- Bundesliga
- J14
- Gladbach-Bayern (2-1)
Avec un doublé contre le Bayern Munich, Ramy Bensebaini a conquis Gladbach
Avec un doublé improbable contre le Bayern Munich, dont un penalty dans le temps additionnel, Ramy Bensebaini a gagné les cœurs des supporters du Borussia Mönchengladbach, samedi après-midi. Une prestation idoine pour confirmer son nouveau statut de titulaire chez le leader de Bundesliga et valider une thèse : en 2019, l'Algérien est bien touché par la grâce.
Il faut imaginer la tête des supporters de Mönchengladbach quand ils ont vu Ramy Bensebaini s’emparer du ballon. 90e minute de jeu : le Borussia vient d’obtenir le penalty de la gagne contre le Bayern Munich, une occasion pour le surprenant leader de reléguer le tenant du titre à sept longueurs. Tout le monde s’attend à voir Marcus Thuram ou Breel Embolo assumer la lourde responsabilité. Mais non, c’est bien le latéral gauche, déjà auteur du but égalisateur et titulaire pour la cinquième fois seulement en Bundesliga, qui prend les choses en main. Les explications du principal intéressé : « Après sa tentative manquée contre Fribourg, on s’est dit que Breel ne tirerait plus les penaltys, donc j’ai dit que le prochain, je m’en occuperais. » Sauf que la scène aurait pu ne jamais exister. « Mais j’avais oublié, s’est marré Bensebaini au micro de Sky Sports après la rencontre. C’est Tobias Sippel (le gardien remplaçant sur le banc, N.D.L.R.) qui m’a rappelé que c’était à moi de le tirer. »
Pas le meilleur moyen de se mettre en condition pour un tel moment. Surtout que l’international algérien n’avait encore jamais été désigné pour tirer un penalty en plein match dans sa carrière. Imaginez le défi : réussir sa grande première face à un portier de la trempe de Neuer. Une sacrée montagne. « C’est sûr que j’avais un peu la pression, a admis le défenseur. Quand tu as un gardien comme Manuel Neuer en face de toi, il fait ça (il fait un geste de la main) et il cache tout ! Mais à l’entraînement je travaille tout le temps les penaltys en fin de séance avec Sippel, donc je me suis dit que j’allais tirer comme d’habitude. » Et c’est ce qu’il a fait. Sans trembler, Bensebaini a frappé en force à gauche du gardien, comme lors de la séance de tirs au but en finale de Coupe de France en avril dernier, faisant littéralement exploser le Borussia-Park. Ramy, bienvenue dans la famille.
Une question de temps
Et voilà un premier doublé dans la carrière de Bensebaini, qui plus est pour renverser le Bayern Munich et permettre à Gladbach de conserver son fauteuil de leader. Qui aurait pu imaginer un tel scénario avant le choc de cette 14e journée ? Pas grand monde, vu les débuts difficiles de l’international algérien dans son nouveau club. Arrivé du Stade rennais contre huit millions d’euros cet été, le natif de Constantine a redécouvert les joies d’une concurrence qui n’existait pas à son poste à Rennes. La faute aux bonnes performances d’Oscar Wendt, international suédois de 34 piges et chez les Fohlen depuis 2011 (260 matchs). Résultat, Bensebaini a dû se contenter de grignoter quelques miettes en championnat (4 titularisations avant samedi), tout en devant faire ses preuves en Ligue Europa (5 apparitions, 3 comme titulaires. « Les deux sont des joueurs importants et de qualité, présentait l’entraîneur Marco Rose fin octobre devant la presse. Ramy nous aide avec sa dynamique dans le jeu à chaque rencontre. C’est un poste où nous pouvons être complètement détendus avec cette rotation, dans les autres compartiments nous n’avons pas cette chance. » Manque de pot.
Mais depuis quelques semaines, les choses ont changé. Dans l’esprit de Rose, Bensebaini s’impose presque comme le nouveau titulaire depuis son match contrasté contre le Werder (3-1) – un but marqué de la tête et une expulsion en fin de partie -, le 10 novembre dernier. Après avoir purgé sa courte suspension, l’Algérien s’était déjà remis la tête à l’endroit le week-end dernier contre Fribourg (4-2), avec une passe décisive pour Thuram et une première apparition dans l’équipe type du célèbre Kicker. Et voilà son coach sous le charme : « Il est toujours prêt à donner le meilleur de lui-même. Pour un entraîneur, Bensebaini est le joueur parfait. Il a cette combativité sur le terrain, même s’il doit aussi savoir se contrôler. » Ceux qui suivent le bonhomme depuis plusieurs années savent qu’il peut passer du chaud au froid (ou l’inverse) dans une même rencontre, sans prévenir. Avant son coup de tête à l’heure de jeu contre le Bayern, le double buteur avait d’ailleurs beaucoup subi défensivement. Mais depuis le début de cette année 2019, Ramy Bensebaini ne peut s’empêcher d’écrire l’histoire.
2019, année fantastique
Dans quelques jours, le défenseur bouclera une année historique, marquée par un huitième de finale européen et surtout deux trophées : le premier titre du Stade rennais depuis 48 ans en Coupe de France et le deuxième sacre de l’Algérie à la Coupe d’Afrique des nations après celui de 1990. Visiblement, le porte-bonheur Bensebaini a maintenant filé le virus de la gagne à Mönchengladbach. « J’avoue que je passe une bonne période, s’est-il réjoui au micro de beIN Sports samedi. Après, la Coupe de France, la CAN, ça reste derrière moi, même si c’est gravé dans ma tête. Je suis là pour jouer, prendre du plaisir, découvrir un nouveau championnat et je suis vraiment content d’être là. » Une première victoire pour celui qui avait légèrement hésité à poser ses valises en Allemagne l’été dernier.
À seulement 24 ans, le défenseur n’est même pas certain de revivre une période aussi dorée dans sa carrière, mais une chose est sûre : il n’aura plus jamais peur des grands moments. Mieux, il raffole des matchs importants. Entre son but lors du retour à Séville avec Rennes et le pion de qualification en demi-finales de Coupe de France contre Lyon, son bilan depuis le début de l’année civile donne le vertige. En finale contre le PSG, il avait remobilisé à lui tout seul les Rennais à 0-2 en se chauffant avec Kylian Mbappé, avant de faire preuve de sang-froid face à Areola sur le cinquième tir au but breton. Même son de cloche avec l’Algérie, en quarts de finale de la CAN contre la Côte d’Ivoire, quand il avait été le premier à se présenter au point de penalty pour la séance fatidique. Bensebaini n’est pas du genre à se cacher, même s’il n’a pas hésité à lâcher un poncif dans les coulisses du Borussia-Park : « Aller jusqu’où ? Je ne sais pas, mais on va faire le maximum pour aller le plus haut possible. » Ça tombe bien, il connaît la formule.
Par Clément Gavard