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Bernard : « Kompany me rappelle un peu Boumsong »
Olivier Bernard a baladé ses tresses et sa pointe de vitesse sur l’aile gauche de Newcastle pendant sept ans et y habite encore. Bavardages avec ce retraité précoce autour de City/Newcastle, des propos de Blatter et des passes dans le trou de Silva.
Déjà, prenons de vos nouvelles. Même à la retraite, il paraît que vous êtes toujours sur Newcastle…
Exactement. J’ai toujours aimé cette ville. Je suis resté parce qu’on m’a proposé un poste. Aujourd’hui, je travaille pour une association contre le racisme en Angleterre, Show Racism the Red Card. Ça concerne le racisme sur les terrains et dans la société. Mon but aujourd’hui est de faire passer le message, de faire en sorte que les jeunes de demain aient vraiment la possibilité de comprendre et surtout d’apprendre ce qu’est le racisme.
C’est un boulot à plein temps ça ?
Si on veut oui. Je passe beaucoup de temps avec cette association surtout avec les problèmes d’aujourd’hui. En ce moment, on fait beaucoup de radios par rapport à l’affaire Blatter. En Angleterre, tout le monde appelle à son licenciement. Il y a une pétition qui va être lancée par le Parlement lundi soir je crois. Donc, tout le monde souhaite qu’il présente sa démission assez rapidement par rapport à ce qu’il a dit, des propos qui sont complètement « unacceptable » .
Vous avez toujours des relations avec Newcastle United ou pas ?
Oui. Je fais un peu de traduction avec les francophones, je vais voir les gars jouer, les aider si besoin parce que je suis encore très attaché au club. En fait, officieusement, je fais beaucoup de choses et officiellement je travaille avec Show Racism the Red Card.
Vous êtes dans cette asso depuis que vous avez raccroché ?
Non depuis deux ans. J’ai arrêté ma carrière en 2007 à cause d’une hanche qui n’a plus de cartilage. Je suis rentré en France pendant un an avec pas grand chose à faire. Et je suis reparti pour l’Angleterre pour revoir des amis. On m’a proposé des trucs à droite à gauche. J’ai fait beaucoup de soirées caritatives. On m’a proposé un poste d’entraîneur équivalent à la CFA en Angleterre. J’ai donc été coach. Je fais aussi les preview pour le Chronicle. J’ai une page par semaine, genre pour présenter le match de demain, faire des prédictions.
Justement, ce samedi, vos Magpies vont à City. Surpris ou pas par la domination actuelle des Citizens ?
Non, avec tout l’argent que City a dépensé sur les 18 derniers mois, on s’attend à ce qu’il soit champion. Avec un déficit de 180 millions de livres sur l’année dernière, ils sont obligés aujourd’hui de faire un parcours intéressant en Ligue des Champions, et être champion. Aujourd’hui, ils ont deux équipes complètement compétitives pour être champions et pour faire au moins un quart de finale de C1.
Comment vous expliquer la métamorphose de cette équipe, qui ne dominait pas son sujet hier mais qui est au-dessus du lot aujourd’hui ?
Beaucoup de joueurs sont arrivés l’année dernière et ils ont dû s’adapter au football anglais. Et c’est pas un football facile hein ! L’intensité est beaucoup plus forte. Les nouveaux joueurs, il leur faut bien six mois. D’ailleurs, la saison dernière, City est revenu tardivement dans la course mais on voyait que le groupe se mettait en place. Ils avaient quand même fait des gros matches. Ils avaient battu Manchester United, mais c’était trop d’inconstances. Aujourd’hui, c’est une équipe homogène. Il y a de la fluidité. Quand on voit Nasri qui a un peu de mal à faire ses matches, c’est vous dire le niveau du groupe quoi !
Deux individualités ressortent particulièrement cette année : Kompany et Silva. D’accord ou pas ?
Kompany, c’est du Rio Ferdinand d’il y a cinq ans. Ce sont des joueurs très intelligents, sur l’homme très robustes. Il me rappelle un peu Boumsong à l’époque d’Auxerre quand il jouait avec Mexès. Ce sont des joueurs super agressifs, rapides, ils ont tout pour réussir. Il a réussi à s’imposer devant Kolo Touré par exemple. Il y a du monde à City et c’est le choix numéro un. Depuis deux ans, il n’a fait que progresser. C’est un monstre. Quant à Silva, ben, c’est le joueur de la saison. Aucun problème. A tous les matches.
