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Avec les Friedkin, Cannes a une faim de Louve

Par Alexandre Plumey

Neuf ans après son dépôt de bilan, l’AS Cannes retrouve une certaine vitalité. Sportivement, le club azuréen a dominé son groupe de National 3 cette saison. Aujourd’hui en N2, le club formateur de Zidane vient d’être racheté par Dan Friedkin, propriétaire de l’AS Roma et richissime producteur de films américains. De quoi écrire le début d’un beau scénario.

Souleiman DJABOURI of Cannes during the French Cup match between Association Sportive de Cannes v Toulouse Football Club at Stade Pierre de Coubertin on January 2, 2022 in Cannes, France. (Photo by Pascal Della Zuana/Icon Sport)
Souleiman DJABOURI of Cannes during the French Cup match between Association Sportive de Cannes v Toulouse Football Club at Stade Pierre de Coubertin on January 2, 2022 in Cannes, France. (Photo by Pascal Della Zuana/Icon Sport)

Depuis près de deux ans, il n’y avait plus une discussion entre un membre du staff sportif de l’AS Cannes et une éventuelle recrue où la question d’un rachat n’arrivait pas sur la table. Le serpent de mer d’une vente ou de l’arrivée d’investisseurs n’était un secret pour personne, car la présidente elle-même, Anny Courtade, en parlait librement depuis sa prise de fonction en 2019, après avoir constitué un directoire en 2016, duquel elle était la vice-présidente. Les tractations se sont accélérées ces douze derniers mois. Ceux qui ont coïncidé avec la montée sportive de l’équipe première de N3 à N2 en survolant son groupe et terminant avec 20 points d’avance.

Après avoir échangé avec 74 investisseurs, « mais uniquement 5 de vraiment sérieux », la femme d’affaires a cédé à Dan Friedkin 98% des parts de la société SAS Cannes Football, créée début 2023, d’abord sous forme de coquille vide avant de la relier avec l’équipe première, la finalisation du deal approchant. L’octogénaire (83 ans) reste à la présidence de l’association en dépit de ses « deux pages de titres et fonctions » dans le secteur hospitalier, de la culture ou du monde économique local, après 25 ans à la tête du mythique RC Cannes et ses deux Ligue des champions en volley-ball féminin et 41 autres titres. « Je n’aime pas le terme de vendre, cadre-t-elle d’emblée. J’ai “cédé pour une partie des dettes”, car je voulais me reposer et puis je n’allais pas continuer de financer à fonds perdu. » Une manière de notifier que les quatre millions d’euros investis personnellement depuis son arrivée aux manettes en 2016 n’ont pas été récupérés en intégralité. « J’ai horreur du ventre mou, alors j’ai mis les moyens pour en sortir. Si on gagnait de l’argent dans le foot, ça se saurait. Je l’ai fait pour que ma ville rayonne. »

Anny Courtade en 2016.
Anny Courtade en 2016.

Ticket d’entrée plus faible en National 2 qu’en Ligue 1

Faire rayonner la ville, c’est désormais à la famille américaine de le faire, même si la municipalité continuera de verser 800 000 euros de subventions, avant tout destinées aux catégories de jeunes et leurs 864 licenciés. À écouter David Lisnard, maire LR de Cannes depuis 2014 (année du dépôt de bilan), « Anny a redonné de la crédibilité au club, mais le National 2 est l’une des divisions les plus difficiles. L’unité des dépenses est le million, un peu comme le monde professionnel, mais il n’y a pas de revenus contrairement à la billetterie et aux droits télé en L1 ou L2. Sans une personne qui accepte de perdre de l’argent au début, c’est impossible d’avoir de vraies ambitions. » L’édile rêve secrètement de Ligue 1 et plus officiellement de Ligue 2, comme Anny Courtade qui visait l’antichambre, histoire de relancer un centre de formation.

Les très discrets et pas très bavards Friedkin père et fils, même lors de leur conférence de presse de présentation, ont d’ores et déjà validé l’enveloppe pour enrôler les recrues (trois pour l’instant) et conforter les contrats en vue de la saison 2023-2024 dont le premier entraînement a eu lieu ce lundi 10 juillet. Pas de révolution pour autant dans ce groupe qui a brillé en Coupe de France, par l’élimination de Dijon en décembre 2021 avant de tenir tête à Toulouse deux semaines plus tard. Quelques joueurs contactés s’interrogeaient même un peu sur les contours exacts du nouveau projet et surtout des moyens à disposition, eux qui étaient en vacances au moment de l’officialisation. S’ils étaient au courant du rachat après avoir été appelés un par un pour des questions administratives relatives à leur contrat, le flou demeurait.

