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Bernard, bien plus qu’un blase
À un an du Mondial, pas facile de se faire une place au milieu des Neymar, Oscar et Hernanes. Au pays de la samba et des travelos, un lutin de 20 ans pourrait malgré tout redistribuer les cartes. Ce lutin, c'est Bernard. Explosivité, technique, altruisme : le petit gars a tout pour se faire remarquer. À commencer par un nom ridicule.
Il n’aura foulé la pelouse de la Grêmio Arena qu’une poignée de minutes. Le temps pour lui de remplacer Neymar et de foirer un duel avec Lloris d’une belle frappe de poussin. Mais ne vous fiez pas aux apparences. Bernard Anício Caldeira Duarte, 20 ans tout rond, a de la dynamite dans les pieds. Le pied gauche, de préférence. Du haut de ses trois sélections, le milieu offensif de poche n’est certes pas un cador de la Seleção, mais disons-le tout de suite : on miserait bien un real sur la présence du bonhomme dans le groupe de Scolari au prochain Mondial.
164 centimètres, 60 kilos
Pur produit de l’Atlético Mineiro, « Bernard » est né en 1992 à Belo Horizonte, comme Tostão avant lui. Arrivé chez les Noir et Blanc en 2006, le gamin fait ses classes dans les catégories de jeunes. Conscients de tenir là une petite pépite, les dirigeants du Galo hésitent quand même à l’intégrer chez les grands à cause de mensurations jugées un peu limites. Il faut dire qu’avec 164 centimètres à la toise et moins de 60 kilos sur la balance, pour un milieu offensif, on est plus proche d’un Mathieu Valbuena que d’un Marouane Fellaini. En 2010, Nanard va donc s’aguerrir un peu du côté de Democrata, modeste club de deuxième division du championnat de l’état du Minas Gerais. Banco : le feu follet de 17 ans plante 14 pions en 16 matchs et finit meilleur buteur de la ligue. « Mon passage à Democrata a beaucoup contribué à ma maturité en tant que joueur. J’ai rencontré beaucoup de difficultés, joué devant de nombreux supporters et avec de grands joueurs qui avaient connu plusieurs clubs. Toute cette expérience accumulée a été très utile pour moi, pour arriver en équipe première confiant et motivé » , dira-t-il un beau jour à Lancenet, un brin langue de bois sur le coup.
Le 23 mars 2011, l’entraîneur Dorival Junior l’appelle et lui offre sa première cape avec l’Atlético contre Uberaba. Milieu offensif et excellent gaucher, Bernard joue ce jour-là… arrière droit. Après quelques apparitions avec les grands, le petit ailier retourne en catégorie de jeunes disputer le Taça Belo Horizonte, sorte de tournoi national des moins de 20 ans. Re-banco : il marque le but vainqueur en finale contre Fluminense, offre un cinquième titre à l’Atlético (record co-détenu avec Cruzeiro) et est désigné MVP du tournoi. Cette fois ça y est, Bernard gagne définitivement le droit de jouer chez les grands.
Le patronage de Ronaldinho
Si les débuts de Bernard dans le Brasileirão s’étaient montrés intéressants, le petit prodige des « Coqs » a vraiment brisé sa coquille la saison dernière. Trente-six apparitions en championnat, plus de 3000 minutes de jeu au compteur, et un joli double-double – 11 buts et 11 passes décisives – qui lui permet de trôner en tête des deux classements individuels de son équipe. Mais plus que sur le papier, c’est dans le jeu que le gamin de Belo Horizonte impressionne. Ok, Bernard ne peut pas vraiment tout miser sur son physique, comme d’autres avant lui. Ne lui demandez pas d’aller pointer sa ganache sur un corner ou de secouer les défenseurs tel Brandão. Mais il possède d’autres atouts. Un coup de rein monstrueux, d’abord, qui lui permet d’enrhumer les latéraux sud-américains les uns après les autres. Pour preuve, les mecs d’EA Sports lui ont attribué un bon 90 en accélération dans FIFA 13. Ensuite, comme tout Brésilien qui se respecte, Bernard sait faire danser la gonfle et offrir au public du Mineirão quelques jolis tricks. Quand il le faut, en tout cas. Ce qui amène au dernier point : son sens du collectif. Alors qu’un Neymar va profiter de ses qualités techniques pour tenter de grandes percées, Bernard dribble, puis lève la tête. Son entente avec Ronaldinho cette année est sans doute la clé de la réussite de l’Atlético Mineiro, qui a terminé deuxième du championnat et est toujours en course pour gagner la Libertadores. Le Ballon d’or 2005 a pris son jeune coéquipier sous son aile et a joué un rôle prépondérant dans sa rapide progression.
D’ailleurs, aux yeux de Scolari, l’élève vient de dépasser le maître. Alors que Ronnie, auteur d’une très belle saison lui aussi, était pressenti pour jouer la Coupe des confédérations avec la Seleção, c’est bien Bernard qui a été appelé. Un nouveau statut qui éveille la curiosité des clubs du Vieux Continent. Mais pas que. En septembre 2011, le président de l’Atlético Mineiro Alexandre Kalil a refusé une offre de 5 millions d’euros de la part d’Al-Ahli. Un an plus tard, c’est le Spartak Moscou qui a tenté de chiper le petit génie pour 12 millions. Nouveau refus. Du coup, les enchères montent. En Angleterre, Chelsea et surtout Tottenham ont inscrit le nom de Bernard sur leur short list. Mais c’est bien vers la Ruhr que le jeune coq pourrait s’envoler. Pour remplacer Mario Götze, transféré au Bayern, les dirigeants du Borussia cherchent activement un nouveau milieu offensif à modeler. Bernard en est un. Il y a quelques semaines, Dante confirmait le rapprochement entre Dortmund et le joueur de Mineiro : « Je lui ai donné quelques conseils et expliqué la mentalité allemande. Bien qu’il soit un peu en dessous physiquement, il sera une très bonne recrue pour le BVB. » Si même un Bavarois le dit…
Par Benjamin Jeanjean et Clément Chaillou