre avec son collègue Matuidi.
Le bal des frileux
Les plus optimistes brandiront les statistiques flatteuses des deux joueurs pour valoriser leur performance : Matuidi a touché 95 ballons pour 95% de passes réussies, Tolisso a touché 115 ballons pour 89% de passes réussies. Propre, c’est vrai. Mais pour en faire quoi ? Pas grand-chose, en général. Le premier a déjà semblé moins essentiel, moins impressionnant aussi, que vendredi dernier, quand il avait retrouvé son côté gauche en Islande. Le second a déçu dans sa prise de risque, préférant souvent effectuer une passe latérale, plutôt que de faire parler son aisance technique et son volume de jeu pour casser les lignes turques. Une copie avec des ratures, mais aussi avec quelques bonnes idées en alternant jeu court et jeu long.
Et si le problème venait tout simplement des consignes du coach ? « Dans le système et dans la position où il joue avec nous, je suis un peu obligé de le freiner parce qu’il est attiré par les projections offensives » , avait prévenu Deschamps entre les deux rencontres du mois. Le principal intéressé n’a pas dit autre chose en zone mixte après le nul contre la Turquie : « Avec Blaise, on savait que c’était à nous de trouver les côtés, d’essayer d’organiser le jeu, de trouver des espaces. Après, c’était aux attaquants de faire le jeu offensif, le coach voulait qu’on reste plus derrière tous les deux pour ne surtout pas prendre de contres. » Une pointe de frilosité qui a souvent obligé Griezmann à redescendre chercher la chique pour lancer des offensives et la preuve que Deschamps n’est pas prêt pour laisser autant de libertés au jeune Tolisso (18 sélections) qu’il n’en laisse au taulier Pogba (69 sélections). Le regret, aussi, de ne pas avoir du tout vu Tanguy Ndombele. Mais voilà, le terrain a parlé et il a livré sa vérité : peu importe leurs prestations en club, les absents vont pouvoir dormir tranquilles jusqu’au prochain rassemblement. Et c’est peut-être aussi bien comme ça.
Par Clément Gavard, au Stade de France