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B.Schuster : « Je n’oublierai jamais Diego »

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B.Schuster : « Je n’oublierai jamais Diego »

Où Bernd Schuster évoque son passé avec l'inénarrable Diego Armando Maradona. Souvenirs, souvenirs...

Quels rapports entretenaient Lattek et Diego ? Udo Lattek s’est complètement gouré avec Maradona, il ne savait pas comment le prendre, il n’a jamais essayé ni même voulu le comprendre. Mais ce n’est que plus tard que j’ai compris pourquoi il était aussi froid et autoritaire : il est arrivé à Barcelone après la mort de son fils de 11 ans.

Quel était l’objectif du Barça version Schuster-Maradona ? Nous avions deux priorités : avoir des stars et gagner des titres. C’est pour ça que moi et Diego, on nous a signés. Nous avions une belle équipe, exclusivement composée d’internationaux.

Vous sentiez la pression du public ? Les supporters du Barça étaient heureux. Moi aussi parce que je pensais “Le plus grand joue parmi nous”. Mais c’était une erreur de notre part de croire que seule la présence de Diego nous assurerait de gagner des matchs. L’équipe s’est trop reposée sur lui à l’époque. Quand Diego s’est blessé, c’est comme si on nous avait amputés, nous n’étions plus une grande équipe capable de gagner des compétitions. Nous n’étions pas préparés à jouer sans lui..

Vous rappelez-vous de son premier entrainement ? Le premier entrainement de Diego à Barcelone a soulevé beaucoup d’expectative. Il y avait énormément de supporters et de journalistes. Il avait une façon assez singulière de s’entrainer, mais bon, ça ne nous a jamais étonnés. A vrai dire, il n’aimait pas trop faire d’efforts quand il avait le ballon.

Et votre relation avec lui ? Avec Diego, nous étions complètement dingues de foot. On s’entendait très bien, on passait des heures à discuter de football. On avait la même idée sur le football : le football spectaculaire, celui du toque. Nous avons été un couple parfait sur le terrain, mais on nous a privés de cette relation. On s’entendait parfaitement sur le pré. Lui, quand il faisait une passe, ce n’était jamais une pierre ou un melon, c’était toujours un bon ballon.

Vous étiez dans la même chambre lors des concentrations ? Oui, je partageais sa chambre. Ce qui était fantastique avec lui, c’est qu’il savait que c’était une star, mais il restait humble. Il ne nous faisait pas ressentir sa différence. Moi aussi j’étais comme ça. On savait tous les deux ce qu’on représentait mais on n’était pas jaloux l’un de l’autre. Au contraire, on s’en foutait tous les deux.

Quand on dormait dans la même chambre, j’allais me coucher à 10h du soir, juste au moment où Diego décidait de sortir. Quand je me levais le lendemain à 7h 30 du mat’, Diego se préparait à dormir. Et là il me disait « Qu’est-ce que tu fous l’Allemand ? » , “Diego le soleil vient de se lever, ce n’est pas le moment de dormir !”, il finissait par s’énerver : « Tu veux me tuer ou quoi ? T’es complètement fou ! » . A la fin, Diego a changé de chambre car il disait aussi que je ne le laissais pas regarder la télévision et que je n’étais pas très bavard le soir. On se chamaillait parce que l’un voulait dormir quand l’autre voulait se lever. Mais ce n’était rien de grave.

Et avec le groupe, il était comment ? Il aimait être avec les autres, parce que comme ça, il pouvait faire ses blagues. Une fois, il s’est ramené à l’hôtel avec des pétards. Il nous a cassé les pieds toute la nuit avec ça.

Et il faisait quoi avant les matchs ? A chaque fois, c’était pareil. Il avait un rituel bien particulier. Il se ramenait avec sa balle de tennis dans les vestiaires, il la touchait, la regardait, puis il commençait à jongler avec. C’était un vrai spectacle. Il allait dans les douches avec sa balle de tennis. C’est à peine s’il ne se douchait pas en train de jongler ! Moi je lui disais toujours : “Maintenant on va voir si tu fais la même chose sur le terrain !” (rires).

