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Benítez , un genou plus fort que l’Atlético

Par Robin Delorme, à Madrid
4 minutes
Benítez , un genou plus fort que l’Atlético

Espanyol Barcelone et Atlético Madrid ont en commun Miguel Ángel Benítez. Lors de cette affiche, le 20 février 2000, le Vicente-Calderón avait été le théâtre de l'une des plus horribles blessures de l'histoire de la Liga. Le Paraguayen, ancien Colchonero et alors Perico, y avait alors laissé un peu plus que son genou.

Le stade Félix-Bollaert est d’humeur pesante. En ce 28 juin 1998, sous un soleil de plomb, les nerfs du public lensois sont mis à rude épreuve. Au bout d’une prolongation agonique, la reprise de Laurent Blanc relâche finalement tout un stade et met à terre la sélection paraguayenne. Impassible, seul Chilavert tente vainement de relever un à un ses coéquipiers, fauchés en plein rêve. Parmi ces Guarani, Celso Ayala et Miguel Ángel Benítez. Collègues de sélection et amis dans la vie, ce défenseur central et cet attaquant de pointe se retrouvent par la suite face à face. En 1999, le premier cité trône au milieu de l’arrière-garde de l’Atlético Madrid, tandis que son comparse, un temps Colchonero, occupe le front de l’attaque de l’Espanyol. Des retrouvailles en Liga qui, le 20 février 2000, prennent des allures de drame. De retour dans un Vicente-Calderón qu’il a quitté cinq ans auparavant, Benítez y découvre le cimetière de son genou. Du terrible tacle de son compatriote, il en sort avec l’une des pires blessures qu’ait connues le championnat espagnol. De l’aveu même du médecin qui l’opère, « si la rupture des ligaments ressemble à une puce, il a un éléphant » .

Une blessure mille en un

Une métaphore qui en dit long sur l’état du genou de Miguel Ángel Benítez. Lorsque le docteur Ramon Cugat prend en charge le Paraguayen de 29 ans, il ne peut « diagnostiquer la blessure » et promet seulement un temps de récupération « bien supérieur à un an » . Optimisme toujours, le chirurgien en rajoute une couche : « Lors des douze dernières années, je n’ai opéré que quatre footballeurs avec une blessure plus grave que celle-là. À chaque fois, le nerf sciatique était sectionnée, et aucun de ces patients n’a pu jouer de nouveau » . Détruite par la violence du choc, l’articulation de Benítez doit attendre avant d’être opérée, « parce que ce serait une agression trop forte pour son genou » . Après des semaines d’attente, le diagnostic tombe. Et la facture est salée : subluxation du genou, rupture des ligaments croisés antérieurs et postérieurs ainsi que du ligament latéral interne et du ménisque interne… Pour finir, son tibia se trouve également en mille morceaux. Cet amoncellement de blessures lui promet des heures de souffrance et rend la poursuite de sa carrière plus qu’hypothétique.

Touché, pas coulé, le Paraguayen ne s’accorde aucune autre option que celle d’un retour. Mais le chemin, rempli d’embûches, s’annonce long et périlleux. Et la fin, imprévisible. Même l’équipe médicale qui l’accompagne avoue que « le temps est secondaire » . Sans visibilité sur sa récupération, il est enfin opéré début avril, cinq semaines après le tacle tragique. Sa force, il la puise dans un hédonisme à tout épreuve. « Pendant un an, j’ai pu profiter des week-ends avec ma femme et mes fils » , raconte-t-il en février 2001, après avoir « passé huit à neuf heures par jour de travail et de souffrance dans un gymnase » . À cette date, le señor Benítez vient tout juste de retrouver les terrains d’entraînement. Cependant, il lui est toujours impossible de refouler une pelouse de Liga. Selon le doc’ de l’Espanyol, une heure sur le pré lui ferait risquer une rechute. C’est après 48 semaines de convalescence, en mai, qu’il renfile la liquette des Pericos. Et pas n’importe où : le Santiago-Bernabéu, à quelques kilomètres de l’antre des Matelassiers, devient le théâtre d’une résurrection. Un joli pied de nez à l’histoire.

« J’avais besoin de quelqu’un et j’ai reçu le soutien de tous »

« Je ne me suis senti seul à aucun moment, confesse-t-il après son retour. Pour sortir de cette épreuve, j’avais besoin de quelqu’un et j’ai reçu le soutien de tous : de ma famille jusqu’aux supporters en passant par mes coéquipiers et les salariés du club. » Des remerciements qu’il n’aurait jamais lâché pour l’Atlético Madrid. Chaotique, sa période rojiblanca se limite à deux saisons presque vierges. De 1993 à 1995, il ne dispute que dix petits matchs et n’inscrit aucun but. A contrario, il connaît la bagatelle de six entraîneurs, tous virés par le sulfureux Jesus Gil, mais aucun logement fixe, lui qui vit dans un appartement du club. Difficile dans de telles conditions de glaner la confiance du coach… Le bourreau et ancien ami, Ayala, est lui relégué aux oubliettes : « Aujourd’hui, nous avons un peu perdu contact. C’est moi qui lui ai dit que je préférais ne pas me rappeler constamment des circonstances que vous savez. Malgré cela, il sera toujours mon ami » , révèle celui qui est aujourd’hui formateur au pays. Les deux Guarani ne rejoueront plus jamais ensemble. Même pas à Félix-Bollaert.

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Par Robin Delorme, à Madrid

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