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Battles : « J’ai échangé une heure avec Benjamin Nivet au téléphone »
Nommé entraîneur de l’ES Troyes Aube-Champagne à la suite du départ de Rui Almeida pour Caen, Laurent Batlles démarre sa première expérience en tant qu’entraîneur numéro un au sein d’un club professionnel. L’occasion de discuter avec l’ancien meneur de jeu sur son arrivée, ses premières rencontres et surtout sa philosophie.
Bonjour Laurent ! L’ESTAC vient de terminer sa saison sur un barrage de Ligue 2 perdu face au RC Lens. Quel est l’objectif fixé par votre direction sur les deux saisons au club, votre contrat prenant fin en juin 2021 ? L’objectif dans un premier temps, comme le dit mon président (Daniel Masoni, N.D.L.R), c’est d’acquérir un maintien relativement facile. Par la suite, il faut espérer plus. Je sais dans quoi je m’engage : le championnat de Ligue 2 est difficile, long. Il faut prendre des points rapidement pour bien se situer dans ce championnat, et je ne dirais pas que l’objectif est la montée. Nous avons déjà perdu beaucoup de joueurs, et nous sommes actuellement en reconstruction. Maintenant, je n’ai pas accepté le projet pour me retrouver avec une équipe qui n’est pas compétitive. Actuellement, nous travaillons d’arrache-pied pour récupérer des joueurs, nous verrons ce qu’il se passe ensuite. Nous serons à l’affût de cette première partie de tableau, voire des places de barragistes.
Cette période de sept années dans l’organigramme de l’AS Saint-Étienne a sans doute été très formatrice. Qu’est-ce que vous avez retenu de ce passage depuis votre retraite sportive en 2012 ? Déjà, mes deux années à l’ASSE en tant que joueur ont été extraordinaires. Ensuite, les sept années suivantes en tant qu’adjoint ou entraîneur des jeunes catégories m’ont appris le métier. J’ai passé mes diplômes, j’ai travaillé dans la sérénité. Après mon apprentissage avec Christophe Galtier, j’ai souhaité passer à autre chose par la suite. C’était un passage obligatoire dans lequel j’ai bénéficié de beaucoup d’enseignements, et j’ai pu parfaire cette formation avec l’équipe réserve pendant trois ans en tant que coach principal. Nous sommes montés en N2 il y a deux ans, et nous nous sommes maintenus la saison dernière. Tous les coachs que j’ai pu connaître à Saint-Étienne vont me servir dans ma manière d’aborder les choses, mais j’aurai un style bien personnel. Les idées de jeu seront issues de moi-même.
Justement, vous avez déclaré pendant votre conférence de presse être un entraîneur qui aime « conserver le ballon et jouer dans la partie de terrain adverse » . D’un point de vue plus concret sur le plan tactique, qu’est-ce que vous pensez mettre en place avec l’effectif à votre disposition ?
Pour parler des schémas tactiques, il me faut d’abord un effectif. Et aujourd’hui, l’effectif est encore en construction. Peut-être que je vais démarrer avec un schéma précis, puis changer en cours de saison. Peut-être que ce système sera approprié à ce que je recherche ou peut-être que dans un match, je vais changer de dispositif en fonction de mon adversaire.
En toute franchise, j’ai regardé uniquement le match de barrages de Troyes contre Lens, donc je n’ai pas analysé plus que cela le travail de Rui Almeida. Je sais qu’il a évolué dans un système à trois défenseurs, mais encore une fois cela nécessite l’effectif nécessaire. Pour ma part, je vais chercher à imposer certaines directives, mais pour la tactique, il est encore un peu tôt pour en parler.
Benjamin Nivet, numéro 10 comme vous l’étiez à l’époque, a pris sa retraite la saison dernière à l’ESTAC. Dans un but de connaître davantage votre équipe, est-ce que vous avez échangé avec lui ou pensez-vous le faire ? La première personne avec laquelle j’ai discuté après le directeur sportif et le président, c’est Benjamin. Nous avons eu un échange d’une petite heure au téléphone, et je lui ai proposé quelque chose. De son côté, il avait déjà en tête d’autres idées. Je lui ai demandé de prendre une décision, et elle lui appartiendra. De toute manière, il me paraissait tout à fait normal et logique d’appeler Benjamin, pour tout ce qu’il représente au sein du club. À partir du moment où vous entrez dans un club avec un joueur aussi emblématique, c’est une personne à contacter rapidement. Nous avons pu parler à la fois entre anciens joueurs, car nous nous sommes côtoyés sur le terrain, mais aussi en tant que personnes susceptibles d’agir pour Troyes.
