- Allemagne – Bundesliga – Hertha Berlin/Schalke 04
Berlin, la capitale dernière de classe
Incapable d'enchaîner deux succès de suite depuis le début de saison, le Hertha Berlin se trouve encore une fois sous la menace de la relégation. Une habitude pour un club aussi doué pour faire l'ascenseur que pour décevoir ses supporters et qui fait incontestablement de Berlin la pire capitale européenne en matière de foot. Eh ouais, on ne peut pas être bon partout…
Ça fait déjà quelques années que ça dure : Berlin est hype, Berlin est cool, Berlin a tout bon. Culturellement, musicalement, artistiquement, touristiquement, tu as forcément un pote et même certainement plusieurs qui sont revenus de quelques jours là-bas et qui te saoulent depuis à te dire combien cette ville est géniale, capitale immense d’un pays locomotive économique de l’Europe. Alors oui, certes, Berlin mérite les honneurs, mais s’il y a bien un domaine où elle n’a pas à la ramener, c’est bien en foot. Il y a peu encore, elle était soutenue dans la lose par Paris, mais depuis que le Qatar a investi dans le PSG, la voici seule sur le continent à traîner sa misère de grande ville sans grand club, très loin de Londres, mais aussi de Madrid, Rome, Lisbonne, Bruxelles, Amsterdam, Moscou, Paris désormais… Toutes ces capitales sont représentées par une, voire plusieurs équipes qui brillent régulièrement sur les scènes nationales, voire dans les compétitions européennes. Mais pas Berlin, piteusement présente dans le monde du ballon rond par ce qu’il est de coutume d’appeler le plus petit des grands clubs allemands : le Hertha Berlin et son palmarès famélique, son instabilité structurelle constante et ses résultats sportifs en yo-yo. On pourrait l’appeler Déception Football Club, l’Olympique de la Frustration ou l’En Avant Désespérance.
9 entraîneurs depuis 2009
L’historique de La Vieille Dame – Die Alte Dame en VO, le surnom du club – est rapide à faire, avec deux titres nationaux acquis coup sur coup il y a plus de 80 ans, deux coupes de la Ligue conquises coup sur coup aussi il y a plus de 10 ans, et c’est tout. Ah si, il y a une Coupe Intertoto aussi ! Le dernier frisson remonte à 2009, quand l’équipe emmenée par Lucien Favre s’était retrouvée leader de Bundesliga à une poignée de la fin de saison, pour finir par terminer à la quatrième place… La lose, c’est un art qu’on prend très au sérieux du côté de Berlin. Depuis cet échec du brillant technicien suisse, le Hertha a connu deux relégations, deux remontées immédiates, et a vu passer se succéder neuf entraîneurs différents en comptant les intérimaires… Quand il évolue en D2, le club se balade, quand il est en élite, il n’arrive pas à exister, si bien qu’il ne paraît nulle part dans son élément, comme s’il fallait créer une division intermédiaire rien que pour lui pour qu’il puisse enfin s’épanouir. Promus la dernière fois en date au printemps 2013, les Berlinois ont pourtant réussi l’exploit de se maintenir en fin de saison dernière, sans trop trembler qui plus est, mais se retrouvent encore ce coup-ci sous la menace d’une troisième relégation en cinq ans…
L’attaque orpheline de Ramos
L’actuel exercice 2014/2015 est assez difficile à analyser, avec quand même quelques jolis succès glanés contre Wolfsburg, Dortmund et des candidats directs au maintien comme Mayence, Hambourg et Stuttgart, mais ces victoires sont toujours entrecoupées de trous d’air, le Hertha ayant déjà perdu 13 fois en championnat depuis l’été dernier, le pire bilan des 18 formations engagées. La dernière fois que les Bleu et Blanc sont parvenus à enchaîner deux succès de suite en Bundesliga, c’était en décembre… 2013 ! La défense est souvent pointée du doigt, et comme en attaque, le meilleur artificier de la saison passée, Adrián Ramos, a été transféré au Borussia Dortmund, forcément ça coince. Le buteur colombien a été remplacé par un ancien de Dortmund, Julian Schieber, auteur de débuts prometteurs sous ses nouvelles couleurs avant de marquer le pas dans un second temps, puis de se blesser dans un troisième, peut-être bien jusqu’à la fin de saison. Cette foutue lose, encore… Une indisponibilité qui fait en tout cas les affaires de Salomon Kalou, qui a retrouvé une place de titulaire et qui a inscrit le seul but de la précieuse dernière victoire face à Augsburg le 28 février (1-0). L’ancien Lillois s’est jusqu’à présent plus distingué en Allemagne pour son côté grognon que pour son aptitude à marquer, mais il semble désormais être le seul véritable atout offensif dont dispose le Hertha pour son opération maintien.
Des pointes à 75 000 spectateurs au stade
Depuis plus d’un mois, l’équipe est dirigée par un entraîneur intérimaire, l’ancien joueur Pal Dardai, aidé dans sa tâche par Rainer Widmayer, l’ancien assistant de Jos Luhukay, viré début février. Le tandem a donc pour mission de gratter le plus de points possible, en espérant que ça suffise pour valider une troisième saison de suite en Bundesliga. Les joueurs gardent le soutien d’une partie du public, avec 48 000 spectateurs de moyenne à l’Olympiastadion (8e affluence du championnat, mais dernière au niveau du taux de remplissage) et des pointes à plus de 75 000 pour les affiches face au Bayern ou au Borussia. Le maintien : voilà l’objectif, simple mais pas facile, qu’il faut viser pour le court terme. Sur le long terme en revanche, l’avenir semble assez bouché pour le club de la capitale, dans un pays avec une très forte densité de formations de très haut niveau, largement dominé par le Bayern. Seul point positif à signaler : le Hertha a reçu il y a un an le soutien de KKR, un très gros fonds d’investissement, qui possède désormais 10 % des parts d’un club plombé par le passé par des problèmes de dettes. Avec des soucis financiers en moins, y a-t-il possibilité de s’imaginer enfin un bel avenir footballistique à Berlin ? On est en droit d’en douter…
Par Régis Delanoë