Benzema : toujours un petit Bleu

Juger Benzema sur son entrée en jeu face à la Lituanie relèverait presque de la mauvaise foi : trois minutes après avoir tapé dans la main de Luyindula, le Lyonnais voyait le tir de Ribéry fuser dans les filets adverses et la France abandonner toute ambition offensive, sans parler du champ labouré qui faisait office de pelouse. Pas de possibilité de s’exprimer donc. Ou peu, plutôt.

A la 72e, le lionceau reçut un ballon dans sa zone de chasse, livré en mains propres par Gourcuff. Dans une position pourtant loin d’être idéale – deux Lituaniens lui barraient la route – le Benz’ entrevit pourtant une opportunité de la mettre au fond, et tenta un improbable extérieur du gauche qui s’enfuit loin du cadre. Un geste (un acte ?) manqué, doublé d’un choix discutable. Toute la problématique des rapports entre Benzema et l’Équipe de France résumée dans cet instant.

Cador à Lyon, le joueur le mieux payé du championnat n’est qu’un petit caïd en EDF. Un deuxième choix soumis à l’impitoyable loi de la concurrence. Pour lui, chaque titularisation, chaque entrée en jeu devient ainsi un examen de passage que le jeune ambitieux ne se donne pas le droit de rater, ne serait-ce qu’une seule fois. Raison pour laquelle il se trouve recalé à chaque tentative, victime d’un mélange de présomption et de fébrilité inhérente à tout aspirant. Le jeune homme qui envisageait sa carrière sous le prisme exclusif de la verticalité se voit désormais empêtré dans un cercle aussi vicieux qu’infernal.

Dans L’Equipe de mardi, l’expert es avant-centre hexagonal, Bernard Lacombe, dit ceci : « Il ne faut pas qu’il soit impatient, qu’il déjoue. Quand il a le ballon, il n’est pas obligé de frapper pour reprendre confiance. Parce qu’après il ne joue pas juste » . Individualisme, précipitation. Les deux maux qui escortent les prestations de Rim-K du 69 en EDF ont désormais contaminé ses prestations lyonnaises. La machine à marquer de l’OL s’est enrayée. Elle a perdu confiance, celle que Benzema n’a jamais réussie à gagner en EDF.

Hormis des débuts disputés sous le sceau de l’insouciance et auréolés d’un but face à l’Autriche (le 28 mars 2007, sur une passe de Nasri*), Benzema, depuis qu’il se trouve dans la position du postulant à une place dans le onze de départ, déjoue quasi systématiquement. Frappes précipitées, vista évaporée, de quoi s’attirer les foudres de ceux qui rêvaient de le voir éjecter Henry. Les mêmes qui commencent à se dire que si Domenech n’a jamais discuté le statut d’indéboulonnable de Titi des Ulis, c’est que les Bleus n’ont peut-être pas mieux en stock pour le moment.

Malgré tout et malgré l’Euro, peu étaient ceux à douter que la France se qualifierait pour la Coupe du Monde et que Benzema serait son avant-centre naturel. Avant le coup d’envoi de la campagne de qualification, cela relevait même de l’évidence.

Depuis, la France a commis plusieurs faux-pas et l’attaquant des écuries d’Aulas a été mouillé à chaque fois. Lors de la tempête autrichienne, il ne fait rien de ses 90 minutes. En Roumanie, ce sont Ribéry et Gourcuff qui sortent la France d’un beau merdier, mais pas de trace d’impact de Rim-K la rafale, pourtant titulaire. La bonne deuxième période des Bleus face à la Serbie ? Disputée sans le Lyonnais, remplacé au repos par Anelka …. Mais plus inquiétant encore pour Benzema que sa pâle rentrée de samedi soir à Kaunas, la nouvelle organisation mise en place par le Dom’ : un 4-2-3-1 avec Henry en pointe qui le condamne quasiment au statut de doublure de l’ex Gunner. A moins que Ray’troactif replace Ribéry à droite et Henry sur la gauche.

Quoi qu’il en soit, le calvaire bleu de Benzema pourrait connaître un nouvel épisode dès ce soir. Après avoir été dépassé par Luyindula samedi, au tour de Hoarau ou Gignac de lui griller la priorité ?

* Le 1er but de Benzema en Bleu :