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Bielsa, déjà très loin de Marseille ?
La défaite du week-end passé contre Lorient a sonné comme l'annonce d'une fin inéluctable. Marcelo Bielsa et l'OM, cela n'ira a priori pas plus loin que l'été 2015, la faute aux résultats, ainsi qu'à un vestiaire qui ne suit plus son entraîneur. Un échec annoncé dont le foot français a peut-être tort de se réjouir...
« Le week-end avait mal débuté pour nous, car vendredi soir, M. Bielsa avait décidé de se moquer du football, et Lorient avait profité de ces largesses venues d’ailleurs. » Battu samedi à domicile par Bastia (2-1), Pascal Dupraz l’avait mauvaise en conférence de presse. Dans son viseur, l’Argentin Marcelo Bielsa, coupable selon le coach d’Évian de saboter l’équité du championnat en envoyant Marseille dans le mur avec des principes de jeu suicidaires. Encore héros visionnaire fin mars, au soir d’une victoire contre Lens (4-0), El Loco est passé de mode au mois d’avril. La faute à quatre défaites consécutives qui ont éliminé l’OM de la course au titre et l’ont placé dos au mur concernant la lutte pour le dernier accessit en Ligue des champions. Suscitant ainsi une pluie de critiques plus ou moins directes à son intention.
Bielsa, Mélenchon et les baltringues
Pierre Ménès sur Twitter, Éric Di Meco sur RMC, et même Pascal Praud – bien remis de son passé de directeur sportif du FC Nantes – sur RTL qui a comparé l’Argentin à Jean-Luc Mélenchon : « C’est un prolo qui traverse la saison avec son survêtement, qui regarde les matchs sur une glacière de campeur, et qui est en conflit avec son président Vincent Labrune. C’est le délégué CGT qui dirige l’entreprise. » Aujourd’hui, peu d’observateurs épargnent Bielsa et ses méthodes d’un autre monde, pas même l’ancien président Pape Diouf qui, dans La Provence, a sous-entendu la supériorité du bilan d’Élie Baup, lequel « a qualifié le club en Ligue des champions » . Et ce, alors que la première saison de Bielsa n’est pas terminée…
Pour les spécialistes, c’est une évidence : l’ancien entraîneur de l’Athletic Bilbao ne rempilera pas, malgré les déclarations d’intention de Margarita Louis-Dreyfus et Vincent Labrune, la faute à un style devenu prévisible selon certains (Éric Di Meco sur RMC), à une cassure entre le technicien et une partie de son vestiaire selon L’équipe. En clair, à quatre journées de la fin, la saison marseillaise est terminée, Bielsa s’est planté, rideau. Une théorie soutenue par Daniel Riolo, l’un des rares à soutenir publiquement Bielsa aujourd’hui, dans une interview pour Le Phocéen : « Bielsa va s’en aller car il n’y arrivera pas avec ces mecs-là. Ils n’en peuvent plus, ils sont fatigués car il leur en demande trop » , qualifiant au passage les joueurs olympiens de « baltringues » …
Bielsa, la défaite du renouveau
Ce mercredi, en conférence de presse, l’intéressé a démenti toute rupture avec son groupe, s’obstinant à protéger ses joueurs tout en refusant d’évoquer son avenir. Dimitri Payet, lui aussi invité à s’exprimer devant la presse, s’est positionné sur la même ligne, rappelant le bon début de saison du club, et affirmant avec aplomb que « le message passe toujours » , et donc que les objectifs pouvaient encore être remplis, imputant la mauvaise passe actuelle à un simple accident. Un accident qui pourrait coûter une quarantaine de millions d’euros à l’OM, et peut-être beaucoup plus à un football français qui semble aujourd’hui se réjouir, à tort, des mésaventures de l’Argentin. Car en avril, son OM a finalement perdu soit contre plus fort (Paris), soit contre le cours du jeu (Bordeaux), soit sur de grossières erreurs individuelles (Nantes), voire sur une réussite insolente de son adversaire (Lorient). Assez injuste dans un tel contexte de tout jeter d’une méthode Bielsa qui, en début de saison, avait fait souffler un vent nouveau sur la Ligue 1.
Entre une philosophie de jeu ultra-offensive bienvenue, une conférence de presse restée dans les annales après le mercato, et la fameuse glacière bleue, l’Argentin apportait ce qui manquait à notre championnat : la volonté de faire passer la manière avant le résultat, de prôner l’évolution du jeu plutôt que les calculs à court terme, remettre le football à la place qui est la sienne, tout simplement. Aujourd’hui, la Ligue 1 est en passe de perdre un technicien de la trempe de Pep Guardiola ou Jürgen Klöpp, qui s’il n’a pas leur palmarès, assure le même registre d’entraîneur, faisant évoluer le jeu et les mentalités. Or, dans un pays où l’on a souvent un train de retard question football, seuls les supporters marseillais – toujours derrière l’entraîneur sud-américain -, ainsi qu’une minorité d’observateurs semblent avoir saisi que c’est le football français plus que Marcelo Bielsa qui aurait à perdre d’une rupture dès cette fin de saison. On n’a que ce que l’on mérite, dit-on, et peut-être que le football français ne mérite pas mieux que ses petites certitudes, son jeu sans prises de risque, et un palmarès européen qui n’a plus évolué depuis bientôt 20 ans…
Par Nicolas Jucha