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Bayer encore, j’avais vingt ans
Le 16 septembre 2014, Bernardo Silva, vingt piges à peine, se révélait aux yeux de l’Europe grâce à une entrée réussie face au Bayer Leverkusen. Deux ans et cent matchs avec Monaco plus tard, le Portugais se pointe face aux Allemands avec un autre statut.
Il est 21h57 ce mardi 16 septembre à Monaco et la NASA vient de déclarer que « la traque des astéroïdes dangereux manque de sérieux » juste après que Robin Thicke a avoué qu’il n’avait pas écrit Blurred Lines car « il était défoncé à la Vicodin et à l’alcool » . Shooté à l’ennui et au Valium après 57 minutes d’une rencontre lors de laquelle son AS Monaco et le Bayer Leverkusen n’ont toujours pas cadré une frappe, Leonardo Jardim prend note de l’inquiétude de la NASA et balance l’astéroïde Bernardo Silva 15 en orbite pour la première fois en C1. C’était il y a deux ans déjà, le jour des quarante ans de Casimir, une époque où Anthony Martial était à des années-lumière de Manchester United, où Lucas Ocampos n’était pas encore une comète et où Dimitar Berbatov marchait, mais pas sur la Lune. Une rentrée des classes européennes en guise de bol d’air pour les coéquipiers de Toulalan, avant-dernier de Ligue 1 après trois défaites en cinq matchs. Entré en jeu 14 minutes lors d’une rouste encaissée à Bordeaux (4-1) le 17 août, Silva n’a pas joué une seule seconde jusqu’à cette 57e minute de jeu et la sortie de Lucas Ocampos. Une bonne demi-heure plus tard, la donne a changé. De ce match découleront 25 titularisations et six entrées en jeu en Ligue 1. Oui, malgré une utilisation plus réduite en C1 cette année-là (à l’exception de la double confrontation face à la Juventus en quarts), cette rencontre face à Leverkusen a lancé le Bernardo de Monaco. Un homme qui ne devrait pas atterrir tout de suite.
Des mikados qui font des roulettes
Frêle. Presque malade. Quand il entre en jeu avec son short un peu trop grand et ses mikados en guise de jambes, c’est l’inquiétude qui domine chez les téléspectateurs. Vite, on se rend compte que le gamin a du ballon. Presque aussi vite, on réalise que son jeu fait de provocations dans les petits espaces devrait lui valoir quelques détours par la case « cul par terre » . Mais dans ce match bloqué, globalement dominé par des joueurs de Leverkusen maladroits – Bellarabi et Son en tête –, l’entrée du Portugais va tout changer. 61e minute, João Moutinho plante un but un poil chanceux suite à un bon boulot de Berbatov. Le reste, c’est Silva qui s’en occupe. Monaco peinait à se créer des occasions ? Le gamin lance Carrasco dans la profondeur de l’extérieur du pied. Monaco ne savait pas garder le ballon ? Le joueur prêté par le Benfica enchaîne roulette, roulette et crochet dans un mouchoir de poche pour conserver la balle. À Louis-II, on n’avait pas vu grand-chose en une heure, mais après 90 minutes, on en sait un peu plus, avec trois points bonus en poche, pour le plus grand bonheur de Moutinho : « Comme je l’ai dit la première fois que j’ai parlé de Bernardo Silva, il a de grandes qualités. Il l’a prouvé ce soir en nous aidant à gagner. » Des preuves, le joueur de poche talentueux devra encore en faire. Car malgré un rôle plus important dans l’équipe suite à cette première réussie, Silva doit encore apprendre que chez les grands, semer la pagaille doit aussi rimer avec bleu de travail.
Viens voir le magicien
Pour un gamin qui a toujours joué en rouge, enfiler le bleu de chauffe n’est pas toujours une tâche aisée. Surtout que pour Bernardo, vingt ans tout juste, le prêt à Monaco constitue déjà une échappatoire à un horizon bouché. « Au Benfica, il y avait un petit problème avec le coach, déjà (il sourit). L’année où je pars, il y avait aussi énormément de bons joueurs. Il y avait Gaitán, Aimar, Salvio, Marković… Ce n’était pas facile. Et moi, j’étais très jeune… J’ai fait tout mon possible pour pouvoir jouer avec les pros, mais malheureusement, je n’ai pas réussi. Mais je suis content de la tournure qu’a prise ma carrière, je ne regrette pas, j’ai joué la Ligue des champions, je joue dans une bonne équipe, c’est cool » , se remémore-t-il aujourd’hui. Finalement, Silva aura besoin de temps sous la houlette d’un Jardim à la mentalité pas toujours raccord avec la sienne pour corriger ses points faibles et s’affirmer en tant qu’homme et que joueur. « La Ligue 1, c’est physique et agressif. Avec beaucoup de joueurs travailleurs. Moi, je te le dis, même si parfois c’est frustrant, je préfère mal jouer et gagner que pratiquer un football flamboyant et perdre. » Deux ans après, de Leverkusen à Leverkusen, Silva facture 100 matchs avec Monaco, 20 en Coupes d’Europe et est international portugais. Auteur de son premier but en sélection juste avant son premier but en Ligue des champions, il n’est plus seulement un corps de lâche aux pieds magiques, il est un danger permanent. Manque de bol pour lui, il paraît que la défense de Leverkusen surveille mieux les astéroïdes dangereux que la NASA.
Profitez de nos bonus et pariez sur le match Monaco-LeverkusenPar Swann Borsellino