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Ballesteros, le boucher adulé de Levante
L'élimination du club de Mestalla actée, Valence ne doit son salut européen qu'aux banlieusards de Levante. Toujours en course en Europa League, ils seront emmenés par leur capitaine Ballesteros. Pas vraiment un poète, le garçon est une brute. Mais pas que.
Au patronyme Ballesteros sont souvent juxtaposés les qualificatifs « classe » et « grand champion » . A dire vrai, Severiano de son prénom est l’un des plus grands sportifs espagnols et l’une des légendes du golf mondial. Mort à 54 ans des suites d’une tumeur maligne au cerveau, il restera à jamais comme un exemple pour la population espagnole. Dans un registre totalement opposé, son homonyme Sergio laissera une toute autre trace dans l’histoire de son sport. Footballeur de profession, le capitaine de Levante est ce qui se fait de plus rugueux sur un terrain de Liga. Dur au mal, dur sur l’homme, le natif de Burjasot est ce que l’on peut communément nommer un boucher. Une étiquette qui n’a rien de tronqué si l’on jette un coup d’œil à son CV : tacles assassins et prises de bec, insultes et exubérance font partie de sa vie de tous les jours. Pourtant, avec son coup de taureau et sa dégaine d’homme des cavernes, il sera bel et bien capitaine ce jeudi pour la réception du Rubin Kazan, soit le premier huitième de finale européen du petit Poucet Levante. Et cet exploit, le vétéran de la Liga le doit à un physique d’acier et à un caractère bien trempé.
« Ballesteros est quasiment une idole »
Enfant de Levante – il est né Burjasot, dans la périphérie valenciane, et a fait ses classes à la Cantera des Granotes –, son avenir est tout tracé. International espoir, il est repéré lors d’un match de Copa del Rey par Jupp Heynckes, alors entraîneur de Ténérife. Après une double confrontation plus qu’honorable, il fait ses valises pour la capitale des Canaries. Moins de deux ans plus tard, en 1998, il devient même champion d’Europe avec la Rojita. Puis, rien. Le néant ou presque. Malgré des prestations convaincantes, ses choix de carrières lui font connaître un parcours sinueux (Rayo, Villarreal). Et ce, jusqu’à son retour à Levante en 2008. Revenu aux sources du haut de ses 33 ans, Sergio Ballesteros fait office de papa dans un vestiaire de minots. Il y a de ça un an, son coéquipier Xavi Torres le décrivait en ces termes dans les colonnes du Pais : « C’est un exemple. Ballesteros, avec ses quinze ans de carrière, est quasiment une idole pour moi. Je souhaiterais toujours avoir un coéquipier comme lui, qui te défend toujours dans les mauvais moments. De savoir qu’il est mal reçu dans les autres stades me rend triste, surtout qu’il y a quelques années, il était beaucoup plus rude » .
Aujourd’hui, Sergio Ballesteros est le Ronan Le Crom espagnol. Avec ses 384 matchs de Liga dans les jambes – dont 368 en tant que titulaire – il est le daron du championnat. Cette longévité à toute épreuve, il la doit à un physique en titane. Inamovible chez les Granotes, il n’a pas raté un coup d’envoi depuis bientôt quatre ans pour cause de pépin physique. « Il a une résistance à la douleur très élevée. Il est très fort, et cela se voit chaque jour aux entraînements. Malgré ses 37 ans, il ne rate pas un match » , commente béat Estanis Asensi, préparateur physique du club. Même topo concernant la présence aux entraînements : ainsi, en octobre dernier, malgré des coliques néphrétiques à répétition et une admission aux urgences en pleine nuit, Sergio était présent tôt le lendemain pour participer à la session matinale de Levante. Pis, loin du roublard de service, le leader de vestiaire a encore du gaz dans les jambes. Quelques semaines avant son départ outre-Atlantique, Obafemi Martins, pas le moins rapide, disait à son sujet : « Il est vieux mais il court encore très vite » . Pour exemple, face au Real Madrid, il s’est permis le luxe de griller, à la régulière, Cristiano Ronaldo. Pour Juan Ignacio Martinez, son coach, pas de doute : « C’est un super-héros » !
Pepe-Ballesteros, rencontre entre poètes
Un super-héros controversé dira-t-on. Car sous cette litanie de compliments se cache la face sombre de l’iceberg. Souvent méconnu en dehors des frontières espagnoles, Sergio Ballesteros a profité de la dernière rencontre face au Real Madrid pour s’assurer une publicité en mondovision. Sous un déluge et sur un terrain impraticable, le trentenaire sort la panoplie de la parfaite petite salope. Insultes, taquets bien sentis, il se permet même une rixe avec la reine des crasses, aka Képler Laveran Lima Ferreira. Alors que Cristiano Ronaldo soigne une arcade en vrac, Pepe et Sergio Ballesteros se chamaillent. Selon certains journaux, les deux en seraient même venus aux mains dans les vestiaires, le pugilat n’étant évité que par l’arrivée de la police locale. Le Real Madrid, qu’il avait déjà fait disjoncter un an plus tôt en expulsant Di Maria et Khedira. Poésie toujours, c’est à Mestalla que Ballesteros livre sa plus belle partition. En novembre 2011, les Granotes viennent s’imposer 2-0 sur les terres du grand frère hautain, de quoi mettre le capitaine banlieusard dans un état second. Lui se défend pourtant de cette étiquette de boucher de Liga : « Je fais moins d’une faute par match ! Je ne sais pas pourquoi l’on dit cela de moi. Je ne sais pas si les gens ont compris, mais je suis défenseur. Pas attaquant, ni milieu, ni latéral : défenseur ! » Sans blague.
Son récital lors du derby face à Valence :
Par Robin Delorme, à Madrid