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Belgique-France : vis ma vie de supporter d’un club filiale

Par Raphaël Brosse
Belgique-France : vis ma vie de supporter d’un club filiale

Racheter un club pour en faire la filiale d’un autre, voilà un procédé qui s’est répandu dans l’écosystème du foot au cours des dernières années. Aujourd’hui, plusieurs écuries françaises bénéficient de liens privilégiés avec une formation évoluant en Belgique, à l’image de Nancy (Ostende), Monaco (Cercle Bruges) et Metz (Seraing). Quand les premiers peuvent faire aller et venir des joueurs selon leur bon vouloir, les seconds doivent en général accepter des entorses à leur indépendance contre un apport financier salvateur. Mais, au fait, comment les supporters de ces équipes satellites vivent-ils cette situation ? Enquête.

La première histoire se passe face à la mer du Nord. À Ostende, cité balnéaire bien connue pour son port, sa plage, son fort Napoléon… et son club de football, le KVO. Depuis mai 2020, celui-ci appartient à un consortium de cinq actionnaires, dont Pacific Media Group et Chien Lee. Bien connus en France pour avoir été aux manettes de l’OGC Nice de 2016 à 2019, le fonds d’investissement américain et l’homme d’affaires sino-américain détiennent aussi l’AS Nancy-Lorraine, qui a intégré cette nébuleuse (également composée du FC Thoune, Barnsley, Den Bosch et Esbjerg) le 31 décembre 2020. D’un côté, une valeur sûre du championnat belge, solidement installée en milieu de tableau de Jupiler Pro League. De l’autre, le cancre de la Ligue 2, qui court toujours derrière son premier succès de la saison. Chez les deux, un même président, Gauthier Ganaye, qui a clamé sa volonté de voir les Nancéiens retrouver l’élite au plus vite. Au point de faire du Chardon le club phare de ce projet naissant ? Pas sûr que l’idée plaise à tout le monde. « S’il doit y avoir une hiérarchie, il est clair pour nous que nous sommes numéro 1 », tranche Peter Van Nuffel, président des Kustboys, groupe de supporters du KV Ostende.

Les curieux mouvements observés cet été sur le marché des transferts semblent pourtant indiquer le contraire. Surveillée de près par la DNCG, l’ASNL s’est habilement servie de ses nouveaux liens avec son allié belge pour contourner l’encadrement de sa masse salariale et son interdiction de recrutement à titre onéreux. Mickaël Biron, Thomas Basila et Andrew Jung – pour ne citer qu’eux – ont ainsi d’abord signé à Ostende avant d’être prêtés aux Lorrains. De quoi provoquer une levée de boucliers dans les rangs des dirigeants de L2, qui ont hurlé à la concurrence déloyale. Mais pas chez les fans des Côtiers qui, pour l’heure, préfèrent attendre et constater avant de juger. « Nous espérons seulement que nos joueurs prêtés à Nancy vont s’améliorer et seront plus forts quand ils reviendront chez nous », se contente de lâcher Peter Van Nuffel, davantage préoccupé par une autre menace : « Notre principale crainte, c’est qu’à terme, notre club perde son identité. Pour le moment, on ne peut pas franchement se plaindre. Nous avons aussi un très bon centre de formation. Nous tenons à ce qu’il ne soit pas négligé et que nos gamins puissent avoir leur chance. »

Des supporters du KV Ostende, en février 2019.

« Nous ne sommes même pas Monaco B, mais plutôt Monaco C ou D »

Direction la Venise du Nord, à même pas 30 bornes d’Ostende. Dans l’ombre d’un Club Bruges tout-puissant sur la scène nationale et de plus en plus bluffant en C1, le Cercle cherche désespérément à retrouver un rang digne de son glorieux passé (trois titres de champion et deux Coupes de Belgique au compteur). En mai 2017, l’AS Monaco en est devenue l’actionnaire majoritaire. Quatre ans plus tard, le bilan n’est pas des plus flatteurs. Il suffit d’en discuter avec Chris Honoré et Frans Houthoofd, deux quinquagénaires habitués des travées du stade Jan-Breydel, deux fidèles parmi les fidèles, pour le comprendre. « Quand Monaco est arrivé, j’ai d’abord été soulagé parce que le futur à court terme du Cercle était très flou », rembobine le premier. « Nous existons toujours, c’est vrai, mais c’est bien la seule chose dont on peut se féliciter », assène le second, alors que ses protégés viennent de se faire gifler à la maison par l’Union saint-gilloise (0-3) et qu’une nouvelle saison passée à galérer en bas de tableau se profile.

