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« Beaucoup ont trop de respect pour l’Allemagne »
Avant l'Euro, depuis son bureau au VfL Wolfsburg, Pierre Littbarski nous a raconté les liens ténus qu'entretiennent la France et l'Allemagne au football, tant dans les confrontations directes que dans les visites chez l'adversaire. Sans oublier son passage mitigé par la France, sous les couleurs du Matra Racing au milieu des années 80.
Pourquoi l’Allemagne bat toujours la France ?Pas à chaque fois ! Pour les matchs des années 80, on a eu souvent de la chance. Mais je crois que si une équipe gagne quelques fois, en particulier dans les matchs au sommet, alors l’adversaire commence parfois à avoir un peu trop de respect. Il n’est plus à 100 % dans son match quand il affronte encore une fois la même équipe. C’est un avantage pour l’Allemagne dans ce genre de compétitions : beaucoup ont du respect pour cette équipe.
Par exemple, la demi-finale de 1986, c’est une question de trop-plein de respect de la part des Français donc ?Oui, je le crois, parce qu’ils auraient dû gagner ce match. Ils étaient meilleurs que nous. On a marqué sur un coup franc de Brehme, je crois, et c’est à peu près tout dans ce match (il y a un deuxième but de Völler en fin de match, ndlr). On a eu de la chance de gagner, encore et encore, et la meilleure équipe a été éliminée.
En 1982, quand l’Allemagne revient du 3-1 au 3-3, ce n’est pas le même scénario en revanche. Comment est-ce possible que la France ne se qualifie pas pour la finale ?Je crois qu’ils ont pensé avoir gagné trop vite, quand ils avaient deux buts d’avance. Pour eux, le match était déjà fini. C’était peut-être leur erreur. Le reste, c’est une nouvelle fois une question de chance. On a voulu y croire alors que tout semblait perdu. On s’est battus jusqu’au bout. Mais surtout, on a eu de la réussite que cela fonctionne.
Paradoxalement, pour l’équipe nationale, venir en France n’est pas forcément un très bon souvenir… Par exemple, en 1998, c’est la dernière fois que la Nationalmannschaft ne parvient pas dans le dernier carré d’une Coupe du monde. Il y a une raison à cela ? Je ne crois pas que cela ait quelque chose à voir avec la France, en fait (rires). Si on avait joué contre la France à l’époque, oui, peut-être que le contexte aurait pu jouer et expliquer une contre-performance. Mais sinon… Et puis les conditions sont bonnes, les stades sont beaux, l’atmosphère dans les stades est de qualité. Je n’ai pas le sentiment que ça puisse être un problème pour nous.
Pourtant, pour vous aussi, sur un plan personnel, la France n’est pas un souvenir idéal. En 1986, vous signez au Matra Racing, qui développe de grosses ambitions sur le championnat de France. Les résultats ne suivent pas et vous partez dès la fin de la saison. Pourquoi n’avoir joué qu’un an à Paris au final ?Cela ressemble à la fin de ma carrière en Nationalmannschaft (suite à la victoire à Rome, en 1990), je ne pouvais plus apporter vraiment quelque chose à cette équipe et j’ai préféré m’arrêter. Je voulais mieux jouer et avec le Racing Paris, l’équipe n’était pas trop en réussite, même si nous avions beaucoup de bons joueurs. Et pour moi, je n’avais évidemment que très peu de plaisir dans cette équipe, en partie à cause des résultats. Je n’étais pas heureux, le club n’était pas heureux. On a donc choisi de se séparer.
C’est dur pour un Allemand de jouer en France ? Est-ce que l’acclimatation est compliquée ?Je ne crois pas. À mon époque, il y avait déjà Klaus Allofs, Karl-Heinz Förster et quelques autres qui ont fait leur carrière en passant par la France… Ceci dit, pour nous, je ne sais pas si c’est très intéressant de venir. On peut jouer en Allemagne à un haut niveau, alors pourquoi partir ? Kevin Trapp est allé au PSG parce que c’est une équipe qui fonctionne bien. Il y a Monaco, Lyon… Au final, il n’y a pas beaucoup de clubs en France qui peuvent offrir les mêmes possibilités que celles de la Bundesliga.
Propos recueillis par Côme Tessier