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Benjamin Leroy : « Je me sens chanceux de faire ce métier à mon âge »

Propos recueillis par Charlotte Gruszeczka

Après un passage rapide à Quevilly-Rouen, Benjamin Leroy poursuit désormais sa route à Lorient où il s’est engagé pour deux saisons. 391 matchs en 15 années professionnelles au compteur, le portier de 35 ans vient poser ses valises en Bretagne en quête de stabilité pour sa famille. Lui qui a connu les montées, les descentes, comment voit-il le foot d’aujourd’hui et la concurrence au poste de numéro 1 ?

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Tu t’es engagé à Lorient cet été à l’âge de 35 ans, est-ce un aboutissement ?

Je suis heureux de signer ici, dans un bon club, c’est motivant d’arriver dans de très bonnes conditions de travail, avec un staff qui ne m’est pas inconnu. Un aboutissement, je ne pense pas, je prends ça plutôt comme une récompense, même si je suis très fier des clubs dans lesquels je suis passé. Rien que le passé de Lorient en Ligue 1, en matière d’infrastructures et de moyens à l’heure où je signe dans le club, oui on peut dire que c’est le plus gros club quand lequel j’ai signé. Ce n’est pas un jugement de valeur, mais un constat. Même si je ne suis pas vieux, ça prouve que je travaille encore bien et que j’ai encore des qualités, c’est gratifiant.

Tu es marié et papa, est-ce que tu prends tes décisions de carrière avec ta famille ?

Je ne le cache pas, c’est de moins en moins évident. L’aspect familial commence à primer, je ne peux pas imposer à ma famille d’aller à un endroit où ils ne veulent pas. Mon grand a 11 ans et demi, et le petit, qui n’est plus si petit que ça, a 8 ans, et eux aussi commencent à faire leur vie. Je suis dans une phase où je trouve égoïste de leur imposer ça, je ne serai pas content, je ne serai pas bien si eux ne le sont pas. Par la force des choses, on a fait 9 mois à Rouen, donc bon, je cherchais aussi de la stabilité pour la suite, et partir à Lorient deux ans, ça va nous apporter ça. Heureusement, je n’ai jamais eu de souci, quand ils sont bébés tu les mets dans la valise et c’est OK. (Rires.) Le départ de Corse pour aller en Normandie a été très difficile, même si c’était notre choix, on l’a fait pour l’aspect familial, pour se rapprocher des grands-parents, mais c’était très difficile pour nous tous. Désormais, ils sont contents de notre choix, c’était une décision commune, et on en est heureux.

Je ne peux pas imposer à ma famille d’aller à un endroit où ils ne veulent pas. Je suis dans une phase où je trouve égoïste de leur imposer ça.

Le poste de gardien est spécifique, comment se fait-on une place au sein d’une équipe ?

Je l’ai encore vu cet été, les places sont chères à notre poste. Je dirais que ça passe par le travail. À la base, je n’ai pas des grandes qualités athlétiques au-dessus de la moyenne comme certains et je l’ai compris très jeune, dès le centre de formation. Le directeur du centre nous avait dit clairement, sans nous rabaisser, que si on était là à Châteauroux, c’est parce qu’on n’avait pas les qualités pour être dans les gros centres de formation comme Rennes ou Lyon. Il fallait qu’on bosse plus que les mecs qui étaient là-bas. Il y a une part de chance aussi, je suis toujours tombé sur des coachs investis et passionnés en travaillant dans la rigueur et la bonne humeur. Puis quand on a notre chance, il ne faut pas se poser de questions et foncer, je me pose très peu de questions et je fais abstraction du reste. Je sais que ce n’est pas donné à tout le monde parce qu’avec la pression de l’événement ou du match, on sait qu’on peut être jugé rapidement, dans le bien ou dans le mal. J’ai eu cette chance de faire abstraction de tout ça et de me dire « On te donne ta chance, fonce, ne calcule pas ». Je me sens chanceux de faire ce métier-là à mon âge, je prends toujours autant de plaisir.

