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Au cœur du ter-ter princier
L'AS Monaco repart de zéro au milieu de terrain. Inquiétant, mais excitant.
L’intersaison a été mouvementée sur le Rocher. Comme d’habitude. Mais, les années passant, le neuf avait fini par côtoyer l’ancien, si bien qu’on reconnaissait toujours le visage de l’équipe de Jardim, malgré la chirurgie. Cet été, Fabinho et Moutinho, fidèles figures du milieu, ont quitté la Principauté. Il n’y avait plus grand-chose à découvrir d’eux, c’était peut-être le temps de leur dire adieu, mais l’immense vide affectif et technique qu’ils laissent dans leur sillage sera difficile à combler. Car, ajouté au départ de Lemar, c’est tout le cœur du jeu de l’ASM qui s’est envolé, et ce qu’il comportait de certitudes – bonnes et mauvaises – dans l’organisation et la création.
Fin de mandat
Ils occupaient le terrain depuis un long bail. Si leur duo n’a rien d’iconique, une flopée d’autres bons joueurs s’étant immiscés entre eux dans l’entrejeu ces dernières années, Fabinho et Moutinho ont emporté avec eux un savoir-faire commun. Ce mélange d’intelligence, de sobriété et d’élégance qui inspirait une confiance infinie. Ils étaient là, à mi-chemin entre le talent insolent de la jeunesse et l’austérité footballistique des grognards. Un lien certain, aussi bien technique que tactique. Même si la paire hybride a parfois été prise en étau, quand les deux compères peinaient à protéger suffisamment leur défense, certes défaillante, ou ne parvenaient pas à parler le langage d’une attaque prolifique, mais davantage attirée par l’exploit individuel que par le sens collectif – Jovetić mis à part.
Avec un Tielemans très effacé pour sa première saison en France et un Lemar qui n’a jamais su endosser le rôle de meneur de jeu, la machine s’est parfois grippée. Alors, pour la relancer une nouvelle fois, plutôt que de changer comme chaque saison une pièce ou deux de son milieu et conserver ses moteurs, les dirigeants ont inventé une nouvelle aventure. Qui suscite forcément un brin de nostalgie – rares sont les joueurs à avoir porté le maillot de l’ASM pendant cinq saisons sous l’ère Rybolovlev – mais aussi une curiosité aux allures d’espoir. Organisateur désigné de par sa capacité à alterner jeu court et jeu long, il est difficile d’imaginer Tielemans ne pas prendre enfin son essor, comme il est excitant de découvrir Golovin à la création. Mais si les deux mondialistes devraient à terme devenir les relais de l’entrejeu, ils auront besoin de ce dont ont manqué Moutinho et Fabinho la saison dernière pour se libérer pleinement : un véritable récupérateur, capable d’arrêter les vagues adverses et d’en initier de nouvelles en sens inverse. Nombreux, les candidats présentent toutefois des profils incertains.
À qui l’héritage ?
Favori pour devenir le boss de la basse besogne : Jean-Eudes Aholou. Si l’ancien Strasbourgeois est davantage un 8 dans l’âme, en témoignent les belles percées dont il est capable, il sait aussi se muer en 6 efficace, comme il l’a montré la saison dernière. Mais avec Golovin encore en vacances et Tielemans en retard dans sa préparation, il est probable de voir l’international ivoirien monter d’un cran pour les premières semaines de compétition. De quoi laisser place à un duel entre l’énigmatique Pelé, arrivé de Rio Ave, et N’Doram, graine locale. Deux joueurs dont les blases aimantent la sympathie, mais qui ont tout à prouver. Le premier, présenté comme un grand espoir il y a quelques années, n’est jamais parvenu à s’imposer dans un club d’envergure, enchaînant les prêts et accumulant bon an mal an de l’expérience en Liga NOS. Un pari dont il est difficile de prédire l’issue.
N’Doram, lui, est un défenseur central de formation, utilisé épisodiquement au milieu par Jardim. Propre balle au pied, bon dans l’anticipation, le sens de l’initiative lui fait encore défaut, et sa densité physique dans les duels n’a jamais sauté aux yeux. Reste désormais à observer qui va s’approprier le rond central. Si Aït Bennasser semble partant, sur le banc, les talents ne manqueront pas, mais ils se concentrent là aussi davantage au poste de 8. Sofiane Diop, venu de Rennes cet été, a fait bonne impression dans ce rôle lors d’une préparation où les satisfactions étaient rares. Robert Navarro en faisait partie. Arraché à la Masia, le présumé crack de 16 ans a étonné par son aisance technique et sa maturité. Il est toutefois peu probable que la Ligue 1 en profite dès cette saison. Encore moins dans cinq ans.
Par Chris Diamantaire