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Baghdad Bounedjah, le facteur X algérien
Auteur de trois buts depuis le début de la CAN, Baghdad Bounedjah porte son costume de sauveur algérien à merveille. Un rôle idéal, pour un joueur imprévisible.
Il existe des joueurs dont l’analyse technique ou tactique est difficilement lisible. En Algérie, on y consacre même une expression distinguée : « Tiri bark » (« Tir, et avec un peu de chance ça rentre », pour une grossière traduction en VF). Un champ lexical du football de rue, dans lequel s’inscrit idéalement Baghdad Bounedjah, actuel sauveur des Verts en cette CAN 2023. Auteur de trois buts depuis l’entame de la compétition (une réalisation face à l’Angola, un doublé contre le Burkina Faso), l’attaquant est aussi décrié qu’encensé par les millions d’Algériens du globe. Soit le joueur de sélection par excellence.
Facteur chance
Pour s’en rendre compte, il suffit d’ailleurs d’observer les trois pions évoqués. Devant l’Angola, Bounedjah s’est ainsi illustré en plaçant une belle volée de l’extérieur du droit à l’entrée de la surface. Dans la foulée, la VAR et sa politique du hors-jeu au centimètre lui ont refusé l’un des buts de la saison, inscrit à la suite d’un enchaînement poitrine retourné acrobatique sublime. Face au Burkina Faso, l’avant-centre s’est distingué de manière beaucoup moins belle, avec un cafouillage conclu à l’arraché et une tête sur corner dans le temps additionnel. La panoplie du buteur fantasque démontrée en 180 minutes.
Coleader du classement des buteurs (à égalité avec l’Équato-Guinéen Emilio Nsue) et seul Algérien à réaliser pareille performance à plus de 30 ans, Bounedjah peut donc se targuer d’avoir réussi son tournoi à titre personnel. Lui qui a été mis à l’écart un an durant par Djamel Belmadi (mars à novembre 2022), en raison d’un rendement jugé insuffisant. Autant de paradoxes, à l’image de ses prestations souvent mitigées d’un match à l’autre, tout comme son ami d’enfance, Youcef Belaïli.
Algérien de sang
L’histoire d’amour liant Baghdad Bounedjah à son pays est donc bien partie pour durer. Elle qui a mis du temps à naître. Pensionnaire d’Al-Sadd au Qatar depuis 2015 – dont il est le meilleur buteur historique avec 217 réalisations –, le trentenaire a effectivement quitté ses terres très jeune. Parti à l’Étoile du Sahel tunisienne à l’âge de 22 ans, après avoir parachevé sa formation à l’USM El Harrach en banlieue d’Alger. De quoi faire naître des débats sur une potentielle naturalisation en faveur de la Tunisie. Réponse de l’intéressé : « Je ne jouerais pour aucune autre sélection, je suis algérien de sang. »
Appel patriotique entendu, pour celui qui s’est donc offert une vie algérienne à travers la sélection. Le 19 juillet 2019, il la gravait même en lettres d’or, en inscrivant le but victorieux des siens en finale de la CAN. D’une frappe lointaine imprévisible, contrée et que personne ne voyait entrer. Après tout, il suffit de tirer, et avec un peu de chance, ça rentre. En 2023, cette Algérie moribonde et toujours sur le fil peut de nouveau miser sur son facteur X. En dépit des critiques.
Par Adel Bentaha