Les joueurs prêtés par Monaco ne sont pas motivés. Ils n’ont pas le cœur vert, le Cercle ne signifie rien pour eux.

L’ASM profite de chaque intersaison pour refourguer plusieurs joueurs à son club filiale. Et elle escompte bien que ces éléments prêtés puissent bénéficier d’un temps de jeu conséquent sous la tunique vert et noir. Pour les deux amis brugeois, cette dépendance à des consignes venues directement de la Principauté représente un sacré problème. « Les dirigeants monégasques décident de qui doit jouer ou pas, explique Frans. Ils veulent juste que certains jouent suffisamment de matchs pour pouvoir être revendus ensuite. Or, ces joueurs ne sont pas motivés. Ils n’ont pas le cœur vert, le Cercle ne signifie rien pour eux. Chaque année, tout l’effectif change, et nous avons droit à une nouvelle équipe. Et ce n’est plus marrant du tout. » Si Paul Nardi, Giulian Biancone, Irvin Cardona ou Strahinja Pavlović ont su se montrer à leur avantage par le passé, les joueurs prêtés par le club du Rocher sont « moyens, au mieux », note Chris. « D’autres sont complètement nuls, ajoute son camarade de tribunes. Nous ne sommes même pas Monaco B, mais plutôt Monaco C ou D. En fait, nous sommes contents que le Cercle soit toujours dans le monde professionnel, mais pas de la manière dont les choses se passent maintenant. L’ASM devrait nous prendre davantage au sérieux. »

« Metz, un cadeau du ciel »

Cap, enfin, vers la Wallonie. Vers Seraing plus précisément, ville industrielle située non loin de Liège. Les supporters du club local, le RFC Seraing, vivent leur meilleure vie, et pour cause : leur formation participe actuellement à la première saison de son histoire – du moins, avec ce matricule – au sein de l’élite belge. Il y a quelques années pourtant, ce qui était alors le RFC Sérésien naviguait dans l’anonymat du monde amateur, en 1re provinciale liégeoise. Son rachat, le 1er juillet 2013, par Bernard Serin – qui est également à la tête du FC Metz – a toutefois changé beaucoup de choses, tant financièrement que sportivement. « Ce partenariat avec Metz, c’est un cadeau du ciel, affirme même François Mazzara, président de l’association Les Rouge & Noir. Sans ça, on serait au moins deux divisions plus bas. » Avant d’ajouter, comme pour justifier son enthousiasme : « Le président Serin, c’est quelqu’un qui connaît très bien notre région et qui habite dans un pays voisin. Il y a une relation de confiance. Ce n’est pas comme s’il s’agissait d’un investisseur installé à l’autre bout du monde et susceptible de se retirer n’importe quand. »

Les joueurs de Seraing célèbrent avec leur public après une victoire contre le Cercle Bruges.

Pour aider leurs cousins belges à se maintenir au plus haut niveau, les dirigeants grenats leur ont laissé en prêt des joueurs majeurs de l’exercice précédent, à commencer par l’international gambien Ablie Jallow et, surtout, la pépite géorgienne Georges Mikautadze, meilleur buteur la saison passée (19 buts en 21 apparitions) et auteur d’un triplé le week-end dernier face à Zulte-Waregem (5-1). Les Sérésiens en sont ravis, même si le FCM est susceptible de rapatrier ses talents quand bon lui semble. « C’est la raison d’être de cette affiliation et, de toute façon, si un joueur de Seraing est très bon, il finira par partir quoi qu’il arrive », relève, pragmatique, François Mazzara. Ce dernier reconnaît néanmoins que la situation actuelle ne fait pas que des heureux. « Certains préféreraient être indépendants, quitte à jouer à un niveau inférieur, avoue-t-il. Car nous devons privilégier les joueurs prêtés par Metz et, forcément, ça ferme des portes à des jeunes du coin. Malgré tout, nous sommes une majorité à être satisfaits de ce qui nous arrive. » Depuis que Serin est là, les supporters de Seraing sont plus sereins. Dit comme ça, tout semble plus logique.

Dans cet article :
Le club belge d’Ostende à 24 heures de la faillite
Dans cet article :

Par Raphaël Brosse

Tous propos recueillis par RB.

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