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Bleus : Mbappé, le côté obscur
Pour son retour chez les Bleus après deux rassemblements manqués, Kylian Mbappé n'a pas brillé contre la Moldavie. L'attaquant parisien n'a jamais réussi à combiner avec les autres attaquants, la faute à un positionnement étrange et à un certain égoïsme dans son jeu. Le reflet du comportement de plus en plus détestable du champion du monde.
Dans le monde de Kylian Mbappé, la mesure n’existe plus. Depuis trois ans, le gamin de Bondy s’est habitué à cristalliser l’attention, comme s’il faisait partie du paysage footballistique français depuis plus d’une décennie. Le gamin est programmé pour l’anormal. Il s’est habitué aux éloges, aux compliments, aux records de précocité, et probablement à ce surnom insupportable qu’est « le petit génie français » . Il s’est tout simplement habitué à devenir incontournable, que ce soit en club comme en sélection. Après les pépins physiques et ses deux premiers rassemblements loupés depuis sa première cape en mars 2017, le retour de l’attaquant parisien chez les Bleus était forcément attendu. Didier Deschamps, lui, était plutôt content de retrouver son poulain : « Kylian, c’est Kylian. Il a eu sa première grosse blessure musculaire et pour un joueur rapide comme lui, c’est important. Sur le plan psychologique, il a peut-être eu quelques interrogations. Entre son envie de jouer et son physique, la sagesse a pris le dessus. Et là, il retrouve progressivement son meilleur niveau. » Ah, vraiment ?
Un positionnement en question
Pour retrouver la dernière titularisation de Mbappé sous le maillot bleu, il fallait remonter au 11 juin dernier. Cinq petits mois seulement, mais une éternité pour celui qui avait participé à trente-trois des trente-quatre dernières rencontres de l’équipe de France avant la rentrée. « J’espère qu’il est très motivé » , lâchait le capitaine Raphaël Varane mercredi. Comment ne pas l’être ? Face à une Moldavie d’une faiblesse inouïe, dernière du groupe derrière Andorre et pire défense avec vingt-deux buts encaissés, tout était réuni pour que le quatuor offensif Griezmann-Mbappé-Coman-Giroud se régale. Sauf qu’ils sont presque tous passés à côté, à commencer par le joueur du PSG. Les chiffres veulent dire beaucoup de choses : l’attaquant de 20 ans a touché 91 ballons, sans trop réussir à les bonifier. Il a aussi été très imprécis dans ses passes (79% réussies), comme dans ses dribbles (4 réussis sur 8 tentés).
Mbappé s’est beaucoup baladé sur le front de l’attaque contre la Moldavie.
Mais le terrain aussi veut dire beaucoup de choses. Le positionnement étrange de Mbappé a pu étonner pendant la rencontre. Souvent à droite en première période, où il n’a jamais réussi à combiner avec son latéral Pavard, ni avec les autres d’ailleurs, il s’est ensuite baladé sur le front de l’attaque, sans trop que l’on comprenne pourquoi. Un coup dans l’axe, un coup à gauche, il a énormément gêné ses compères, marchant sur les pieds de Griezmann et Coman, eux aussi pas du tout inspirés. Une stratégie étrange pour faire déjouer un bloc bas et regroupé. Et une certaine forme d’égoïsme aussi, Mbappé paraissant plus souvent jouer pour lui que pour le collectif. Sans surprise, à chaque fois que le natif de Paris s’est montré altruiste, jouant en une touche, il semait la pagaille dans la défense moldave, à l’image de son service pour Digne sur le penalty (77e). Les Bleus ne peuvent pas se priver d’un tel joueur, il est trop précieux. Mais au moment de faire le bilan de cette campagne, Deschamps pourra se souvenir de sa belle performance contre l’Islande en mars dernier, tout comme il pourra se rappeler que son équipe avait rarement été aussi séduisante dans l’animation offensive que face à l’Albanie en septembre. Sans Mbappé.
Un je dangereux
Cette prestation reflète aussi le comportement d’un joueur à l’ego surdimensionné. Un constat pas vraiment surprenant pour un joueur de 20 ans auquel on promet la gloire et les sommets. Mais un constat agaçant, tant dans son jeu que dans son comportement. Dès les premières minutes de la partie, Mbappé avait annoncé la couleur : il avait décidé de faire preuve de suffisance ce soir, de prendre de haut la petite 175e nation mondiale. Il avait aussi décidé d’oublier trop souvent ses partenaires, faisant le dribble de trop, la touche de balle de trop, la gourmandise de trop. Pénible pour les yeux. Mais il faut se rendre à l’évidence : la fraîcheur de ses débuts à Monaco a disparu, cette forme d’insouciance affichée au Mondial 2018 n’existe plus. Mbappé est dans une autre dimension, c’est un autre joueur, un autre homme. Sa carrure n’est plus la même, et il a envie de le montrer sur le terrain. Peut-être même un peu trop. Peu importe, il grignote les trophées et les records. Il a même été adoubé par Thierry Henry cette semaine, le melon d’une autre génération : « Tout le monde dit qu’il est jeune, de par son âge, mais il n’est plus vraiment jeune vu son nombre de matchs, son intelligence de jeu. On parle de sa vitesse, sa vitesse de pieds, ses dribbles, ses buts. Je pense qu’on va en parler pendant encore vingt ans. » Préparez vos superlatifs, la folie Mbappé est loin d’être terminée.
Par Clément Gavard, au Stade de France