- Coupe du monde 2014 – Groupe D
- Italie
Balotelli est-il toujours indiscutable ?
S'il est en forme, il joue. C'est plus ou moins ce qu'a fait comprendre Cesare Prandelli depuis qu'il est à la tête de la Nazionale. Sauf qu'à quelques jours du début du Mondial, une question se pose : ce Balo-là est-il vraiment indéboulonnable ? Pas sûr.
Certes, c’est un match amical. Certes, c’est un match entre une équipe nationale et un club. Certes, c’est une équipe-bis. Mais quand même. Impossible de nier qu’il s’est passé quelque chose, dimanche soir, à Manaus. La Nazionale, qui restait sur des matchs amicaux très décevants, et notamment ce 1-1 dingue contre le Luxembourg, affronte le club de Fluminense. Prandelli décide d’aligner une équipe-réserve, avec un trio Cerci-Insigne-Immobile en attaque. Les deux anciens potes de Pescara vont littéralement exploser les compteurs. L’Italie s’impose 5-3, et la paire Insigne-Immobile est tout simplement impliquée sur 100% des buts : trois buts et deux passes dé pour Immobile, deux buts et une passe dé pour Insigne. Au bon souvenir de Zdeněk Zeman, qui a façonné les deux attaquants à Pescara. Autant dire que pour son premier match en tant que joueur du Borussia Dortmund, Immobile a marqué des points. « J’ai vu de grandes choses en attaque, ce soir » , a même lâché Prandelli à la fin de la rencontre, tandis que les deux protagonistes l’ont joué profil bas : « Moi titulaire ? Je me tiens prêt » , a assuré Immobile, tandis qu’Insigne y est allé de sa petite blague : « Pour un Mondial, je veux bien jouer dans les buts. » Capital confiance, capital sympathie, ces deux-là ont tout compris. Tout ça sous l’œil d’un Mario Balotelli qui commence sérieusement à se poser des questions.
Une hype déjà passée ?
Pour Prandelli, c’est lui le titulaire. D’ailleurs, de tous les attaquants du groupe des 23, Balo est le seul à toujours avoir été assuré d’être dans la liste. Pourtant, cette saison, ses performances n’ont pas forcément été grandioses. Il a inscrit 14 buts en championnat, pour une moyenne de 0,46 but par match, et n’a plus marqué avec l’Italie depuis le 15 octobre dernier et un match contre l’Arménie. C’est là que la statistique est décevante : depuis son doublé en demi-finale de l’Euro 2012 face à l’Allemagne, qui l’avait propulsé tout en haut, Supermario n’a planté que huit pions avec le maillot azzurro : 5 lors des qualifs pour le Mondial, 2 pendant la Coupe des confédérations, et un en amical face au Brésil. En deux ans, c’est « bien mais pas top » , pour celui qui est censé être le terminal d’attaque de l’équipe. Surtout, Balo fait moins parler de lui. Avant l’Euro 2012, il était au centre de toutes les attentions. Il venait d’être sacré champion avec Manchester City, était adulé par ci, critiqué par là, et ne laissait personne indifférent. Là, on dirait presque que la « hype » Balotelli est quelque peu passée de mode.
En Italie, lors des dernières semaines, la presse a passé plus de temps à se demander si Prandelli avait bien fait de ne pas emmener Rossi, si Immobile allait être le nouveau Paolo Rossi, si Verratti et Pirlo étaient compatibles, qu’à savoir si Balo allait être le joueur décisif de l’équipe. Non, ce Mario-là, assagi, a juste fait parler de lui en faisant quelques blagues dans l’avion qui ramenait l’Italie au Brésil, et c’est tout. On parlait de la prestation décevante de Pepito Rossi face à l’Irlande, qui lui aurait « coûté » sa convocation, celle de Balotelli face au Luxembourg n’a pas franchement été plus enthousiasmante, contre un adversaire pourtant bien plus faible. Alors, certes, l’attaquant du Milan AC est le genre de joueur qui sait se sublimer lorsqu’il le faut. Avant de marquer son premier but lors de l’Euro 2012, face à l’Irlande, il restait sur une disette de 366 minutes avec le maillot bleu. Là, il en est à 304 minutes, en comptant la demi-heure disputée dimanche soir face à Fluminense. Des similitudes rassurantes ?
87% pour Immobile
Similitudes ou non, rassurantes ou pas, c’est toute l’Italie qui s’interroge. Avec des joueurs en feu comme Immobile et Insigne, faut-il réellement faire confiance à Balotelli ? Ce lundi, le Corriere dello Sport ose poser la question sous forme de sondage : « Contre l’Angleterre, qui doit jouer : Balotelli ou Immobile ? » La voix du peuple est sans appel. Sur les 5 000 premiers votants, 87% ont répondu Immobile. Preuve criante que les Italiens ont déjà choisi leur camp. Peut-être pas seulement un choix tactique et technique. Immobile a ce petit quelque chose que Balotelli n’a pas : déjà, il célèbre ses buts, a l’air heureux d’être là, et vous ne le verrez jamais marcher sur un terrain ou tirer la tronche. Un écart de comportement qui, forcément, dessert Balotelli, dont la cote de popularité en Italie n’a jamais été très élevée en dehors de Milan.
Si Prandelli décidait de titulariser Immobile, ou même quelqu’un d’autre (Insigne, Cerci) à la place de Balotelli, ce serait évidemment un énorme pari et une vraie révolution. Car Mario est, depuis son arrivée en Nazionale, quasi indéboulonnable. En 30 sélections, il a été titulaire à 23 reprises. Et lorsqu’il a débuté sur le banc, il n’a jamais mis bien longtemps avant d’entrer sur la pelouse (54e minute contre l’Arménie et Haïti, 50e contre Saint-Marin). Un peu comme si Prandelli n’arrivait jamais à réellement se priver de son chouchou. N’empêche que, dans quelques jours, le sélectionneur va devoir trancher. D’un côté : un attaquant novice, en feu, qui est prêt à tout bouffer. De l’autre : un attaquant expérimenté (alors qu’ils sont tous les deux nés en 1990, c’est là tout le paradoxe), capable du meilleur comme du pire. Il faudra faire un choix. Ou bien, autre option : faire une énorme folie en alignant les deux. Façon Rossi-Graziani en 1982, par exemple.
Éric Maggiori