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Balmont, le Gone devenu Dogue ?
Huit ans que Flo Balmont laboure les prés avec le maillot du LOSC. Indéboulonnable sur le terrain, adoré des supporters, le Pitbull aurait-il renié son ascendance de Lyon ? Pas vraiment. Simplement, il préfère avoir le mors aux dents que rayer le parquet.
2010-2011, saison paradoxale pour Florent Balmont. Alors qu’il réalise le doublé avec le LOSC, il joue aussi la partition la plus pauvre, quantitativement parlant, de ses douze dernières années : seulement 27 matchs de Ligue 1, première et unique saison à moins de trente matchs depuis 2004. Pas sûr que cela ait suffi à combler le Pitbull, qui n’aime rien plus que s’ébrouer sur le terrain. Alors qu’il débute, en octobre 2002, dans l’OL de Coupet, Juninho ou Anderson, et qu’il ouvre son palmarès professionnel de deux titres de champions en 2003 et 2005, sa première saison pleine, à Toulouse en 2003-2004, est une confirmation : Florent veut jouer. Alors il est parti à Nice, quatre ans, puis à Lille, depuis huit ans. Là, il s’est inscrit dans le paysage désespérément plat du Nord. Au point d’en prendre une pointe d’accent et de se faire accepter par tous comme un enfant du pays. Un gamin adopté et adoré. Un quinquin de 36 printemps que d’aucuns aimeraient voir s’enraciner définitivement entre houille et houblon. Sous le soleil que les gens du Nord n’ont pas dehors, mais dans le cœur, chantait Enrico Macias.
« Florent Balmont, s’il dit oui, j’dis pas non »
« On allait boire des cafés dans le Vieux-Lille, on buvait des bières du coin après les matchs. Mais avec modération hein, on n’allait pas s’envoyer des trappistes ! » Pierre-Alain Frau connaît son sujet, lui qui a côtoyé Balmont pendant trois ans à Lille au point d’en faire un véritable ami. Il a aussi vu le public s’amouracher de « son petit gabarit, sa marque de fabrique. Il s’arrache sur tous les ballons, c’est un battant, c’est logique que ce soit le chouchou ! » Dans le jargon du Nord, on appelle ça un « batilleux » , un terme qui convient parfaitement à celui qui « n’a jamais rien lâché et qui ne lâchera jamais rien. On appelait Edgar Davids comme ça aussi, le Pitbull. » Bastien et ses Y’est d’dins, un groupe de supporters patoisant tendance carnavaleux à l’origine de l’hymne du LOSC, confirme : « On l’aime pour son attachement au club, le côté teigneux, batailleur. C’est un numéro 6 qui a marqué l’histoire du club. » Alors ils lui ont dédié une chanson, sobrement intitulée Florent Balmont, au milieu d’un album composé de J’allos à Jooris, In a mangé ou Lille, min p’tit quinquin. Un morceau sur l’air de In the Navy qui place des punchlines telles que « milieu défensif mais jamais agressif, il a l’tempérament rosbeef » ou « Florent Balmont, il a pas des cuisses mais du jambon, l’est plus marrant qu’François Fillon ! »
Mais cet amour porté par les supporters n’est pas propre à Rijsel, capitale des Flandres. Du côté des Nissarts aussi, le Pitbull a laissé des traces. Sébastien Roudet a connu le gratteur chauve à ses côtés sur la pelouse du Ray : « Il était proche de la BSN, il aimait le tempérament du Sud, assez sanguin. Entre Lille et Nice, ce sont des caractères différents, mais le point commun, c’est qu’ils apprécient les mecs qui ne lâchent rien. » Un sentiment renforcé par le fait que Balmont a toujours été un joueur de l’ombre : « C’est un mec qui va au charbon, même si on n’aime pas trop dire ça à Lille. Et puis, il n’a pas été sélectionné, il n’a pas forcément eu les honneurs footballistiques, ça le rend peut-être plus proche. C’est un mec simple, attachant. Un gars normal, tout simplement » , replace Bastien des Y’est d’dins. Quelque chose qui colle peut-être plus encore à l’esprit nordiste selon Roudet : « Il avait des inquiétudes avant d’arriver, il m’a appelé (Roudet jouait à Valenciennes depuis 2006, ndlr). Mais c’est quelqu’un de très calme et ça lui convient bien ici, j’ai l’impression qu’il s’est ouvert un peu plus. »
Lyon dans les tripes
De là à poursuivre l’aventure lilloise au terme de son contrat, en juin 2017 ? Rien n’est moins sûr. Car si Bastien « espère qu’il ne représente pas quelque chose qui n’existe plus, c’est-à-dire un certain attachement, une fidélité au club » , le second fil directeur de Florent Balmont est tissé par sa famille. Jouer et être auprès des siens sont les leitmotivs maison. À Nice, il n’hésitait pas à faire les trois heures de route le séparant de sa ville aux deux collines. À Lille, sa famille vient régulièrement le voir. Alors, après s’être investi dans un complexe futsal de la métropole lilloise, notamment en y mettant en place une Académie Florent Balmont, il a lancé son propre business à Anse, entre Lyon et Villefranche-sur-Saône. Une petite entreprise pour l’instant gérée par sa sœur et son père, menuisier-charpentier de métier, en attendant le retour du divin chauve. Rien d’étonnant pour Roudet, comme pour Frau : « Pour lui, c’était clair dans sa tête, il voulait retourner à Lyon. Il a toute sa famille là-bas, c’est son axe directeur. Ça lui tenait à cœur de retourner vivre pas loin de chez ses parents. C’est un Lyonnais pure souche ! »
À la suite de l’ouverture de son complexe en janvier de cette année, Balmont révélait à Radio Scoop son futur proche : « Il me reste un an et demi, après ça devrait se finir. Je vais revenir habiter sur Lyon. J’ai toute ma famille et j’ai trouvé ma maison. » Une reconversion professionnelle et géographique évidente pour le faux calme, qui n’aspire pas exactement à squatter le canapé une fois la retraite venue : « L’académie Balmont est partie depuis deux, trois ans à Lille, il y a environ 700 licenciés. Je suis en train de dupliquer sur Anse. J’ai envie de travailler, me lever le matin, gérer une entreprise… » Un avenir de patron de PME rhônalpin pour l’international espoir, donc. En 2017, cela fera treize ans qu’il aura quitté ses terres. Et si rien n’aura fondamentalement changé dans l’esprit de Florent Balmont, peut-être qu’un peu de sang Dogue coulera dans son cœur de Lyon.
Par Eric Carpentier