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Bendtner d’acier
Moqué pour son faible niveau et son bel ego ces dernières années, Nicklas Bendtner revit à Rosenborg où il empile les buts. Dans la meilleure période de sa carrière, l’attaquant danois pourrait être d’une grande aide pour sa sélection lors du barrage pour le Mondial contre l’Irlande.
On l’avait quitté à l’été 2016 sur un énième échec à Wolfsburg. Après avoir été exclu du groupe pour un retard à l’entraînement et avoir posté une photo de sa voiture dont la marque différait de celle du sponsor officiel du club, Nicklas Bendtner avait pris la porte. Déjà pas séduits par les performances du garçon (trois buts en 31 apparitions sur deux saisons de Bundesliga), les dirigeants du VfL l’ont gentiment accompagné jusqu’à la sortie sans lui dire « À bientôt » . À la suite de cette rupture à l’amiable, l’attaquant comptait bien rebondir à Nottingham Forest, en Championship. Mais là non plus, le compte n’y était pas (deux pions en 885 minutes toutes compétitions confondues).
Quoi de surprenant ? Depuis le début de sa carrière, Bendtner s’est cassé la gueule marche après marche. La preuve avec ce curriculum vitae paradoxal, mélange de grandes entités et de statistiques édifiantes : 171 matchs avec Arsenal en près d’une décennie pour 45 caramels, 78 avec Birmingham et Sunderland (en cumulé) pour 21 tremblements de filet, onze avec la Juventus pour aucun goal. Au fur et à mesure, le Danois est donc forcément devenu la risée des différents publics européens. Surtout que son ego surdimensionné le poussait à s’auto-proclamer Lordet à cibler le niveau des « meilleurs joueurs du monde » .
Nicklas ni talent, vraiment ?
Et puis finalement, Bendtner le moqué s’est levé en toute discrétion, a fait ses valises pour la Norvège dans l’indifférence générale et a atterri à Rosenborg en janvier 2017 sans aucune certitude. Onze mois plus tard, le voilà meilleur buteur du championnat (18 patates en 25 titularisations, trois en six matchs de Ligue Europa) et de retour en sélection après presque deux années d’absence. Mieux : le bonhomme de 29 ans offre parfois de véritables bijoux techniques, comme contre Molde en août.
Évidemment, Nicklas kiffe : « Avant mon arrivée ici, je ne voulais plus jouer au football. J’ai eu du mal à comprendre ce qui n’allait pas.(…)J’avais besoin de trouver un nouvel endroit, a-t-il récemment reconnu au micro de la NRK. Je suis venu ici et j’ai retrouvé cette chose qui m’avait tant émerveillé.(…)J’ai retrouvé l’amour de jouer au football, cet amour que j’avais toujours eu dans ma vie. » Du coup, l’ancien Gunnern’a pas changé, et a gardé son melon qu’il regonfle par moment. En atteste cette célébration de but totalement improbable contre Kristiansund, préférant gronder son partenaire que fêter la réalisation avec lui.
Ce côté détestable, ses coéquipiers et son entraîneur s’en moquent. « Il affiche une tranquillité et une expérience formidables. Il répand autour de lui la bonne humeur. C’est un gars fantastique qui s’est parfaitement fondu dans le groupe. Il se soucie de tout le monde. Il s’est rapidement imposé comme un acteur important sur le terrain et, surtout, dans le vestiaire, a ainsi justifié Kåre Ingebrigtsen, son coach, dans VG.Je pensais qu’il pouvait peut-être se montrer un peu égocentrique. Mais c’est un joueur d’équipe, désireux de bien faire jouer les autres. » Attentif à ces propos et ces performances, Åge Hareide, le patron du Danemark, a lui aussi décidé de lui faire confiance en le rappelant dans son groupe depuis septembre. Avec une seule titularisation et aucune action décisive à la clé pour le moment.
Reste que tout le monde est prévenu : désormais, Bendtner peut frapper même si on ne l’attend pas. Et celui qui a eu droit à une vingtaine de minutes lors de la fin du premier round contre l’Irlande se verrait bien emprunter le costume de héros de la nation en l’envoyant au Mondial lors de la seconde manche. Martin O’Neill, le sélectionneur adverse, qui a déjà travaillé avec l’avant-centre à Sunderland (en 2011-2012) et qui le redoute, l’attendra de pied ferme à l’Aviva Stadium. « Il était prêté par Arsenal (lors de leur collaboration, ndlr) et c’était bien sûr un bon footballeur, un très bon joueur. Il était excellent quand il le décidait. Il l’avait été assez souvent avec nous. Je me souviens d’un match contre Liverpool en particulier où il avait été injouable. » Ou comment parler de quelque chose au passé pour que ça ne se reproduise pas.
Par Florian Cadu