Pour les supporters, sachez que nos ambitions sont très sérieuses. Si vous avez suivi ce que nous avons fait à Rome, nous avons des ambitions élevées.

Dan Friedkin

Dans la tête des décideurs qui ont fait fortune dans l’automobile avant de se diversifier dans l’hôtellerie et le cinéma, le projet est clair : remonter rapidement dans les divisions hexagonales. Histoire de faire fructifier cet investissement avec un bel « upside » sur la valeur du club comme disent tous ces nouveaux acteurs du ballon rond. D’autant que le ticket d’entrée en National 2 est plus faible qu’en Ligue 1. Le maire a fixé le cap : « une montée tous les deux ans ». Un engagement financier écrit a été défini par les nouveaux actionnaires, sans que le montant ne soit divulgué. « Peu importe la somme, il faudra juste qu’ils assument financièrement les ambitions et le développement du club », souffle une source proche du dossier. Pour au moins une saison, Jean-Noël Cabezas et son adjoint Derek Decamps sont confortés à la tête des Dragons, sans pour autant être autorisés à répondre à nos sollicitations par la cellule communication du club, arguant « beaucoup de bouleversements à gérer avant d’être prêt le 26 août pour la reprise du championnat ».

Et si les Friedkin n’ont pas été les premiers à s’intéresser à l’AS Cannes, leur puissance financière et leur réussite depuis le rachat de l’AS Roma en août 2020 pour 591 millions d’euros les ont très vite placés en bonne place dans les négociations. C’est d’ailleurs une des rares phrases prononcées par Ryan, le fils de Dan, fin juin lors de la conférence de presse : « Pour les supporters, sachez que nos ambitions sont très sérieuses. Si vous avez suivi ce que nous avons fait à Rome, nous avons des ambitions élevées. » Un discours vu et revu dans d’autres cessions de club où les résultats se font encore attendre (ou que des drames se jouent). « C’est différent ici, l’interlocuteur est connu, c’est une personne physique, nuance l’ex-patronne de la grande distribution. On a affaire à un père et son fils. C’est une famille très sérieuse. » Même optimisme en mairie, à l’heure de devenir le petit frère du cador italien : « Il y a toujours un risque sportif évidemment. Mais eux sont là pour de bonnes raisons, avec une éthique et une connaissance du football, contrairement à d’autres projets plus farfelus. »

Le choix n°1 retoqué par la mairie

Pourtant, ce n’est pas avec eux qu’Anny Courtade avait établi un protocole d’accord début 2023, mais plutôt avec un consortium étranger. Le salut de Dan et Ryan Friedkin ne tient qu’à une des trois conditions suspensives retoquée par la mairie au moment du choix final et donc une remise en cause des conditions d’exclusivité. Selon nos informations, le tour de table assez aléatoire des pressentis actionnaires a pu inquiéter les décideurs. Une fois les cartes rebattues, les habitués de Cannes, notamment en raison de leurs activités dans la production de films (Palme d’or 2017 avec The Square), ont accéléré les tractations pour lier encore un peu plus leur amour avec la ville du Festival. Jusqu’à s’y implanter davantage, notamment au travers de projets immobiliers dans une cité où les terrains disponibles se font aussi rares que chers ?

L’immense parking derrière le stade Pierre-de-Coubertin attire de nombreuses convoitises. David Lisnard l’assure : « Il n’y a pas de clause immobilière dans le contrat, j’ai tout de suite coupé court lorsque le sportif n’était pas la priorité. » Sans pour autant fermer la porte à des travaux, pour lesquels, de fait, les nouveaux propriétaires seraient en position préférentielle. « On garde la maîtrise du stade pendant trois ans. Si la greffe prend, il ne faudra pas être obtus et bête quand une discussion s’ouvrira parce qu’il ne sera plus en adéquation avec la L2 ou mieux. » Au stade Pierre-de-Coubertin, l’important n’est plus de participer. C’est clair comme un scénario de film.

Dans cet article :
Un ancien de Ligue 1 à Cannes
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Par Alexandre Plumey

Propos recueillis par AP.

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