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Auxerre sous tension
À la traîne en Ligue 2, l’AJ Auxerre traverse également une crise sans précédent avec ses supporters qui lui reprochent une gestion désastreuse depuis un an et demi. De quoi rendre la situation encore plus électrique.
Qu’il paraît loin le temps de la Champions League pour les Auxerrois. Celui des déplacements à Milan, Madrid ou encore Amsterdam. Aujourd’hui, l’AJA végète en Ligue 2 et lutte même pour le maintien (avec un seul point d’avance sur le premier relégable). Et histoire de ne rien arranger, ses plus fervents supporters sont en conflit ouvert avec la direction du club. Pour comprendre l’origine de cette situation, il faut remonter au dernier match de la saison dernière, contre Montpellier. Officiellement relégué, Auxerre affronte le futur champion de France et plusieurs incidents éclatent pendant la rencontre. Mécontents de la descente et de la gestion du club par Gérard Bourgoin, les supporters jettent balles de tennis, kiwis et rouleaux de PQ sur le terrain occasionnant l’interruption de la rencontre pendant de longues minutes. Des fumigènes sont également allumés, et l’un d’eux finit sa course sur la pelouse. La tribune des supporters auxerrois est finalement évacuée par les CRS.
Dialogue de sourds ?
De « graves événements » pour la Ligue de football professionnel (LFP) qui décide d’infliger un match à huis clos à l’AJA. En guise de sanction, la direction du club a également pris plusieurs mesures à l’encontre des Ultras Auxerre (UA) et des Blue Angels (BA), groupes de supporters occupant la tribune Leclerc et considérés comme responsables des débordements : retrait des locaux jusqu’alors prêtés par le club, cloisonnement du kop par des bâches plastique séparant les ultras du reste de la tribune, double palpation à l’entrée de la tribune et interdiction de faire entrer des banderoles sans l’accord préalable de la direction. Des mesures mal perçues par les ultras : « La préfecture a préconisé, mais pas obligé, certaines mesures dont la double palpation. Et à la rigueur, c’est presque logique, puisque c’est fait dans pas mal d’autres stades français. Mais le fait que ça ne soit qu’en tribune Leclerc, c’est vraiment la diabolisation des supporters. Et concernant les banderoles, on se doute bien qu’un « Bourgoin casse-toi » ne passera plus aujourd’hui… » , explique Jonathan, l’un des responsables des Ultras Auxerre. « Pendant vingt ans, l’AJ Auxerre a toujours mis en place une politique de la porte ouverte pour les supporters. Ils ont pu entrer librement au stade, assister aux entraînements, approcher le staff ou les joueurs sans aucun problème. Ils ont toujours eu à disposition, et gratuitement, des locaux pour se réunir et préparer leurs banderoles. Si la situation est différente aujourd’hui, ce n’est pas le fruit du hasard… » , réplique Valentin Labani, le directeur de la communication de l’AJA, pour expliquer le changement de politique à l’égard des supporters.
Sauf que, selon ces derniers, les tensions qui les opposent à la direction sont profondes et remontent à plusieurs mois : « Le fait de critiquer la direction provient d’abord des résultats. C’est elle qui choisit les personnes sur le terrain. C’est le dirigeant qui choisit l’entraîneur et ce dernier qui choisit les joueurs, assène Jonathan. Et on voit bien que ça ne marche pas depuis plus d’un an et demi, les résultats parlent d’eux-mêmes… » Un diagnostic que ne conteste pas le directeur de la communication du club : « La frustration des supporters qui voient l’absence de résultats de leur équipe alors qu’ils se déplacent, l’encouragent, je peux tout à fait la comprendre et la partager en tant qu’amoureux du club. » Mais les points d’achoppement demeurent nombreux.
Point de non-retour
Si la direction annonce être « favorable au dialogue » et « prête à recevoir les supporters » , un point de non-retour semble pourtant avoir été atteint à l’occasion de la réception du FC Nantes (défaite 0-2), le 24 novembre dernier. Comme à son habitude, un des administrateurs de l’équipe bourguignonne bien connus des supporters, Alain Hébert, président des clubers et de la famille AJA, avait invité plusieurs enfants de la région à se rendre au stade de l’Abbé-Deschamps. Problème, ce monsieur est également en plein conflit avec la direction, à la suite de propos diffamatoires et injurieux qu’il aurait tenu à l’encontre du président actuel Gérard Bourgoin et d’autres membres de l’association AJA football, selon l’Yonne Républicaine.
Contacté par So Foot, Alain Hébert dément fermement avoir tenu ces propos et n’hésite pas à parler de « coup monté » . Il est néanmoins « interdit de stade, sauf les jours de matchs » par le président de l’AJA Gérard Bourgoin. « C’est-à-dire qu’il n’a pas le droit d’aller au stade dans la semaine, d’entrer dans les bureaux du club ou d’aller dans la boutique pour dire bonjour. Il a juste le droit d’assister aux rencontres ! » , s’offusque le responsable des Ultras Auxerre.
Banderole de soutien à Alain Hébert arrachée
En signe de solidarité, les jeunes invités contre les Canaris ont sorti une banderole de soutien à Alain Hébert. Un message que n’ont pas du tout apprécié certains dirigeants du club et qui a été saisi par Bernard Turpin, directeur des études au centre de formation de l’AJA . La direction a, par la suite, tenté de se justifier : « Depuis cet été, suite à une décision du Conseil d’Administration de la SAOS AJA Football, les banderoles doivent être présentées à la direction du club avant leur entrée dans le stade, les soirs de match, précise Valentin Labani. L’intrusion et la pose de la banderole de soutien à M. Hébert ont été effectuées sans information préalable à la direction du club. C’est regrettable pour tout le monde ! » Mais ce geste a provoqué la colère des supporters, ainsi que de l’ensemble du stade. « Au début, on était sifflé par le reste du public lorsque l’on scandait « direction démission » » , raconte Jonathan, mais la situation est en train de se retourner. Les gens n’ont pas compris l’arrachage d’une banderole à des enfants. Samedi, nous avons été applaudis, certains commencent à reprendre les chants… » Alain Hébert, lui, préfère ne pas en rajouter : « Je fais passer le club avant mon affaire personnelle, car aujourd’hui c’est quand même la situation de l’AJA qui est la priorité. »
Une situation que l’historique du club Guy Roux, joint par So Foot, ne préfère, de son côté, pas commenter. Pour les ultras, en revanche, il n’y a qu’une seule solution : « Il faut virer presque 80% des gens qui traînent dans les bureaux, passer un grand coup de balai. Faire partir Gérard Bourgoin, président de la SAOS, Henri Maupoil, le président de l’association, et Bernard Turpin. Mettre des hommes un peu plus compétents à chaque niveau et définir vraiment les rôles de chacun. » Une posture radicale qui, selon Valentin Labani, laisse peu de place au dialogue : « Lorsque les supporters sortent une banderole « direction démission » à chaque match, est-ce que c’est un dialogue ? C’est difficile de discuter dans ces conditions. Pour dialoguer, il faut partir sur des bases qui soient positives. » Bref, le Noël du club bourguignon risque fort de sentir le sapin.
Antoine Aubry, Anthony Cerveaux et QB