L’arrivée de Menotti a dû être un vrai changement pour lui, non ? Avec Menotti, on a vu le meilleur Maradona, parce que ses entrainements étaient moins physiques. Diego, rien que pour ça, il l’appréciait. Avec Lattek, il s’était disputé plusieurs fois à cause de ça. Quand il disait qu’il ne voulait pas, il restait là campé à nous regarder courir. Ça provoquait un malaise chez les autres joueurs. Lorsque nous étions allés en Hollande pour l’avant-saison, Diego avait un tour de terrain de retard sur tout le reste du groupe. Ça c’était Udo. Menotti parlait beaucoup avec lui, ce qui fait qu’il respectait toutes ses consignes. César était plus diplomate, il savait comment faire pour obtenir quelque chose de Maradona.

Le meilleur match avec Maradona ? Un match à Belgrade au cours duquel Diego avait mis un lob des trente mètres. Le stade était plein à craquer. Mais à nous deux, on leur avait fait des misères. Quand j’ai entrainé en Ukraine, l’un de mes joueurs m’a rappelé ce match-là.

Pourquoi à votre avis a-t-il quitté le Barça ? Je pense qu’il a eu pas mal de problèmes avec le président. Il a été très désagréable avec lui. Maradona aimait Barcelone, ses habitants et il voulait triompher avec le Barça. Il se sentait comme chez lui, or ça énervait pas mal les dirigeants. On voulait gagner contre tout le monde, mais lorsqu’on perdait, c’était immédiatement de sa faute. Ce devait être un coup monté par le club pour s’en débarrasser, parce que ce n’était pas normal. C’était systématiquement de sa faute!

Vous vous rappelez de cette fameuse finale de Coupe du Roi contre Bilbao ? Cette finale, du début jusqu’à la fin, ça a été une continuelle et horrible provocation envers Diego. Quand l’arbitre a sifflé la fin du match, j’entends un bruit assourdissant, je me retourne, et là je vois que Diego est en train de se battre avec Goicotxea. C’était de la folie, mais avec Bilbao, on a avait l’habitude, il nous en ont toujours fait baver.

Avez-vous pensé à l’époque que le départ de Maradona allait signifier la fin d’un cycle ? Sur le coup, son départ à Naples était une grande peine, parce que j’étais convaincu qu’avec un Maradona au top de sa forme, nous aurions marqué une époque. Curieusement l’année suivante, sans Diego mais avec un Ecossais (Archibald), nous gagnons le championnat…

Comment avez-vous vécu ces mauvais moments ? J’étais triste de voir que Maradona était au plus mal. Ça me faisait de la peine. En Allemagne, je l’ai toujours défendu, je n’ai jamais apprécié qu’on le critique devant moi, parce que je sais qui il est vraiment. Je sais que c’est un bon gars. Quand j’ai connu Maradona, je me suis dit : “Le jour où Diego arrêtera le football, je ne sais pas ce qu’il va faire.” C’est un type qui ne sait faire qu’une chose : jouer au football. Je ne pouvais pas me l’imaginer en agent, en entraineur ou encore vendeur dans un magasin de chaussures. Lui, son truc, c’est le football, c’était et ce sera toujours comme ça. Un jour, il y avait un match amical à Munich. Je me suis rendu compte ce jour-là qu’il n’avait pas changé. J’étais avec Batistuta en train de m’entrainer. Il essayait de l’appeler pour qu’il vienne nous rejoindre, mais ça ne s’est jamais fait, tout simplement parce qu’il se lève à 16 heures de l’après-midi.

Vous n’avez jamais essayé de l’aider ? Son plus gros problème, c’est de ne pas travailler dans le football. Un jour, il viendra travailler avec moi sur un banc de touche, c’est ce que j’ai dit une fois à Menotti. Il doit travailler dans le football. Il ne peut pas être dans la rue sans rien faire. C’est du gâchis parce qu’il y connait un rayon en matière de football.

Vous n’avez pas peur de ne plus jamais le revoir ? Des fois, j’ai peur qu’on le retrouve mort dans la rue. Il a une vie tellement folle que je ne sais pas où il va. Je ne préfère pas penser au pire, il faut qu’il continue à s’accrocher.

Que représente Maradona dans votre vie ? Une fierté. C’est un privilège que de l’avoir connu et joué avec lui. Je ne l’oublierai jamais. Aujourd’hui, mes neveux qui le connaissent ne me croient pas lorsque je leur dis que j’ai évolué avec lui. Maradona est éternel, comme Cruyff, Pelé, Eusebio ou encore Kempes.

Par Veronica Brunati

Retrouvez l’interview complète dans le numéro 50 de SoFoot spécial Maradona, ici à partir de 3 euros .

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