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Ben Arfa, en Rouge et Noir
Quelques semaines après avoir repoussé les avances de Rennes, Hatem Ben Arfa s’est finalement laissé séduire par le discours de Sabri Lamouchi et le challenge proposé par le club breton. C’est donc en Bretagne, plutôt qu’à Nice, que le milieu offensif va retrouver les terrains après presque un an et demi sans jouer. Les supporters rennais en salivent d’avance.
Un maillot floqué du numéro 18 brandi en étendard, et un immense sourire lui barrant le visage, pour ce qui restera comme l’une des images fortes du dernier week-end de Ligue 1. Tandis que le speaker se brise la voix à coups de « HATEEEM ?! » et que le public rennais lui répond en offrant une ovation de bienvenue à « Monsieur Hatem Ben Arfa » , l’ancien Parisien foule son nouveau jardin du Roazhon Park, quelques minutes avant Rennes-Bordeaux. Avec cette image peut enfin s’effacer un souvenir imprimé depuis trop longtemps dans les mémoires d’amoureux du foot : celui de la dernière apparition d’Hatem Ben Arfa sur un terrain. C’était à Avranches, lors d’un quart de finale de Coupe de France où il avait mis le PSG sur la voie de la qualification (0-4) avec un doublé, le 5 avril 2017. Soit il y a presque un an et demi. Une éternité, à l’échelle d’une carrière.
Hatem l’enchanteur, Sabri le charmeur
Mais même l’éternité a une fin, tout du moins si l’on en croit Isaac Asimov, et Ben Arfa et son chômage technique n’échappent pas à la règle. L’ancien Parisien n’a pas encore rejoué au football. Mais ce dimanche 2 septembre 2018, il est redevenu footballeur, déjà. L’épilogue d’un été de discussions et de rumeurs qui l’ont envoyé, entre autres, à Bordeaux, Saint-Étienne, West Ham, Séville, au Rayo Vallecano, à Benfica ou au Sporting Portugal, et plus récemment à Nice. Un retour au Gym, là où il a flambé pour la dernière fois, en 2015-2016 (18 buts et 7 passes décisives en 37 matchs), constituait l’alternative la plus sérieuse à une signature à Rennes. Son éventuelle association avec Mario Balotelli avait de quoi en faire rêver plus d’un sur la Promenade des Anglais. Mais c’était compter sans un principe de base chez HBA, selon lequel il est « difficile de retourner avec une ex » .
C’était aussi compter sans le pouvoir de persuasion du duo Olivier Létang-Sabri Lamouchi. Pour avoir été son directeur sportif au PSG, le premier, aujourd’hui président du club breton et apprécié de Ben Arfa, avançait en terrain connu. C’est moins vrai pour Lamouchi, mais ses mots et son projet de jeu ont vite fait chavirer le gaucher. Plus que la perspective de jouer la Ligue Europa, a priori : de l’aveu de Létang, le milieu offensif avait des touches avec des clubs jouant la C1. « Hatem est un magicien, louait le technicien dimanche soir. Je sais qu’il va nous apporter énormément, mais je sais aussi que ce groupe le mettra en valeur comme lui mettra en valeur notre collectif. » Un vrai charmeur, ce Sabri. Et un numéro 6, un vrai, plein d’abnégation : fin juillet, Ben Arfa avait repoussé les avances du Stade rennais. Un gros mois plus tard, le voilà vêtu de rouge et de noir pour une saison, plus une autre en option.
Hasards du calendrier
Voir l’international français (15 sélections, 2 buts) jouer la montre alors qu’il sortait d’une saison blanche peut interroger. D’autant plus qu’il a finalement donné suite à un projet qui lui était proposé depuis l’hiver dernier. N’aurait-il pas été plus sage de trancher dès le début de l’été ? Cela aurait été gage d’intégration facilitée, et de préparation physique complète. Mais pour la flotte, pas de lézard, Ben Arfa est vacciné : il a joué quatre ans et demi en Angleterre. La forme ne semble pas être un problème non plus selon Olivier Létang, qui trouve son poulain « très affûté » . Davantage préoccupé par ses quinze mois d’inactivité, Lamouchi assure lui aussi avoir « vu un garçon concerné, un garçon prêt physiquement » . Après tout, le néo-Rennais n’était pas blessé, juste placardisé, et il a bossé tout l’été avec un préparateur physique.
Reste la question de son positionnement. À Nice, « HBA » évoluait en 10 (et parfois en pointe) dans un 4-2-3-1 ou un 4-4-2 en losange. À Rennes, où l’axe est si peuplé que les relayeurs Bourigeaud et Léa-Siliki sont le plus souvent alignés dans les couloirs, il semblait peu probable de le voir évoluer dans ce registre. Sabri Lamouchi a pourtant été clair, lors de sa présentation à la presse : « Il faut qu’il soit dans le cœur du jeu, là où il est le plus déstabilisant. » Là où, libéré de certaines tâches défensives, il jouit d’une liberté d’action maximale et peut le plus facilement faire parler son talent. Pourra-t-il l’exprimer dès la reprise, où Rennes affrontera successivement ses deux anciens clubs, Nice et Paris ? Puisqu’il n’est a priori pas largué physiquement, l’hypothèse n’est pas si fantaisiste. Et au fond, Ben Arfa doit un peu l’espérer. Car si retourner avec une ex est compliqué, se pavaner avec sa nouvelle conquête devant son ancienne dulcinée reste un plaisir difficile à bouder.
Par Simon Butel