- Ligue des champions
- Quart de finale aller
- PSG/Barcelone (2-2)
Beckham : plan B comme Bankable !
C'était écrit. Contre le Barça, ce serait Matuidi-Verratti en milieux défensifs. Surprise ! C'est David qui a fait la paire avec Blaise. Retour sur un coup de poker inattendu et globalement satisfaisant…
El-Khelaïfi marque un point
Deux mots pour commencer. Ceux qui critiquent aujourd’hui Carlo Ancelotti pour son option Beckham plutôt que Verratti (cf. L’Équipe de ce matin : « Beckham, une surprise et un flop » et noté 3/10) devraient avoir l’humilité de respecter « il mister » . Savent-ils mieux que lui comment aborder un match de C1, lui qui en a gagné quatre ? Oui, Carlo se plante parfois et son choix Beckham se discute, on va en parler plus loin. Mais pour un quart de Ligue des champions, mieux vaut lui faire confiance. C’est même pour ça qu’on l’a engagé. Deuxio : le poids de Nasser Al-Khelaïfi, le président du PSG. C’est dans une interview à L’Équipe du lundi 1er avril que l’on peut trouver quelques raisons aussi de la titularisation du Beck : « Je tiens à dire qu’avoir atteint les quarts de finale est en soi un excellent résultat. (… )Ce quart contre Barcelone est un challenge immense. Au Moyen-Orient, ma région d’origine, je peux vous dire que 100 % des gens suivront ce match, beaucoup plus que Bayern-Juventus. » Traduction ? Paris, leader de L1, dispute un quart de C1, objectif annoncé en début de saison. Nasser laissait entendre qu’une élimination parisienne ne serait pas un drame…
Impression confirmée après le match quand le boss qatarien s’est félicité du bon résultat (2-2). Le quart contre le Barça, « meilleure équipe du monde » , était une bénédiction pour braquer les lumières de la planète foot sur un évènement considérable. C’était donc l’occasion d’utiliser Beckham, engagé pour un contrat court, encore crédible sportivement et toujours ultra médiatique. Nasser, encore, dans L’Équipe, lundi : « Recruter David a été une de mes meilleures décisions. En tant qu’homme, joueur, ambassadeur, il est exceptionnel. Tout le monde l’adore. » Qui pouvait donc être surpris de voir l’Anglais titularisé hier ? Son périple en Chine très critiqué entre même aujourd’hui en totale synergie avec la stratégie comm’ du PSG. Beaucoup de fans asiatiques ont suivi ce PSG-Barça. Le résultat final devait aussi valider l’option Beckham. Bingo ! Un bon et beau 2-2 a finalement donné raison à Nasser, à Carlo et à Leo. Le monde entier a vu Beckham (qui a joué 70 minutes). Le monde entier a vu le Barça, Messi, le PSG et son maillot bleu, Paris, le Parc, Zlatan, Thiago Silva, Ancelotti ! Une réussite à 100 %. Le risque calculé de Carlo
Est-ce à dire qu’Ancelotti se fait indirectement dicter des choix « médiatiques » qui empiéteraient sur son domaine sportif ? Oui, un peu. En signant à Paris, Carlo s’investissait forcément dans le « grand projet parisien » . Du temps des Galactiques, chaque entraîneur du Real se savait « obligé » d’aligner les Zidane plutôt que les Pavon. Et puis à Chelsea, Carlo a souvent utilisé, sans doute malgré lui, parfois, un Torrès pas vraiment performant mais chouchou du boss Abramovitch (de janvier à mai 2011)… Alors, hier soir, Carlo a préféré Beckham à Verratti. Il a pris un risque ? Oui. Mais un risque calculé, dans le sens où une élimination finale contre le Barça ne le condamnera pas. Petit rappel : son contrat de coach comporte une prolongation automatique d’un an au cas où Paris finirait sur le podium en championnat. C’est bien parti pour et Carlo est partant pour poursuivre au PSG. La menace Mourinho plane encore, mais le Portugais est plus pressenti vers l’Angleterre. À voir… Motta était donc out. Mais le risque Beckham, pour ce match au sommet hyper exigeant en efforts défensifs, valait le coup d’être tenté. Du point de vue expérience, d’abord. Dans ce contexte exceptionnel, l’impulsif Verratti était capable de faute grave, capable de péter les plombs, de trop garder le ballon et de le perdre. Reste que ses qualités (jeu long, capacité à fluidifier le jeu entre les lignes, harcèlement défensif) auraient pu aussi servir. Mais c’est l’expérimenté Beckham (105 matchs de C1 au compteur, quand même !) qui a été titulaire pour ses qualités propres : il est plus posé, il devait rendre les ballons propres et on comptait sur lui pour son jeu long en première intention et pour sa précision sur les coups de pied arrêtés. C’est exactement ce qu’a justifié Ancelotti après le match : « David a cette capacité de jouer vers l’avant et à changer le jeu. C’est aussi un très bon passeur, c’est la raison pour laquelle je l’ai aligné. »