Et vous vous voyez des atomes crochus du point de vue du football ? Nous n’avons pas parlé football. Le football m’appartient et aujourd’hui, je travaille avec mon propre staff technique. Mais bien évidemment que si nous avons à nous croiser un jour, j’aimerais bien m’entretenir avec lui sur certains points pour l’écouter. Mais sur le dernier entretien, nous n’avons pas évoqué cette thématique.
Du point de vue des arrivées, Gauthier Gallon s’est engagé à l’ESTAC pour pallier le départ de Mamadou Samassa en Turquie. Quels sont vos axes de développement et sur quels postes spécifiques travaillez-vous en ce moment ? Nous travaillons sur tous les postes, puisque nous recherchons même un deuxième gardien de but. L’objectif, c’est vraiment de construire l’équipe la plus compétitive possible. Chaque joueur qui intègre l’ESTAC doit permettre d’apporter une plus-value qualitative au-delà de l’aspect quantitatif. C’est une activité réellement plaisante, parce que nous savons au sein de la cellule de recrutement que les départs doivent permettre des arrivées. Et d’ailleurs, c’est grâce à ces arrivées que nos meilleurs joueurs vont avoir le désir de rester, car ils vont sentir que nous construisons une équipe compétitive. Cela va se faire de manière progressive, et nous allons voir ce qui est dans nos capacités pour former le meilleur groupe possible.
Finalement, nous ne connaissons pas le Laurent Batlles entraîneur. Dans ce métier, l’humain prend une dimension très forte par exemple… (Il coupe.) C’est exactement ça. Dans mes premiers rendez-vous, j’ai rencontré le directeur du centre de formation et plusieurs personnes avec lesquelles je vais travailler. Et je compte beaucoup m’axer sur l’humain, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du club. À partir du moment où tout le monde est heureux de travailler pour le club, l’équipe se sentira bien aussi. Là, je parle aussi bien des joueurs que de toutes les autres parties prenantes de l’ESTAC.
Alors bien sûr, les résultats auront une influence capitale sur ce développement, mais l’idée est vraiment que tout le monde tire dans le même sens. Quand vous voyez le travail de Jean-Louis (Gasset, N.D.L.R) à Saint-Étienne par exemple, je souhaite m’engager dans cette optique. Avec Christophe et Jean-Louis, nous venons tous les trois du Sud de la France, donc il y a un esprit commun. Il faut du dialogue et du respect envers tout le monde pour avoir une communication positive.
En France, Troyes est considérée comme une école du beau jeu où des fulgurances sont à noter, comme le passage remarqué de Jean-Marc Furlan au club, un entraîneur que vous allez sans doute croiser prochainement en Ligue 2. Est-ce que vous le considérez comme un modèle à suivre ? Un modèle à suivre, je ne sais pas si c’est la bonne expression. Mais comment ne pas s’inspirer de Jean-Marc Furlan quand vous voyez ses résultats obtenus dans ce championnat ? Il n’y a rien à ajouter, c’est un très bon entraîneur. À Troyes, il a su mettre des choses en place pour arriver à de bons résultats et des montées. Ce n’est pas un exemple, mais c’est un homme que l’on va peut-être plus regarder que d’autres. De mon côté, je vais essayer de mettre ma patte sur cette équipe et ce ne sera sûrement pas du Furlan, mais il faut savoir s’intéresser à tout. Par exemple, le coach Perrin s’est aussi très bien illustré à Troyes.
Plus globalement alors, quels sont vos modèles à suivre ? On m’a souvent posé cette question en tant que joueur, et je ne savais jamais quoi répondre. Et en tant qu’entraîneur, je me rends compte que c’est pareil. Franchement, chaque entraîneur possède du bon. Je me souviens lors de l’examen du BEPF, il y avait un rapport de stage personnel à faire sur chaque club et entraîneur. Sincèrement, chaque entraîneur dont j’ai entendu le rapport avait des points positifs à faire valoir : Omar Daf nous avait parlé de Jürgen Klopp à Liverpool, Manu Da Costa avait évoqué Eduardo Berizzo à Séville, Nicolas Usaï expliquait comment travaillait Mauricio Pochettino à Tottenham… Il y a du bon dans chaque entraîneur. De fait, je ne dirais pas qu’il y a un modèle à suivre parce que pour réussir dans un club en tant qu’entraîneur, il faut avant tout avoir de bons joueurs pour mettre en place un système de jeu. Tu ne peux pas arriver et dire que tu vas jouer comme Klopp, c’est insensé. Ma référence, c’est de prendre le meilleur de chacun.
Propos recueillis par Antoine Donnarieix