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Bielsa : « Boca-River apporte des émotions qui valent la peine d’être vécues »
Depuis maintenant de nombreuses années, Marcelo Bielsa a choisi de ne plus accorder d’interview à la presse, par souci d’équité et de justice entre les médias. Par souci de justice et d’équité envers Marcelo Bielsa, So Foot publie in extenso les transcriptions de ses conférences de presse avec Leeds United. En tête du classement, Leeds affronte ce samedi West Bromwich, la meilleure attaque du championnat.
Est-ce qu’on peut parler du match des moins de 23 ans, que vous êtes allé voir cette semaine ? Un joueur vous a-t-il impressionné ?Au point de pouvoir intégrer le groupe ? (Marcelo Bielsa tripote une serviette en papier blanche, qu’il se met à rouler consciencieusement.) Ça fait partie de la routine d’observation de tous les joueurs que nous avons, et des jeunes qui se font remarquer. Il n’y a pas un footballeur en particulier qui ait valu ma présence là-bas, j’y suis allé pour voir l’ensemble du groupe.
Et vous avez été impressionné par ce que vous avez vu ?Non, non.
Non ? À cause de la défaite ?(Marcelo Bielsa sourit.) Commenter des défaites quand on peut l’éviter, vous pouvez imaginer que je préfère ne pas le faire. Quand ce n’est pas indispensable… (Il regarde le journaliste par-dessus ses lunettes.) Vous y êtes allé, vous ?
Non, je n’étais pas là-bas. Vous avez dit que tous les styles de foot se valaient, mais ressentez-vous la responsabilité d’apporter du spectacle, de la beauté, aux spectateurs ?Quand une équipe n’a pas ce qu’elle mérite, le public châtie tôt ou tard le manque de résultats. Et l’intolérance vis-à-vis du manque de résultat est plus marquée que l’intolérance vis-à-vis du manque de beauté.
Le public attend avec plus de tolérance que le jeu soit beau si les résultats sont bons. Je pense que l’industrialisation du football, la commercialisation du football, le fait que les clubs appartiennent à des personnes privées ont conduit à ce que le résultat soit au-dessus de tout. Mais ce qui rend le football attirant est la beauté du jeu. Donc ceux qui investissent dans le football devraient penser à ne pas dévaluer l’affaire qu’ils ont achetée. Parce que plus une équipe joue mal, moins elle attirera de supporters. Bien sûr qu’il y a des entraîneurs comme Guardiola qui combinent les deux choses. Il joue bien, il gagne, et il augmente la valeur du club dans lequel il travaille et celle des joueurs qu’il entraîne. Mais je crois que c’est une obligation pour tous d’établir une… de remettre en question la primauté du résultat sur la beauté du jeu. Je ne sais pas si l’analogie est bonne, sûrement que non, elle est sans doute disproportionnée, mais les conséquences du manque de respect de nos contemporains pour l’environnement se verront dans le futur et ce sont nos enfants qui en payeront le prix. Et je pense que quelque chose comme ça se passe avec le football. Nous sommes en train de le détruire et l’effet se verra plus tard. Et la responsabilité appartient à ceux qui ont le pouvoir. Nous avons du pouvoir, les entraîneurs ont du pouvoir, les propriétaires ont du pouvoir, les médias ont du pouvoir, et les supporters ont du pouvoir, mais ne l’exercent pas.
Cette année, on a autorisé l’utilisation de certaines technologies sur le banc (ordinateurs, tablettes, etc). Qu’est-ce que vous utilisez de votre côté pendant les matchs ?Je n’utilise aucune technologie.
Vos assistants ?Non plus. On fait confiance à la mémoire. (Marcelo Bielsa se met à rire.) Mais après soixante ans, on commence à la perdre. C’est pour ça que je suis chaque jour moins bon.
En parlant de football offensif, vous pensez que West Bromwich est une des équipes les plus dangereuses du championnat ?Je crois que les quatre meilleurs attaquants du championnat jouent pour West Bromwich. Non, pardon, je me suis mal exprimé. Ils n’ont peut-être pas le meilleur joueur offensif à chaque poste, mais si on additionne les qualités du numéro 15, du 19, du 10 et du 16, c’est difficile de trouver une équipe qui les surpasse.
Quelle importance aura l’aspect défensif pour vous ?Il y a eu des éloges pour l’attaque de Leeds, mais aussi pour la défense cette saison… Je crois que l’examen que la défense va passer ce samedi renforcera nos conclusions sur notre comportement dans ce secteur.
Et c’est aussi très important que nous maintenions notre jeu offensif, bien qu’il y ait la tentation de prendre des précautions face à la qualité de l’attaque des adversaires. Il y a une très vieille phrase qui dit qu’il n’y a pas de meilleure défense qu’une bonne attaque. Pour actualiser cette phrase, et pour hiérarchiser la valeur de la possession, je dirais qu’il est nécessaire d’avoir le ballon pour attaquer. On essayera d’avoir le ballon. Et pour que ce concept ne faiblisse pas, il faut qu’on empêche l’adversaire de contre-attaquer. Parce que la possession a véritablement de l’importance seulement si on évite les contre-attaques de l’adversaire.
Dans six semaines s’ouvrira le marché des transferts. Vous pensez déjà à des renforts ?Je pense que ce sera très difficile d’intégrer de nouveaux joueurs. Mais il y a quatre renforts que nous attendons avec impatience : je fais référence à Bamford, à Brown, à Ayling et à Berardi.
Et vous pensez que ça suffira ?Oui, oui.
Une dernière question, il y a un gros match en Argentine…(Il coupe.) Pardon. C’est simplement mon opinion. Je fais partie du club. Le club peut avoir un avis différent, et je le prendrai en compte évidemment.
Il y a un gros match en Argentine ce week-end entre Boca Juniors et River Plate. Aurez-vous la chance de le voir ?(Il hoche la tête.) Oui !
Et qu’est-ce que ça représente pour un entraîneur de jouer un match comme ça ?(Il sourit.) C’est le match de rêve, les deux matchs de rêve. Parce que vous avez la possibilité de gagner ce match ! Ce genre de match apporte des émotions qui valent vraiment la peine d’être vécues.
Vous avez de bons souvenirs de la finale de 1992 ?Oui, mais c’était il y a longtemps et il y a deux lectures. Pour nous, les supporters de Newell’s, c’est inoubliable. Et pour ceux qui analysent ma carrière, ils considèrent que c’est un succès très lointain.
À part les quatre joueurs cités, il y a d’autres blessés pour le match contre West Bromwich ?Non.
Marcelo, qu’est-ce que vous allez faire pendant les deux semaines de la trêve internationale ?Nos obligations sont les mêmes. Il y a un groupe de joueurs qui restent au club. Et on focalisera notre attention sur eux. En particulier ceux qui ne jouent pas régulièrement. En milieu de semaine, on organisera un match contre les moins de 23 ans, en essayant de faire en sorte que ça ressemble le plus possible à une compétition officielle, pour contribuer à l’état de forme des joueurs qui n’ont pas beaucoup de temps de jeu.
Propos retranscrits pas Pierre Boisson