 

En parlant de pression, comment la vis-tu ? Généralement, tu as les supporters adverses dans le dos.

D’un côté, ça me touche moins qu’avant, et de l’autre je trouve ça ridicule. Je ne comprendrais jamais les insultes, je trouve ça de plus en plus con, et de pire en pire. T’as des stades où les supporters donnent absolument tout pour leur équipe, et ça va tellement mieux, comme Liverpool ou Lens. Des fous, tu en as dans tous les stades, OK, mais je ne sais pas, au lieu de me crier dessus et de m’insulter, chante pour ton équipe, non ? (Rires.)

Et quand tu vois l’attaquant arriver face à toi, qu’est-ce qui se passe dans ta tête ?

Quand je vois l’attaque arriver au loin, dans ma tête c’est comme une cible de fusil avec une vision large, je vois si les potes sont bien placés et je commence à anticiper. Plus ça se rapproche et plus cette cible se resserre sur le ballon et plus je suis en alerte. Il y a des matchs, quand je ne touche pas un ballon, je suis content, ça prouve que l’équipe est bonne. (Rires.) Quand tu vas avec l’âge, tu prends un peu plus de recul en voyant l’attaque arriver. Il y a des gens de ma famille qui me disent : « J’espère te voir ce soir à la télé. » Je leur réponds : « Ah bah non, surtout pas, si tu ne me vois pas, c’est mieux. » (Rires.)

Quand, après une saison pleine de 35 matchs en Ligue 1, on se retrouve sur le banc d’un club de Ligue 2 qui joue le maintien, ça permet de se remettre en question.

La concurrence est difficile pour le poste de numéro 1. En général, comment se passe l’ambiance en interne avec les autres gardiens ? Y a-t-il une sorte de rivalité entre vous ?

C’est le terrain qui parle et qui fait la hiérarchie, même si, à la base, on est recruté comme numéro 1 ou 2. La saison dernière à Quevilly-Rouen, je connais un début de saison compliqué. Je venais de Ligue 1, et on peut penser que la Ligue 2 est plus facile… On me met sur le banc pendant 2 matchs, puis je suis revenu à ce que je savais faire, j’ai repris du plaisir à l’entraînement, puis tout revient derrière. La hiérarchie n’est jamais fixe, c’est la performance qui parle, il faut être capable de se dire qu’on doit se remettre en question. J’ai toujours eu la chance d’être avec des gardiens avec une superbe mentalité, tout s’est toujours bien passé, même quand on est numéro 2, on est à fond derrière le titulaire. Quand ça va mal, il faut accepter le choix du coach et travailler encore plus, je ne connais aucun coach qui va se passer du meilleur par envie, s’il fait ce choix, c’est que c’est nécessaire. J’ai été en binôme avec Brice Maubleu, Esteban Salles, Bingourou Kamara par exemple, et tout s’est toujours très bien passé avec eux, ça passe aussi par l’entraîneur des gardiens qui gère ce petit monde.

Tu dis qu’il faut être capable de se remettre en question, il y a eu des moments de doute ?

Bien sûr ! Quand après une saison pleine de 35 matchs en Ligue 1, on se retrouve sur le banc d’un club de Ligue 2 qui joue le maintien, ça permet de se remettre en question. Je ne connais pas un seul sportif de haut niveau qui n’a connu que des moments positifs dans sa carrière. C’est ce qui différencie à mon goût les longues des courtes carrières, la remise en question permanente même quand ça se passe bien. Et quand ça ne se passe pas bien, c’est de réagir et de ne pas accepter la situation. On se bat contre nous-même ! Il faut faire durer les moments positifs le plus longtemps possible.

Puisque tu parles de Quevilly-Rouen, comment as-tu vécu cette fin de saison ?

