- Un jour, un transfert
- Épisode 56
Ben Arfa au PSG : Du Paris magique au pari tragicomique
Cet été pendant le mercato, So Foot revient chaque jour de la semaine sur un transfert ayant marqué son époque à sa manière. Le 56e épisode est consacré à l'arrivée en grande pompe d'Hatem Ben Arfa au Paris Saint-Germain à l'été 2016. Libre de tout contrat et ardemment courtisé, le milieu offensif est accueilli comme un prince par le champion de France. Des attributs qui lui seront rapidement retirés avec tout le temps passé sur le banc (seulement neuf titularisations), puis sa mise au ban.
Percée foudroyante contre Caen, frappe magistrale au Parc des Princes, petit chef-d’œuvre face au Gazélec, triplé contre le Stade rennais… Hatem Ben Arfa régale l’Hexagone en 2015-2016, exercice qu’il conclut avec 17 buts et 6 passes décisives, une place dans l’équipe type des Trophées UNFP et une nomination au titre de joueur de l’année. Le magicien azuréen en a étourdi plus d’un. Ses numéros de charme ont largement séduit, et suscité certains appétits… Le président Jean-Pierre Rivère estime avoir « une chance sur 100 de le conserver » et le 28 juin 2016, le boss du Gym doit se résoudre et mettre fin au faux suspense : « Hatem Ben Arfa ne sera plus à Nice la saison prochaine. » Trois jours plus tard, le verdict tombe : HBA réalise « un rêve (qu’il poursuivait) depuis l’enfance » et s’engage pour deux ans avec le Paris Saint-Germain, quadruple champion de France en titre. Le Petit Prince, au Parc.
Les textos de Jean-Michel, l’appel de Nasser
Jean-Michel Aulas avait pourtant placé ses pions. Très tôt, à coups de textos envoyés dès le mois de février pour signifier à son ancien joueur son intérêt. « Nous avons transmis une offre. Il fait partie de nos priorités. Il a envie de revenir. Il est réceptif », glisse-t-il carrément sur beIN Sports à la mi-mai. « Le président Aulas a de grosses ambitions pour l’OL, notamment grâce à son Grand Stade, explique Ben Arfa dans France Football. La perspective était très alléchante. J’avoue que j’étais très emballé. Mais mes conseillers m’ont mis en garde sur les dangers d’un retour, une opération pas toujours évidente, et sur les risques d’une précipitation. J’ai eu raison de les écouter, car par la suite, des « gros » sont venus aux nouvelles comme Chelsea, le Bayern Munich ou Barcelone. »
Ça se bouscule au portillon, et le Barça tient la corde un bon moment. « Ça fait un peu tourner la tête, admet alors le joueur, (mais) ça aurait été compliqué pour moi là-bas, puisqu’une équipe est déjà en place et qu’il aurait fallu faire très très fort pour se glisser dans cette équipe. » HBA est sur le point de signer au FC Séville, tout juste vainqueur de la C3… mais le PSG trouve les arguments pour renverser la vapeur. Financiers, avec un salaire mensuel brut de 500 000 euros, mais pas que. « Au dernier moment, j’ai eu des discussions avec les dirigeants qui m’ont dit de bien réfléchir. Ils m’ont dit que si je voulais gagner la Ligue des champions, il valait mieux signer à Paris. Cela m’a bien fait réfléchir, et j’ai opté pour le fait de venir ici. »
L’Équipe 21, Dupraz et la very bad blague
Fier de son coup, Nasser al-Khelaïfi présente son nouveau joyau tout sourire devant la presse. « C’est un grand moment pour le club. J’ai très confiance en Hatem, car c’est un grand talent et un grand joueur. Merci à lui d’avoir choisi le PSG (…), merci à lui de croire en notre projet. » Une fois son tour venu, le natif de Clamart exprime son bonheur et sa fierté de revenir « à la maison », annonce son intention de « donner de l’émotion aux gens » et assure : « Si on m’avait donné le choix entre faire l’Euro ou aller au PSG, j’aurais opté pour le PSG. Pour moi, ce n’est pas une revanche, mais cela compense vraiment largement le fait de ne pas avoir fait l’Euro. » HBA se permet même d’amuser la galerie avec son numéro de maillot : « J’ai demandé les numéros qui étaient disponibles et comme j’aime beaucoup L’Équipe 21, j’ai opté pour le 21. »
Le 6 août, il étrenne ses nouvelles couleurs à l’occasion du Trophée des champions. Titulaire en position de 9, HBA ouvre son compteur au bout d’une demi-heure, d’une frappe imparable. Le nouveau numéro 21 parisien profite de la blessure d’Edinson Cavani pour enchaîner une deuxième titularisation, contre Bastia, pour l’ouverture du championnat. Quand elle ne porte pas ses crampons, la star du mercato du PSG est chez elle, dans son duplex de Neuilly, à jouer aux échecs ou au Monopoly, et à profiter de sa terrasse avec vue sur la tour Eiffel. Des activités pour lesquelles Unai Emery lui offre rapidement plus de temps puisqu’il décide de ne pas le convoquer lors de quatre matchs d’affilée. « C’est un choix purement sportif, je prends les meilleurs », justifie le coach en l’appelant publiquement à « travailler plus ». L’entraîneur toulousain Pascal Dupraz s’en amuse même : « Si Ben Arfa a un mal-être, et je dis bien si, c’est au conditionnel, et qu’il veut venir à Toulouse en prêt avec le salaire intégralement pris en charge par le PSG, nous on le relance. »
Les mots font rire autant que souffrir : nous sommes en septembre, et Ben Arfa a déjà besoin d’être relancé. Si Emery le réintègre et le lance dans le onze pour son retour à Lyon (Di María et Pastore étant forfaits), les titularisations restent une exception. La Coupe de France lui offre un peu d’air. Le quart contre Avranches sera néanmoins l’ultime représentation de l’artiste. À la suite d’une « blague » sur la difficulté à joindre Nasser al-Khelaïfi pas très appréciée de l’intéressé, le natif de Clamart finit la saison à l’écart. Ben Arfa passe plus d’un an sans jouer, souvent envoyé en réserve. Son seul match en 2016-2017 ? 45 minutes avec le Variétés Club de France. Il va néanmoins au bout de son contrat, refusant les offres extérieures. La rupture est actée des deux côtés. Le clan Ben Arfa dénonce un harcèlement moral, saisit la commission juridique de la Ligue et réclame plus de 7 millions d’euros aux prud’hommes, où il sera débouté en décembre 2019. « La maison » ne fait pas de cadeau.
Par Quentin Ballue