Dans tous ces domaines-là, Beckham a globalement donné satisfaction, notamment en début de première mi-temps quand Paris a bousculé le Barça. De bonnes relances en transversales, deux ou trois corners bien sentis et un bon coup franc indirect sur la tête de Pastore. Petite fausse note : c’est quand même Zlatan qui frappe (bien) le coup franc direct à 20 mètres (16e). Sur le plan défensif, le bilan est plus mitigé : David a été plus dans l’accompagnement du possesseur du ballon adverse (Xavi ou Iniesta) que dans le harcèlement. Matuidi chassait férocement le ballon, quand Thiago Silva mettait « pied devant » face à Messi avec autorité. Sur la même ligne défensive du milieu, outre Moura plus porté vers le contre, Pastore en a fait plus que David, en serrant lui aussi dans l’axe quand, à gauche, Maxwell marquait Alves… Conclusion : faire jouer David dans l’axe défensif pour les grands matchs, c’est donc l’entourer d’au moins deux milieux qui bossent dur pour compenser son manque de rythme et d’agressivité. Ça pose problème. 70 minutes pile…
On a donc eu la preuve que Beckham n’est plus taillé pour ces matchs au sommet, surtout au vu de l’entrée plus dynamisante de Verratti qui l’a remplacé à la 70e ? Sans doute. Mais il faut relativiser. Beckham a joué l’essentiel du temps où Messi était là (toute la première mi-temps), donc au moment où le Barça pressait et que le prodige argentin faisait planer la menace, même sans ballon. Dans ce contexte, tout Paris a reculé et malgré leur bon départ, même Zlatan, Lavezzi, Moura et Pastore ont baissé de pied. En seconde mi-temps, Paris a joué plus haut et David est aussi monté d’un cran, délaissant sa zone devant ses 16 mètres pour contribuer, plutôt pas mal, en relances claires parties du rond central. Normal : Messi n’était plus là et Paris jouait le tout pour le tout pour égaliser. Imputer le but de Messi à Beckham n’est pas très fair-play : David a juste repoussé de la tête au loin un premier renvoi défensif aérien (38e). Sur la relance de Dani Alves vers Messi, c’est plutôt les défenseurs parisiens qui sont coupables de leur manque de vigilance et de leur replacement lent et aléatoire quand l’Argentin est parti marquer dans leur dos…
Enfin, Beckham a montré également plus de combativité en seconde mi-temps, récoltant même un carton jaune sur faute contre Sánchez, signe aussi qu’il était au bout de ses forces (67e). Voilà, hier soir, Beckham n’a pas sombré. Il n’a pas été ridicule. Et en face, c’était quand même le Barça, soit le maximum planétaire d’emmerdements à défendre, contrer, courir après le ballon. Verratti aurait-il fait mieux ? Peut-être. C’est d’ailleurs ce « peut-être » qui semble avoir conforté Ancelotti dans son choix initial de titulariser l’Anglais : « Beckham a été une des clefs du bon début de match de Paris. » Pas faux… Mais l’avenir du PSG en milieu défensif penche plus en faveur du jeune Italien ou bien d’un vrai cador expérimenté, en attendant d’abord le retour de Motta.
David pas mort
Le choix de recruter Beckham se révèle pour l’instant crédible, à défaut d’autre chose. En tout cas, ce n’est pas du tout le fiasco que beaucoup prédisaient. Globalement, Beckham jouit surtout d’un triple soutien important. Celui de Nasser El-Kahlaïfi qui souhaite officiellement le prolonger pour la saison prochaine. Celui de Leonardo, ensuite : point de vue image et professionnalisme, David a encore été très classe avec la presse hier soir. Comme d’hab, il s’est montré souriant et disponible… quand un Ménez insultait les fans, lundi, au sortir du Camp des loges ! Enfin, « Beckman » a aussi le soutien de Carlo Ancelotti. Un lien fort et loyal de quasi-compagnonnage unit les deux hommes. En 2009, l’Italien avait déjà sollicité l’Anglais en prêt du LA Galaxy vers Milan : c’était le choix du talent, de l’aura et du professionnalisme qu’il voulait faire déteindre sur l’effectif rossonero. Carlo fait de même avec le groupe parisien qui le respecte. Une fois de plus, il faut faire confiance à Ancelotti. S’il n’avait pas été convaincu de l’apport potentiel de Beckham pour ce quart contre le Barça, Carlo ne l’aurait pas fait jouer. Alors, David titulaire au Nou Camp ? Ou joker de luxe ? Allez savoir… Ce matin, d’un strict point de vue sportif, David n’est donc pas mort. Et en C1, Paris est encore en vie. Que demande le peuple ?
Par Chérif Ghemmour