On savait qu’on allait descendre. Quand on joue contre des équipes qui connaissent leur destin, on peut vite s’ennuyer. J’étais en fin de contrat avec QRM, et on reçoit Saint-Étienne. Je me suis dit « Profite, c’est peut-être ton dernier match en Ligue 2. » On est là, on joue Sainté, même si on est à domicile, le stade était plein et tout vert, ça reste des bons souvenirs. Trois semaines avant, on bat aussi Auxerre à domicile dans un match fou. J’ai plus de regrets par rapport à cette équipe de QRM pleine de talent, mais avec peu d’expérience, peut-être trop jeune. Il nous manquait des gars avec cette expérience de la Ligue 2, qui connaissaient bien le championnat et dont on avait besoin à ce moment-là pour aller chercher quelques points.

 

Finalement, ton aventure en Ligue 2 se poursuit, c’est le championnat que tu connais le mieux. Qu’en penses-tu désormais ? N’est-il pas plus imprévisible qu’avant ?

Quand t’es en Ligue 1, par exemple dans un club comme Ajaccio, que tu reçois Marseille et Monaco et que tu vas à Paris, ça arrive que les staffs disent : « Si on prend 2 points sur ces trois matchs, c’est déjà bien, il faut tout mettre sur les clubs de notre portée. » En Ligue 2, c’est différent, tu peux battre tout le monde, et je pense que les gens apprécient ça, ceux qui peuvent être déçus de la Ligue 1, quand on voit Paris qui écrase tout… En Ligue 2, à chaque match, t’as des équipes qui font appel à des valeurs qui font que ça nivelle le championnat. Quand tu vois Rodez en play-off la saison dernière, je trouve ça magnifique, la Ligue 2 laisse sa chance à tout le monde. Tu peux t’accrocher et gagner partout !

Est-ce que le football de tes débuts est semblable à celui d’aujourd’hui ?

Non. J’ai surtout évolué en Ligue 2, et dans ce championnat à mes débuts, il y avait deux championnats en un. De la première à la dixième ou douzième place, tu avais des équipes très homogènes, puis après, des équipes qui faisaient régulièrement des allers-retours en National, une différence technique, tactique et athlétique entre les deux. Désormais tout est similaire, très homogène, voilà pour l’aspect terrain. En dehors de ça, il y a une différence générationnelle aussi, les codes ont changé, notamment au niveau des réseaux sociaux, on y est plus exposé, même en Ligue 2. Je me souviens aussi qu’à l’époque, quand tu montais dans un groupe professionnel, lors de ton premier déplacement avec le groupe, tu attendais que tout le monde s’assoie dans le bus pour prendre ta place. (Rires.) Je ne dis pas que c’était mieux, il y a toujours du respect, mais c’est vrai que les codes ont changé, c’est bien d’avoir des jeunes et des plus âgés pour faire ce mix-là, tout le monde doit faire un pas vers les autres, c’est intéressant humainement. À Lorient, les jeunes apportent du dynamisme et sont à l’écoute, on a vraiment un bon groupe, c’est génial.

Tu es joueur professionnel, quand tu vois la fin précipitée des clubs comme Niort, Tours ou encore Bordeaux, que ressens-tu ?

Ça fait de la peine, c’est sûr, mais il n’y a pas de hasard, à un moment donné il y a eu une mauvaise gestion, même si je ne me permettrais pas de juger un cas que je ne connais pas bien. À Bordeaux, et même si c’est Bordeaux et que je comprenais leur envie de remonter rapidement, car c’était sûrement vital pour eux, il aurait peut-être fallu se dire qu’il fallait vivre avec ses moyens et prendre son temps. Pour les supporters qui suivent le club depuis longtemps, ça doit faire mal, pour les joueurs aussi… Quand on voit parfois des équipes réintégrées quelque temps avant la reprise du championnat, ça devient ridicule et compliqué. C’est triste pour les joueurs, ils sont libérés quand la plupart des autres équipes sont constituées, les masses salariales peut-être déjà au max, un très bon joueur ne sera peut-être pas pris ou au rabais, ça peut dégoûter des mecs.

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Propos recueillis par Charlotte Gruszeczka

Photos : Bruno Perrel pour le FC Lorient et Iconsport.

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