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Barça et Séville, promoteurs de la nuit du gaspacho
Le FC Barcelone a un temps erré dans une Liga qui ne voulait plus de lui. Une triste histoire qui prend fin le 3 septembre 2003, lorsque les débuts de Ronaldinho épousent la fameuse nuit du gaspacho contre le FC Séville. Récit d’un match à jamais différent.
Entre Ronaldinho et le FC Barcelone, l’idylle démarre le 21 juillet 2003. Ou plutôt le 3 septembre de la même année, selon qu’on attache de l’importance à sa présentation devant 20 000 aficionados barcelonais ou à ses débuts officiels devant le Camp Nou. Contre 27 millions d’euros, l’ancien Parisien doit alors rendre au Barça une ambiance festive et mettre fin à une longue période d’instabilité institutionnelle. Une mission à risques qui s’entame pourtant de la meilleure manière face au FC Séville, premier visiteur de l’antre barcelonaise en cette édition de Liga. Après avoir couru derrière le score pendant près d’une heure – pour cause de penalty inscrit par José Antonio Reyes -, les Blaugrana exultent quand leur Brésilien, à la conclusion d’une mirifique remontée de balle, envoie un missile dans la lucarne de Notario. « C’est durant cette nuit du gaspacho que tout a commencé, rembobine Ronnie en février dernier au micro de la Cadena Ser. Avant le match, on m’avait prévenu : « On va jouer à minuit. » D’abord, je pensais que c’était une blague. Mais quand j’ai vu que c’était vrai, je me suis dit : « Parfait, c’est mon heure ! C’est l’heure à laquelle je suis réveillé. » »
La première nuit blaugrana de Ronnie :
Un porte-parole du Barça : « Le président de Séville nous a menti »
Bien avant cette égalisation symbolique de Ronaldinho, l’actualité autour de cette rencontre entre Catalans et Andalous se joue dans les entrailles du Camp Nou. Alors que le calendrier est agencé avant même le coup d’envoi de la saison, la direction azulgrana articulée autour de Joan Laporta se rend compte que la seconde journée pose problème. Et pour cause, programmée le mercredi 3 septembre à 21h30, elle devra se disputer sans les trois internationaux Rustu, Ronaldinho et Quaresma, tous appelés à rejoindre leurs sélections respectives en ce même jour. Une hérésie pour cette direction barcelonaise de néophytes qui espère la déplacer au mardi. Reste qu’il faut s’entendre avec son homologue du FC Séville, mené par l’inflexible José María del Nido. L’imbroglio dure, l’accord devient caduc, et la direction du Barça décide de trancher dans le vif : la rencontre se disputera bien le mercredi 3, mais à 00h05. « Nous avons été obligés de fixer cet horaire, car le président de Séville n’a pas respecté sa parole, enrage le porte-parole du FCB. Il nous avait dit en privé qu’il acceptait de jouer le mardi avant de changer de décision. »
Pour Joan Laporta et ses sbires, la pression est double : comment remplir un antre aux presque 100 000 strapontins à une heure aussi tardive tout en s’évitant un scandale avec Audiovisual Sport, compagnie qui gère les droits télés ? Aux alentours de 21h, lorsque les portes du stade des Culés s’entrouvrent, le premier élément de réponse est positif. Les aficionados sont venus en nombre des quatre coins de la Catalogne et garnissent à 80 % les tribunes. « C’est le moment de faire front, grogne Adroher, socio de Santa Coloma de Farners interrogé par El Pais. Il faut répondre à l’attaque des pouvoirs du football espagnol. Ça ne serait jamais arrivé au Real Madrid. » Pour contenter et faire patienter les quelque 80 000 supporters, le Barça décide de leur offrir repas et festivités. Alors que Ronald Koeman et Hristo Stoichkov déblatèrent dans la sono, les humoristes de l’émission catalane El Terrat tentent de détendre l’atmosphère sur le pré. Pour caler l’estomac des noctambules, de la charcuterie, du pain et des tablettes de chocolat sont mis à disposition. Histoire de rassurer les quelques Sevillistas, du gaspacho est également distribué.
Gerard : « Il est capable de le faire, il va le faire ! »
Minuit sonne, le gaspacho est englouti, et le spectacle peut enfin commencer. Pourtant, il démarre de la pire des façons : par une ouverture du score de José Antonio Reyes sur penalty dès le dixième tour de cadran. Les minutes s’écoulent, les occasions gâchées par Sergio Garcia s’accumulent, et les nerfs de Luis Enrique grimpent dans les tours. Et ce, jusqu’à l’heure de jeu et un golazo du néo-Blaugrana brésilien. À la réception d’une relance de Víctor Valdés dans son propre camp, Ronnie s’amuse de Marti et Casquero, puis décoche un missile des trente mètres. Ficelle, le Camp Nou explose et déclenche même les sismographes de l’observatoire des tremblements de terre de Catalogne. Un miracle que Gerard, titulaire dans le cœur du jeu, a vécu depuis les premières loges : « Je le voyais arriver avec une telle vitesse balle au pied… Je me disais : « Il est capable de le faire, il va le faire ! » Et finalement, quand j’ai vu sa frappe partir, je savais qu’il allait marquer, alors j’ai commencé à fêter le but avant qu’il ne rentre. » Malgré un nul concédé (1-1), cette rencontre marque le renouveau du Barça sous l’égide de Ronaldinho. Idem, elle reste connue sous le nom de Noche del Gazpacho.
Par Robin Delorme