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Avantage France
Déjà avantagée par ses trois jours de récupération supplémentaires par rapport à l'Irlande, qu'elle affronte en huitièmes de finale ce dimanche après-midi, l'équipe de France a aussi pu compter sur l'organisateur pour n'allouer qu'un peu moins de 5000 billets à la Green Army. Qui devrait pourtant envoyer 30 000 de ses soldats dans les rues de Lyon. Un peu trop ?
Didier Deschamps a bien essayé de faire l’étonné. « Vous avez de sacrées questions, vous… » Pas grand-chose à voir avec le Tout-Puissant, pourtant : la France est-elle avantagée par ses trois jours de plus de préparation (+4 autres jours si l’on compte qu’elle était déjà sûre de se qualifier dès son deuxième match), ou risque-t-elle d’être sortie de sa compétition avant son huitième de finale contre l’Irlande ? « Qu’un Irlandais me pose ça, à la limite, mais bon… » La suite de la réponse du sélectionneur est, logiquement, une double négation : « Ce n’est pas un désavantage, en tout cas. » Soit une façon de dire oui en disant deux fois non. Car au sein de l’équipe de France, personne n’ose nier le cadeau fait par l’UEFA, même si tout le monde essaie. Guy Stéphan, vendredi à Clairefontaine, expliquait qu’ « on a vu des équipes qui avaient eu beaucoup plus de temps pour se préparer et qui n’étaient pas plus performantes pour autant » . Avant d’admettre : « Mais c’est vrai qu’à choisir, on préfère avoir trois jours de plus. » Le lendemain, Hugo Lloris évoquait cette « adrénaline » que l’équipe sent monter à mesure qu’elle « avance dans la semaine » . Et concédait que ce délai supplémentaire leur avait « permis de couper, de bien récupérer. On sera prêts pour cette bataille. » Mais le sélectionneur, lui, tenait tout de même à ajouter un bémol : « À partir du moment où il y a un Euro à 24 équipes, on ne peut pas jouer tous en même temps. »
« Je pense que c’est assez injuste »
Exact. Didier Deschamps aurait pu prendre l’exemple de 1994. Dans une formule similaire, la Roumanie avait fini première du groupe A, celui de l’organisateur de la World Cup, pendant que les États-Unis prenaient la troisième place. Gheorghe Hagi et ses potes avaient ensuite battu en huitièmes une Argentine qui avait carrément eu quatre jours de moins pour récupérer. Mais le cas était jusque-là isolé. En 1990, l’Italie n’avait en effet eu que deux jours de plus que l’Uruguay et, en 1986, le Mexique avait poussé l’hospitalité jusqu’à se donner un jour de moins que la Bulgarie, pourtant troisième de sa poule. Une évolution qui illustre la volonté de plus en plus affirmée des organisateurs de grandes compétitions d’avantager le pays-hôte afin de s’assurer une grosse ambiance et une grosse fréquentation des stades le plus longtemps possible, avec les revenus qui vont avec.
Le sélectionneur irlandais Martin O’Neill n’a pas manqué de mettre en lumière cette inégalité de traitement, depuis la qualification de son équipe à l’arrachée mercredi soir. « Je comprends que le pays hôte soit favorisé, a-t-il cependant ajouté. Si la compétition était en Irlande, je ferais exactement la même chose. Les autres équipes joueraient toutes les nuits et nous ne jouerions pas pendant un an. » À la veille du match contre la France, il a répété que ce n’était « pas très équilibré » , mais qu’il « fallait l’accepter » . « Mes joueurs ont dépensé beaucoup d’énergie contre l’Italie. Le plus important a été de se reposer, puis de faire des séances vidéo, à part ça, nous n’avons pas eu le temps de faire grand-chose » , a-t-il ajouté.
Avant de pointer du doigt un autre scandale : alors que près de 30 000 Irlandais devraient envahir Lyon ce week-end, seulement 4604 places leur sont allouées au Parc OL. « Je ne suis pas d’accord avec l’allocation des billets, condamne Martin O’Neill, alors que quelques membres de la Green Army traînent déjà autour du stade en quête du précieux sésame. C’est totalement disproportionné, pour un stade de cette taille. Se retrouver avec moins de 5000 billets, je pense que c’est assez injuste, honnêtement. Je ne dis pas ça seulement parce que c’est nous. N’importe quelle équipe devrait avoir davantage de billets mis de côté pour ceux qui auront fait le chemin jusqu’ici. » Martin O’Neill devrait se rassurer : le Parc OL ne fait que 60 000 places. Il y a peu de chances pour que 55 000 Français arrivent à faire plus de bruit que 5 000 Irlandais.
Par Thomas Pitrel, au Parc Olympique lyonnais