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Au revoir et merci, Gueïda
Invité à discuter de la situation de son club sur OL TV ce lundi soir, Jean-Michel Aulas a laissé entendre que Gueïda Fofana ne retrouverait pas les terrains de football. Le milieu de terrain n’a donc pas réussi à triompher d’une sale blessure à la cheville et devrait prendre sa retraite, à 25 ans seulement.
« J’ai beaucoup de respect pour Gueïda Fofana. Beaucoup auraient arrêté après ce qu’il a vécu, mais il se bat encore. Je sais ce qu’il endure, et sa blessure était plus grave que la mienne. On a fait un peu de rééducation ensemble, j’espère qu’il va revenir, il le mérite. » Voilà comment Nabil Fekir évoquait son coéquipier il y a quelques semaines dans Le Progrès. Quand ils évoquent Gueïda, ceux qui l’ont fréquenté ont en réalité toujours la même image en tête, et le décrivent avec des mots clefs simples : respect, combattant, talent, espoir. Mais l’espoir a pris un peu de plomb dans l’aile, ce lundi soir, avec la déclaration de Jean-Michel Aulas dans le Culture Club d’Héloïse Basson. « C’était un formidable joueur. Il a un mental exceptionnel et une forte influence positive sur les autres joueurs. Je vais voir Gueïda Fofana dans la semaine. Je le verrais bien intégrer l’organigramme en tant qu’éducateur » , a expliqué le président de l’Olympique lyonnais, laissant entendre que le milieu de terrain devrait mettre un terme à sa carrière dans les jours qui viennent. Dans l’attente de la confirmation de cette information par le joueur et par son entourage, il ne reste aux supporters havrais et lyonnais que les yeux pour pleurer sur les souvenirs d’un futur grand joueur.
Deux ans déjà
Il paraît que quand on aime, on ne compte pas. Pourtant, on le sait : cela fait aujourd’hui plus de deux ans que Gueïda n’a pas joué plus de trente minutes en championnat. Sa « der » , c’était en mars 2014, lors d’une défaite face à Monaco (2-3). Remplacé à la 52e minute de jeu par Gourcuff, Gueïda avait ensuite appris qu’il souffrait d’une ostéonécrose (maladie osseuse entraînant la mort des cellules). Comme si les trois buts hors jeu inscrits par Monaco ce jour-là ne suffisaient pas… Après une première opération en juillet de la même année, Fofana avait ensuite connu une longue période de rééducation avant de pouvoir intégrer à nouveau la CFA un an plus tard. Convaincant, son retour lui avait même permis de rejouer quelques minutes en Ligue 1 en toute fin de saison face à Bordeaux (1-1, 19 minutes de jeu) et à Rennes (0-1, 22 minutes de jeu). La fin du calvaire ? Loin de là, malheureusement.
Après la préparation pour la saison 2015-2016, le milieu de terrain prenait lui-même la parole au micro d’OL TV pour annoncer une nouvelle longue indisponibilité : « Lors de mon opération en juillet 2014, le chirurgien m’a posé des vis que je devais garder entre 15 et 18 mois avant qu’il les enlève. Ce sont ces vis qui me gênent aujourd’hui, peut-être la conséquence de mes efforts depuis un an pour revenir à ce niveau, et qui peuvent occasionner des complications, mais il est un peu tôt pour les enlever. » Satanées vis. Cette saison, rien, nada, peanuts, pas la moindre minute de jeu pour Gueïda avec les professionnels. Mais un petit espoir, au début du mois de décembre dernier. « Je serai au rendez-vous. Je veux partir en vacances, puis reprendre l’entraînement comme mes partenaires, plus comme un blessé. J’ai soif de jouer, de découvrir notre nouveau stade, d’être simplement quotidiennement avec mes partenaires » , expliquait le numéro 6 sur le site officiel du club. Quelques mois plus tard, l’avenir semblait s’éclaircir pour Fofana, dans le groupe pour affronter le Paris Saint-Germain au Parc OL. Depuis, peu de nouvelles du milieu de terrain. Jusqu’à ce lundi.
Un ex-futur grand
En plus d’une mentalité exemplaire, le numéro 6 de l’OL avait tout d’un futur grand. Formé au Havre, où il a joué deux saisons en Ligue 2 (entre 2009 et 2011), il était un taulier des équipes de France de jeunes (des moins de 16 ans jusqu’à l’équipe espoir). En 2011, il était le capitaine de l’équipe de France U20 qui dispute la Coupe du monde. Une équipe où il évoluait notamment avec Griezmann, Lacazette, Grenier ou encore Kalidou Koulibaly. De tous, ce sont ses anciens entraîneurs qui parlent le mieux des qualités de Gueïda. « Gueïda est un garçon attachant, sérieux, à l’écoute, qui ne s’éparpille pas et a fait de son métier sa priorité. Il a très rapidement fait partie des sept ou huit cadres de mon groupe et est un excellent relais pour le coach, expliquait au Progrès Francis Smerecki, sélectionneur des jeunes Bleus. Il a un profil assez complet, une grosse activité, sait donner les bons ballons et marquer. Il a quasiment tous les atouts pour réussir et je ne suis pas étonné qu’il ait fait le bon choix en prenant une direction plus sage que certains. »
Pour Vincent Sasso, qui l’a fréquenté dans toutes les sélections nationales de jeunes, la nouvelle est difficile à avaler. « C’est vraiment un choc parce qu’au-delà du footballeur, c’était un mec super. C’est vraiment un mec en or, hyper généreux, hyper gentil. Et puis sur le terrain, c’était pas n’importe qui. C’était un leader, un très bon joueur, toujours prêt à aider. Ça a toujours été celui sur lequel le coach et les joueurs pouvaient compter, un capitaine exceptionnel, explique celui qui prépare actuellement avec Sheffield Wednesday une finale de play-offs pour accéder à la Premier League. « Tu sentais déjà qu’à l’époque, il était plus mature que les autres. C’était un joueur très physique, mais très intelligent. Il était bon techniquement et avait une bonne frappe. C’est un joueur qui aurait pu prétendre à plusieurs sélections en A. Il était vraiment au-dessus. »
À Lyon, Gueïda est rapidement devenu indispensable dans le schéma de jeu de Rémi Garde. Les Gones garderont en tête l’image d’un joueur infatigable, travailleur et disponible, souvent passeur, parfois buteur, mais toujours impliqué. Ils garderont surtout l’espoir suscité par ses prestations de très haut niveau, comme celle livrée face au Viktoria Plzeň, peu de temps avant sa blessure (victoire 4-1, à Gerland et doublé pour Gueïda Fofana). Si le numéro 6 avait pu continuer à progresser de manière si constante, nul doute qu’il serait aujourd’hui un taulier de l’équipe de Bruno Génésio. Mais avec des si, on mettrait Paris en bouteille, des vis magiques dans les chevilles et des retraites à 50 ans pour les joueurs qu’on aime. Malheureusement, les si n’existent pas. Ah si, dans un seul mot. Mersi Gueïda et bon courage pour la suite.
Par Gabriel Cnudde