Si les performances de City ne vous surprennent pas, celles de Newcastle un peu plus sans doute…
Je pensais qu’ils allaient accrocher les dix premières places. De là à dire qu’ils seraient sur le podium à la mi-novembre, non. Maintenant, je ne suis pas surpris étant donné les joueurs qu’il y a. La plupart des joueurs qui ont signé sont des très très bons joueurs qui n’ont pas encore confirmé. Aujourd’hui, ils sont matures. C’est le cas d’Obertan. Cabaye, il explose complètement. C’est un groupe jeune, qui a envie. Il n’y a pas beaucoup de stars. C’est intéressant de les voir progresser aussi vite.
Newcastle a pour une fois réussi son recrutement…
Depuis l’ère Bobby Robson, Newcastle a changé de président, le président a changé de directeur sportif. Newcastle était dans un mini-bordel ces dernières années. Aujourd’hui, tout s’arrange, tout le monde est à sa place et tout le monde fait un travail correct.
Vous avez craint les départs des leaders Barton et Nolan ?
C’était un risque de s’en séparer, étant donné que ce sont deux caractères forts, pour ne pas dire influents. Ils étaient le caractère et le moral de l’équipe. Maintenant, ça a permis à d’autres joueurs de s’épanouir et de devenir plus important dans le groupe. Newcastle c’est compact, rigoureux. Tactiquement ils sont très très bons. Ils ont des jeunes prêts à courir 15 km par match.
Etrangement, alors que cette équipe semble plus armée pour jouer, elle ne se distingue pour le moment que par sa solidité défensive…
Leur animation est complètement basée sur l’aspect défensif. Ça passe par les deux attaquants devant, Best et Ba en ce moment. Quand tu joues avec Gutierrez et Obertan qui parfois se retrouvent presque comme des latéraux… Et Tioté-Cabaye au milieu, c’est vraiment pas mal. Newcastle, c’est une équipe qui défend très bien et qui attaque très souvent en contres et fait souvent les différences sur les erreurs des autres.
C’est la vérité du moment ou il faut s’attendre à ça jusqu’à mai 2012 ?
La vérité du moment dans le sens où il y a eu six ou sept signatures. L’équipe se cherche encore. L’entraîneur fait un très bon boulot au niveau tactique. Et Hatem n’a pas encore commencé à jouer. L’animation offensive serait quand même différente avec Ben Arfa en 10. A partir du moment où vous avez un meneur de jeu et un passeur décisif, vous changez carrément la physionomie de l’équipe. Ça, faut pas l’oublier. Hatem, il prend son temps et il devrait commencer à s’imposer d’ici Noël.
Ça peut accrocher l’Europe ou pas ?
C’est assez délicat à dire parce qu’ils n’ont joué que des matches jouables. Ils ont joué Arsenal, mais c’était le Arsenal de début de saison. Ils ont joué Tottenham, qui commence à retrouver un niveau décent. Aujourd’hui, ils n’ont pas encore joué les gros. Les trois prochains matches vont être assez révélateurs. S’ils arrivent à prendre entre 4 et 6 points sur les trois prochains matches (City, Man U et Chelsea), je pense qu’on peut taper les six premières places.
Un petit pronostic pour City-Newcastle ?
Je sens un 3-1, 2-1 pour City. En fait j’ai peur que Newcastle prenne un carton rouge. Et si ça arrive trop tôt…
Pourquoi vous craignez le carton rouge ?
Tous les ballons dans le trou, que Silva adore mettre, ce sera compliqué parce qu’on a des défenseurs qui aiment bien défendre mais tout ce qui est devant eux. Ce qui est derrière, se retourner, accélérer, je ne suis pas sûr qu’on puisse réussir à contenir les attaquants qui bougent beaucoup. Jusqu’à présent, on a eu à faire qu’avec des attaquants assez fixes donc ça s’est bien passé. Contre QPR, on a vu qu’avec deux ailiers qui faisaient la différence, ça pouvait être compliqué. Contre City, on n’aura pas le ballon, ça c’est sûr. Ça va être compliqué de contenir des types comme Johnson ou l’Argentin Agüero avec derrière un maestro comme Silva. Moi, j’ai peur des passes entre-deux.
Propos recueillis par Ronan Boscher